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L’angoisse fiscale qui nous assaille

C’est aujourd’hui que le ministre des finances du Québec, Nicolas Marceau, dévoile sa solution pour pallier au manque à gagner de 1 milliard au fonds consolidé du gouvernement dû à l’abolition de la taxe-santé de 200$. J’en ai parlé peu après l’élection du gouvernement Marois, je suis favorable à ce que l’on réaffirme le principe d’une plus grande progressivité des impôts pour financer les grandes missions de l’État québécois.

Je ne suis pas contre l’établissement de tarifs comme mode de financement, mais pour le faire, on doit toujours établir ce qui constitue un service essentiel et fondamental de ce qui relève d’un privilège ou d’un droit d’ordre secondaire qu’il convient de contribuer à payer selon notre degré d’utilisation.

Par exemple, je suis favorable à la plus grande accessibilité possible aux études supérieures, c’est pourquoi, sans être pour la gratuité, j’étais hostile à la hausse des droits de scolarité proposée par le gouvernement Charest. D’autant plus que cette hausse s’inscrivait dans un processus continu qui allait favoriser l’accroissement du coût des études et de l’endettement étudiant. Je suis par contre favorable à une forme de taxe à l’échec qui est instituée à partir du moment où un étudiant tarde trop à diplômer en multipliant ses échecs et abandons. De la même façon, j’étais heureux que le gouvernement Marois abolisse la taxe-santé qui, dans sa forme, était régressive. Je suis par contre plutôt favorable à la réinstallation de péages sur les routes et les ponts du Québec. Ces recettes devraient être prioritairement allouées vers le financement des transports en commun et du développement des pistes cyclables. Il serait aussi possible et souhaitable d’établir des périodes de pointe où l’électricité est plus chère, d’augmenter les tarifs d’électricité et d’eau potable à partir d’une utilisation jugée excessive, etc. Cela permettrait de protéger l’accessibilité à l’eau et l’électricité pour tous, mais de refiler la facture aux utilisateurs «excessifs». Le banlieusard qui vient travailler en ville en voiture doit assumer une part du choix coûteux qu’il fait. Celui qui a une piscine doit aussi payer sa part de l’utilisation de l’eau qu’il fait par rapport aux autres utilisateurs…

Il y a donc plusieurs moyens de protéger ce qui relève du bien commun immédiat – accès à la santé, à l’éducation, à l’eau –  tout en déplaçant notre assiette fiscale vers les comportements qui induisent une pente néfaste à notre qualité de vie collective, soit pour des raisons de coûts ou pour des raisons environnementales (pression croissante sur les infrastructures, disponibilité de la ressource, etc.).

Si je discute de ces questions, c’est que je crois que le virage vert du gouvernement du Québec peut être réel. Les comportements nécessaires que l’on doit adopter pour affronter les changements climatiques (utiliser l’eau et l’électricité avec plus de parcimonie par exemple) peuvent être induits par une politique tarifaire intelligente qui évite ses principaux effets pervers, soit de favoriser les seuls citoyens nantis.

De la même façon, instaurer une plus grande progressivité des impôts doit se faire intelligemment. Et là-dessus, accordons un premier retrait au gouvernement Marois avec son idée pour le moins saugrenue sinon mesquine de proposer une hausse d’impôts rétroactive… Notre nouveau ministre des finances est issu du milieu universitaire. Il doit faire preuve d’inventivité pour maintenir la compétitivité du Québec sur le plan économique tout en demeurant fidèle à ses principes…

Reste que ce sont les libéraux pour le moment qui sont les plus hystériques et démagogiques – le chef intérimaire Jean-Marc Fournier parle d’«angoisse fiscale», le prétendant chef Raymond Bachand parle de «désastre économique» pour qualifier les intentions du gouvernement Marois de hausser les impôts… Peut-on simplement leur rappeler que les hausses prévues par le gouvernement sont en-deçà des pourcentages d’imposition qui avaient cours au Québec au dernier mandat de Robert Bourassa? Calmez-vous bon Dieu!

Il nous faut contrer le discours démago des chambres de commerce et du Parti libéral qui ne fait que relayer à mots couverts cette vieille tactique du «coup de la Brinks» (ça dit tout de leur motivation:  ces gens-là veulent-ils vraiment le bien du Québec?). Ne devrait-on pas lancer un appel général à tous ceux et celles qui gagnent plus de 130 000$ et qui sont favorables à une plus grande progressivité des impôts pour qu’ils signent une déclaration en ce sens?

Bien sûr, dans le contexte actuel, où on en apprend un peu plus chaque jour sur la gabegie de nos gouvernements dans l’administration des fonds publics, il devient encore plus difficile «d’aimer payer plus d’impôts»… Mais l’idée est de réaffirmer un principe par un cri du cœur: Arrêtez de diaboliser l’impôt, c’est encore le meilleur moyen de maintenir une société juste où les principaux programmes sociaux demeurent accessibles pour tous.

L’appel est lancé!