Mylène Gilbert-Dumas / Yukonnaise : Perdre le nord
Salon du livre 2012

Mylène Gilbert-Dumas / Yukonnaise : Perdre le nord

Mylène Gilbert-Dumas s’envole pour Dawson City. Un aller simple romanesque intitulé Yukonnaise.

« Un soir, pendant ma résidence d’écriture au Yukon, j’ai invité quatre hommes à souper chez moi. Je voulais qu’ils m’expliquent pourquoi ils étaient toujours célibataires, se rappelle Mylène Gilbert-Dumas. Ils se sont ouverts, m’ont parlé de leur esseulement comme je n’avais même pas osé l’imaginer. On a conclu la soirée en se disant qu’il faudrait bien que mon livre convainque quelques femmes du sud de s’installer à Dawson City. »

C’est tout le bonheur que l’on souhaite à ces bons bougres du Nord, bien que Yukonnaise, deuxième roman « contemporain » de la Sherbrookoise (après L’escapade sans retour de Sophie Parent, succès de librairie en 2011), n’ait pas le lustre paradisiaque d’une infopub conçue à l’intention de la jolie citadine. Tout de la vie au Yukon y est dévoilé sans ménagement, décrit avec un scrupule quasi anthropologique: le dénuement monacal et la solitude de ses habitants comme les conditions d’hygiène dignes du siècle dernier. L’écrivaine a peut-être mis de côté le roman historique, elle n’a pas renoncé aux techniques de recherche propres au genre. « Lili Klondike, la série de romans qui m’a d’abord menée au Yukon, était un portrait de société d’une autre époque. Yukonnaise se veut aussi un portrait de société. J’ai donc dû payer la bière à plusieurs personnes afin qu’elles me racontent leur vie, leurs exils. Dans une des premières entrevues que j’ai menées, une fille m’a dit: « Tu sais, ici au Yukon, il n’y a pas de subjonctif, il n’y a pas de ‘il faut que’. Il n’y a que du conditionnel, que des ‘je pourrais faire ci, je pourrais faire ça’. Tu peux tout faire ici si tu veux. » »

Tout faire? Enfin, dans une certaine mesure, apprendra à ses dépens l’héroïne de Yukonnaise, Isabelle St-Martin, esthéticienne de Québec aimantée par son amour pour un homme du Nord et que la froidure plumera, petit à petit, de tous ses apprêts d’urbaine – vêtements à la page, mascara, coiffure sophistiquée. Un thermomètre à -50 degrés Celsius ramène rapidement, et peu courtoisement, à l’essentiel, constatera-t-elle, à l’instar de sa créatrice. « Quand tu sors à l’extérieur à cette température-là, c’est comme un coup de 2×4 au visage. Si tu n’es pas bien habillé, tu étouffes. Je me suis fait un point d’honneur, pendant ma résidence, de mettre le nez dehors tous les jours pour savoir ce que ça faisait… Ben c’est frette! »

Heureux et nécessaire envers à toutes les contrariétés qu’engendre l’absence d’électricité et d’eau courante – le pain quotidien de plusieurs Yukonnais -, Isabelle découvrira chez ses nouveaux compatriotes une solide solidarité communautaire ainsi qu’une chaleur humaine que le plus mordant des blizzards ne pourrait refroidir. « Le Yukon, c’est la terre de tous les possibles. On se réinvente comme on veut là-bas. Les gens qui y vivent sont des marginaux qui refusent les structures sociales. Mais tu vois, pendant ma première visite, une maison est passée au feu. Quelques jours plus tard, il y avait une collecte au village. On a ramassé 30 000$ dans le temps de le dire. »

Yukonnaise
de Mylène Gilbert-Dumas
Éd. VLB, 2012, 360 p.

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Séances de dédicaces
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