Musique

Prise de son : Un après-midi au parc

Disons-le tout net dès le départ: une bonne partie de cette édition du Polliwog, qui se déroulait samedi dernier, au parc Jeanne-Mance, a été gâchée par une mauvaise sonorisation généralisée. On veut bien tenir compte des impondérables (les groupes qui ne font même pas de test de son avant de monter sur scène), mais il y a tout de même des limites.

Le pire, dans tout ça, a été réservé à la tête d’affiche du festival itinérant: Groovy Aardvark. Parce qu’après s’être fait rincer les oreilles pendant toute la journée, non seulement nous n’avons pas eu droit à un son de qualité, mais celui-ci était résolument trop faible en volume. La musique, c’est aussi – vous le savez bien – une réaction physique. Lorsqu’un groupe de la trempe de Groovy joue, et que la basse n’est pas assez présente, cette même musique perd énormément de son impact.

C’est dommage parce que j’aurais bien aimé que ce show-là (c’était le dernier avec Marc-André Thibert, fidèle guitariste) soit un vrai événement. J’aurais aimé voir les gars se défoncer pour quelque chose. J’aurais aimé ressentir avec eux la force de leur musique. C’est bien simple, par moments, j’avais l’impression de n’entendre que les retours sur scène et rien qui venait des haut-parleurs pour le public. Et, pourtant, je me suis approché à une dizaine de pieds du sonorisateur. Avait-il de la ouate dans les oreilles?

Ce qui fait qu’il y avait un décalage important entre ce que je voyais et ce que j’entendais. Si je me fie uniquement à mes oreilles, Groovy Aardvark était vraiment mou, samedi dernier. Par contre, si je me fie à mes yeux, les quatre membres du groupe semblaient avoir un réel plaisir; ils ont donné leur 110 %, particulièrement Vincent Peake, le chanteur et bassiste, qui démontrait une verve peu commune.

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Juste avant, il fait toujours plaisir de voir The Planet Smashers, fiers représentants du ska montréalais. Non pas que j’y tienne vraiment, mais je trouvais vraiment cool d’entendre le chanteur du groupe, un anglophone, s’adresser au public exclusivement en français, chaque fois qu’il présentait une chanson. Chapeau!

Moi, j’aime bien The Planet Smashers. Leur ska est plutôt roots, pas du tout punk. J’aime voir les immenses sourires de ces musiciens lorsqu’ils montent sur scène. J’aime leur section de cuivres (trombone, saxophone) sautillante. J’aime la légèreté, le petit soupçon d’insouciance qu’un groupe comme ça insuffle à un événement comme le Polliwog où il est de bon ton d’avoir une attitude et d’être enragé contre la société dans son ensemble. Cool!

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Plusieurs spectateurs semblaient s’être déplacés uniquement pour voir et entendre Cryptopsy, un groupe de métal extrême (ce sont les membres du groupe eux-mêmes qui le disent), qui tourne de plus en plus à l’extérieur du Québec et avec de plus en plus de succès, si on en croit leurs récentes déclarations.

Honnêtement, je m’attendais à bien pire: la musique de Cryptopsy n’est pas si extrême (en fait, elle pourrait sûrement être plus extrême avec une vraie sonorisation, pleine de basses et poussée au maximum). Malgré tout, j’ai bien aimé le vociférateur en chef: bonne voix, bonne attitude de celui qui fait comme s’il allait manger tout le monde! Ça, c’est extrême! Pour le reste, on s’en reparlera lorsque Cryptopsy jouera dans de meilleures conditions…

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Pour connaître la popularité d’un groupe, lors d’un marathon musical comme le Polliwog, il suffit de regarder l’achalandage devant la scène. On aura ainsi appris que le Polliwog est certainement très fréquenté par un public francophone qui se fout pas mal de Bionic, groupe montréalais anglophone, issu des cendres des Doughboys, qui n’ont jamais été eux-mêmes des favoris à l’est du boulevard Saint-Laurent. Pourtant, Bionic est loin d’être un mauvais groupe. Leur pop-punk est diablement efficace et John Cummings, le chanteur et guitariste du quartette, a une assurance impressionnante.

Par contre, il faisait bon voir le même public, plus tôt dans la journée, se masser le plus près possible de cette même scène pour entendre WD-40 et ses chansons country-rock d’adolescents, un brin scatologiques, où il est beaucoup question de sexe, de drogues (sous toutes les formes, même liquide…) et de rock’n’roll. De plus, comme il était tôt, le trio dirigé par le bassiste et chanteur Alex Jones était particulièrement fiable et carré. De bon augure pour la saison qui s’en vient…

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Est-ce moi qui ai halluciné ou bien il y avait moins de monde que lors des précédentes éditions du Polliwog? Je veux bien croire qu’il a fait gris une bonne partie de l’après-midi, mais, tout à coup, j’ai eu un sérieux doute, malgré la légendaire ténacité de Martyne Prévost, l’organisatrice de l’événement: et si c’était le dernier Polliwog?