Musique

Live à Montréal : Live/Big SugarLe Festival de musique du MagrhrebFur Packed Action/Hashimoto/Dead City RebelsShutdown/Earth Crisis/Cro-Mags/All Out War

Live/Big Sugar
Le 27 janvier au Centre Molson

Ai-je vraiment besoin de vous parler de Big Sugar, qui assurait la première partie de Live, jeudi dernier, au Centre de la bière molle? Non, ces racoleurs rock’n’roll de première qui insistent pour chanter en français par fausse sympathie, et par vrai souci d’entrenir le difficile marché québécois, ne valent pas la peine de gaspiller davantage d’espace.

À ce titre, on ne tartinera pas très longtemps non plus sur Live; ils ont prouvé ce soir-là que les espoirs que plusieurs plaçaient en eux au début de leur carrière (dont moi) étaient vains. Arrivé sur scène canne à la main, lunettes noires sur le nez et chapeau de cow-boy sur le crâne, le chanteur Ed Kowalczyk installait d’entrée de jeu son personnage: le preacher rock américain. Probablement conscient que son dernier album The Distance to Here était encore trop vert (ou trop faible) pour vraiment faire lever la foule (à part le premier extrait The Dolphin’s Cry qui suscita une réaction instantanée), le quartette, gonflé en sextette pour les besoins de la tournée, s’est surtout appuyé sur les valeurs sûres du passé: Operation Spirit, All Over You, Shit Town, Lakini’s Juice, et Lightning Crashes et I Alone en rappel.

Non content de jouer le preacher d’occasion avec ses sermons pseudo-spirituels («Less talk, more music», avais-je envie de lui crier), Ed s’est même pris pour John Lennon, le temps d’une reprise oubliable d’Imagine, une chanson «qu’on ne peut entendre trop souvent dans sa vie», a-t-il lancé en guise d’introduction. Mmm, pas sûr…

De toute évidence, Ed a appris à tirer les ficelles du rock d’aréna: déshabillage progressif, sparages pour déplacer de l’air, et motivation de foule 101; mais son groupe et ses chansons paraissaient beaucoup trop faiblards face au besoin d’émotions fortes des 10 000 spectateurs présents. Rendez-vous raté. (Eric Parazelli)

Le Festival de musique du Magrhreb
Le 29 janvier au Kola Note

Ça faisait longtemps que je n’avais vu autant de monde au 5240, avenue du Parc. Comme prévu, le Kola Note était tout sauf désert sur le coup de neuf heures quand les danseurs de la troupe algérienne Béni Ameur ont pris possession du parterre. Pas de quoi se rouler sur ledit parterre cependant. À moins d’un professionnalisme chevronné, l’effet anachronique que produit la culture ancestrale ou folklorique est parfois dur à digérer. Surtout quand on transpose le désert profond dans une métropole en plein hiver avec si peu de moyens. Heureusement, cette troupe possède la volonté farouche de préserver les codes légués par les héroïques populations du Sahara. Des costumes magnifiques, une candeur séduisante chez les plus jeunes acteurs; bref, un amateurisme de fort bon aloi qui semblait bien faire l’affaire dans cette ambiance chaleureuse et bon enfant.

Mais la surprise du programme, celui que la rumeur désignait comme la révélation de la soirée, c’était le Marocain Hassan El Hady. Chanteur mais surtout impressionnant joueur d’oud (une espèce de luth arabe à douze cordes), cet homme apparemment fort sympathique, flanqué d’un excellent saxophoniste québécois, a mis sur pied un groupe inédit qui joue, comment dire?, qui joue un genre de world jazz progressif avec des accents andalous et des sonorités arabisantes. Au moment où je pensais que les intervalles harmoniques inusités de cette musique recherchée passaient complètement au-dessus de la tête du public de samedi, le parterre s’est littéralement rempli de danseurs improvisés dont les mains levées décrivaient sans arrêt de frénétiques arabesques.

Donc, en attendant de revoir ce groupe (peut-être sur une scène extérieure du FIJM cet été?), il faut reconnaître que les organisateurs de ce Festival nord-africain ont gagné leur pari. Cette neuvième édition, remodelée en une soirée unique, offrait aux artistes plus d’espace et permettait de rassembler un public plus varié. Comme quoi, à Montréal, les sympathisants de la chose maghrébine sont bien plus nombreux qu’on ne croit… (Ralph Boncy)

Fur Packed Action/Hashimoto/Dead City Rebels
Le 29 janvier au Jailhouse

En me pointant au Jailhouse vers 23 heures, je croyais arriver juste à temps pour l’attraction principale de la soirée, les Terre-Neuviens de Fur Packed Action. Encore une fois, j’avais sous-estimé l’étrange conception du temps des propriétaires des lieux, et mon arrivée a coïncidé avec les premières notes du deuxième des quatre (!) groupes présents ce soir-là. À cinq piasses l’entrée, ça faisait beaucoup de décibels au dollar, un peu trop, même. Originaires d’Ottawa (d’où leur nom), les Dead City Rebels ont livré une assourdissante performance qui évoquait par trop MC5, mais qui avait le mérite d’être réglée au quart de tour. Fort et brutal, mais loin d’être original. Ce n’est pas un hasard si leur nom rappelle étrangement celui des Murder City Devils.

Bien qu’il ait fait tomber le décibélomètre de plusieurs crans, Hashimoto nous a offert un set nettement plus rock que lors de sa performance au Cabaret quelques jours plus tôt; mais le public du Jailhouse semblait peu sensible aux charmes pop des chansons de Gordon. Dommage, parce que de tous les artistes présents ce soir-là, il s’agit certainement du meilleur songwriter. À noter: Éric Goulet, leader des Chiens, agissait à nouveau à titre de deuxième guitariste (Est-ce en train de devenir un nouveau boulot?). Pour quelqu’un qui joue avec le groupe depuis seulement deux semaines, Goulet semblait à l’aise comme un poisson dans l’eau. Lorsque Fur Packed Action s’est enfin pointé sur scène, il était déjà plus d’une heure du matin. Après avoir écouté leur disque The Dull Thud of Fur, on se serait attendu à une performance plus éclectique, mais le groupe s’est contenté de jouer dans le registre pop-punk. Malgré l’heure tardive, l’énergie était au rendez-vous, et les quelques «Fur Heads» massés devant la scène, membres de la diaspora terre-neuvienne pour la plupart, semblaient en avoir eu pour leur 5 $. (Nicolas Tittley)

Shutdown/Earth Crisis/Cro-Mags/All Out War
Le 30 janvier au Rainbow Ites

La vieille et la nouvelle garde du hardcore new-yorkais étaient bien représentées dimanche dernier: Shutdown, All Out War et Earth Crisis avec leur style actuel et groovy, suivis de Cro-Mags, au hardcore garroché et enragé. N’étant pas une grande amateure de Shutdown, je suis arrivée pour entendre les derniers morceaux d’All Out War, un hybride intéressant de thrash death métal et de hardcore efficace qui a l’avantage de paraître à sa place partout où le groupe passe. Malgré la moiteur qui régnait dans la salle, le quintette s’en est bien sorti, offrant une prestation énergique. Cro-Mags étant en retard, c’est Earth Crisis qui est monté sur scène quelques minutes plus tard. Le quintette, digne représentant du mouvement straight edge (qui dit non à la drogue, à l’alcool et à la viande), a été accueilli dans l’allégresse par 450 personnes venues entendre leur hardcore aux textes revendicateurs et engagés. Même si la musique du groupe n’est pas bien compliquée, elle rentre au poste. Earth Crisis a profité de l’occasion pour jouer des morceaux du prochain album, qui sera offert cet été. D’ailleurs, le chanteur Karl Buechner semblait content d’annoncer leur retour avec Victory Records, après un passage désastreux chez Roadrunner. Finalement, une heure plus tard, Cro-Mags est monté sur scène devant une foule clairsemée et peu attentive aux propos du chanteur et bassiste Harley Flanagan, qui a cru bon de préciser que le groupe n’effectue pas un retour: «On poursuit là où on avait laissé en 1989 avec Best Wishes.» Le nouvel album s’intitule Revenge. Peut-être que les gars sont encore pleins de vigueur, mais dimanche au Rainbow, on avait plutôt l’impression d’assister à un retour pathétique. (Christine Fortier)