Live à Montréal : Jean LeloupTina Turner et Joe CockerÜberzone
Musique

Live à Montréal : Jean LeloupTina Turner et Joe CockerÜberzone

Jean Leloup
Au Spectrum, les 28 et 29 septembre

On a laissé le temps à la poussière soulevée lors de la première médiatique de retomber avant d’approcher Jean Leloup, qui s’installait au Spectrum pour quatre soirées «intimes» (trompeusement présentées, sur les affiches, comme «acoustiques»). Lorsqu’on est allé à sa rencontre, le deuxième soir, on a pu voir un Leloup hilare, entouré de mouettes tout aussi rieuses, jouant devant un décor en forme de grosse lune rouge et (ou) jaune. Ça augurait bien. Atmosphère détendue, bon enfant; décor sobre, à l’image de ses deux musiciens (Alex Cochard à la basse et Stéphane Gaudreault à la batterie) discrets mais efficaces, prêts à le suivre dans les méandres de l’imprévisibilité.

Dès les premières mesures, interprétées en solo à la guitare sèche, on comprend ce que Leloup entendait par «intime». On a tout de suite l’impression d’être dans sa cuisine, dans sa chambre à coucher, ou autour d’un feu de camp. Il enchaîne coup sur coup des ébauches de nouvelles pièces, des versions écourtées et des réécritures complètes. Parfois, il a l’air du gamin qui vient présenter fièrement une bestiole morte ou une crotte de nez à sa mère («Regarde, regarde, j’ai écrasé Printemps-été!»); à d’autres moments, d’un savant fou qui semble sur le point de percer le secret de la pierre philosophale. Car Leloup marche sur un fil très ténu, avec pour seul parapluie cet incroyable charisme. Qu’il tombe importe peu, puisque le public est toujours juste en dessous pour le ramasser dans son filet. Ainsi, lorsqu’il bûche comme un enfant de trois ans sur son vibraphone, visiblement fier de sa médiocrité, on lui pardonne, parce que c’est cette même attitude insouciante qui fait qu’il nous livre aussi des perles spontanées, comme cette version funky d’Alger, particulièrement appréciée de la foule. Oui, l’homme a du génie, et on a pu le constater à nouveau en allant voir le concert de vendredi, alors que les premiers symptômes de la grippe commençaient à se faire sentir chz le chanteur. Bien qu’il n’en avait cure, Leloup affichait tout de même quelques signes de fatigue évidents. La voix était brisée, l’énergie, moins fulgurante, et les chansons avaient tendance à se terminer en queue de poisson. Mais il était là, souriant, à se donner tout entier, tout croche, et tout beau. Ils ont aimé. (Nicolas Tittley)

Tina Turner et Joe Cocker
Au Centre Molson, le 28 septembre
L’entrée en scène de Tina Turner sur I Wanna Take you Higher de Sly and the Family Stone, avec sept musiciens, six danseuses et son super décor à trois étages, c’est quelque chose! La grand-mère du rock and soul couvait une mauvaise grippe mais n’aurait jamais annulé un tel spectacle – son deuxième dernier show d’adieu, en fait – dans un Centre Molson plein à craquer. «C’est un voyage à rebours à travers ma carrière», a-t-elle lancé sans fausse modestie avant de tout enchaîner dans un ordre non chronologique avec images à l’appui sur les trois écrans vidéo. De Rivers Deep Mountain High à We Don’t Need Another Hero, en passant par Try a Little Tenderness d’Otis Redding en prime, Private Dancer et, bien sûr, What’s Love Got To Do With It, un feu d’artifice sans véritable surprise mais forcément bien rodé. Un doute persiste cependant: vu la place faite dans ce tour de chant aux chansons de son récent album Twenty Four Seven, on peut se demander si la lionne est vraiment pressée de déposer les armes à soixante-deux ans.
À signaler qu’en première partie, ce bon vieux Joe Cocker – déplumé mais bien en voix – nous avait servi une heure non-stop de ses hits, les yeux fermés et avec ses mimiques habituelles. Faut-il ajouter que le public (plutôt adulte) ne s’est pas fait prier pour reprendre en choeur Up Where We Belong, You Are So Beautiful et ce With a Little Help From My Friends dans lequel il excelle depuis trente-deux ans seulement? Nostalgiiie… (Ralph Boncy)

Überzone
Au Sona, le 29 septembre
La performance d’Überzone au Sona vendredi soir dernier a permis a public du afterhours de s’essouffler à souhait. Q, la tête pensante du groupe, s’est tenu vigoureusement responsable de la batterie électrique minutieusement branchée à un échantillonneur, et le DJ Davy Dave s’est occupé d’égratigner quelques platines. Le concept live n’était présent qu’à moitié puisque les rythmes étaient presque tous préparés à l’avance et enclenchés sur scène. Mais l’énergie associée à un spectacle live y était palpable et ceci démontre de façon éloquente qu’une prestation de ce genre dans un afterhours ou dans un rave n’est que très rarement décevante. On y ressent beaucoup d’implication tant musicale que physique, et cette fougue est rapidement transmise à la foule. Le succès d’un tel événement réside dans le contact direct de la musique et des musiciens avec le public, trop souvent absent lors des performances de D.J. Le même phénomène s’observe chez le groupe New Deal par exemple. La fusion du breakbeat et de l’énergie techno a fait bouger la foule du Sona pendant près d’une heure. Le concept d’Überzone est promis à un avenir intéressant et le groupe devrait revenir avec un autre événement, plus important que celui-ci, à la suitede la parution de leur premier album, au printemps. (Étienne Côté-Paluck)