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Les vendeurs de pilules

Devant mon téléviseur, je sursaute en entendant un représentant d’une association de pharmaciens comparer les objectifs commerciaux du pharmacien à ceux d’un quincailler. En effet, Radio-Canada nous apprend que le prix des médicaments d’ordonnance n’est pas le même dans toutes les pharmacies du Québec. Honnêtement, je n’ai jamais cru qu’il faille magasiner les prix des médicaments.

Si un particulier tente d’acheter un marteau, il peut magasiner sur les sites internet, feuilleter les circulaires, se déplacer dans les rayons, réfléchir et prendre une décision éclairée (il peut même se faire croire que ça vaut la peine d’acheter 12 marteaux pour obtenir le 13e gratuitement.) Lorsqu’on sort de chez le médecin, il faut faire la file à la pharmacie et tendre la prescription parfois illisible au comptoir « donnez ici ». Au moment de se présenter sous la bannière « recevez ici », en connaissez-vous beaucoup de citoyens qui diront « c’est quoi ta marge là-dessus? » ou « si je t’en prends 30 de plus, est-ce que tu m’enlèves l’équivalent des taxes? » ou « si tu me donnes 12 rouleaux de papier hygiénique en prime, on a un deal ».

Si les pharmaciens veulent être libres d’établir la marge brute des médicaments d’ordonnance, alors il serait intéressant, voire nécessaire, que les prix soient clairement affichés quelque part. Lorsqu’on a besoin de médicaments, on ne se questionne pas, on paye. La gestion du prix des médicaments est un enjeu social. Dans le système de la santé, chaque fois que je demande le prix de quelque chose, on me demande d’abord si je suis assuré […] comme si le fait que je sois assuré devait changer la réponse à la question.

La concurrence pure et parfaite n’existe que si l’information est disponible. Il n’est pas vrai qu’un contribuable se présentera à 12 pharmacies pour négocier ses antidépresseurs. Dans un autre type de commerce, le client peut choisir une autre option comme acheter un bien usagé : une pilule de seconde main, ça vous intéresse?

Si à l’épicerie les prix doivent être clairement affichés, pourquoi n’en est-il pas de même pour les médicaments d’ordonnance? Si les pharmaciens affirment que leur modèle d’affaires n’est pas différent des autres commerces, ils devraient faire preuve de la même transparence. Oui, le pharmacien est un professionnel de la santé, c’est son rôle de conseiller. Mais dans son rôle de vendeur de pilules non disponibles ailleurs que dans une pharmacie, peut-il faire preuve de plus de transparence? Poser la question, c’est y répondre.