Restos / Bars

Saveurs de Thaïlande : Siam! Siam!

Fraîchement revenu de Thaïlande, où j’ai goûté la cuisine de la rue, la cuisine des restos familiaux, la cuisine côtière du Sud et de l’Est, de la frontière laotienne, toutes distinctes, et enfin la cuisine de palais, je me rends compte que la seule chose qui m’ait sérieusement manqué, c’est le café…

Fraîchement revenu de Thaïlande, où j’ai goûté la cuisine de la rue, la cuisine des restos familiaux, la cuisine côtière du Sud et de l’Est, de la frontière laotienne, toutes distinctes, et enfin la cuisine de palais, je me rends compte que la seule chose qui m’ait sérieusement manqué, c’est le café, le Nescafé ayant totalement remplacé l’arabica. Pourtant, côté cuisine, les Thaïs sont aussi scrupuleux que les Chinois, et sont vite devenus des rivaux de taille dans la restauration contemporaine.

Malheureusement, les palais sensibles des Occidentaux forcent de plus en plus les chefs thaïs à mettre de l’eau dans leur vin – ou dans leurs piments. Il faut donc insister chaque fois qu’on mange dans un restaurant pour que l’on prépare les plats «style thaï», et non édulcorés à l’occidentale. Cela dit, cette cuisine fait usage de quatre sortes de basilic; d’une vingtaine de piments forts, chacun servant à donner une note particulière; d’un garde-manger d’au moins une vingtaine d’aromates frais, et autant de secs; de sauces multiples; en plus des condiments à base de poissons fermentés de toutes sortes, de la crevette à l’anchois, en passant par l’anguille, le calmar et la méduse. Cette cuisine, donc, où les haricots mesurent presque un mètre et les aubergines sont de la taille d’un petit pois, et dont les repas se composent en moyenne de dix plats distincts pour quatre personnes (pouvant aller jusqu’à deux cents pour un repas «royal»), a de quoi être considérée comme une grande cuisine.

Nulle part aussi raffinés qu’à Bangkok, la capitale thaïe, les restaurants de «haute cuisine» m’ont laissé un souvenir impérissable tant par la finesse extrême de leurs préparations et le souci de présentation que par leurs goûts explosifs. Cuisine de contrastes, où l’équilibre entre les parfums se fait parfois violent, la vraie cuisine thaïe – que l’on retrouve difficilement ici, nos papilles étant trop «délicates» – compte comme ambassadeurs certains des meilleurs restaurants au monde. Le guide Gault-Millau publie d’ailleurs un répertoire des quelque vingt mille tables de Bangkok, et reste un indice de l’intérêt que présente la ville aux yeux des amateurs de vraie grande cuisine. Rien que pour ça, j’y retournerais n’importe quand.

Quelques restaurants: Bussaracum, Pan road. Ban Chiang, Srivieng road. Thanying, Soi Pramuan. Djit Pochana, Soi 20. Baan Thanika, Soi 23, Sukhumvit. Prix moyen d’un repas pour deux personnes, tout compris: 32 $!

U & Me
Les nouilles orientales – cuisine de rue par excellence – peuvent être petit-déjeuner, lunch, en-cas ou souper. Désirées autant des empereurs que des mendiants, les nouilles sont faciles à préparer, à servir et à manger, qu’on soit seul ou en groupe. Peut-on parler de mode? Ou mieux, les Montréalais s’éveillent-ils aux charmes de ce plat? En tout cas, dans les environs de l’Université Concordia, quatre établissements lui sont consacrés. Chez U & Me, le tout dernier, on ne réinvente pas la roue, ni la nouille d’ailleurs. Mais on propose un menu panasiatique dans un cadre synthétique et aseptisé évoquant un fast-food qui nous transporte bien loin des cuisines-locomotives des rues de Bangkok. Qu’à cela ne tienne, les nuits sont plutôt fraîches sous nos latitudes, et mieux vaut aspirer ses rubans glutineux à la lumière des néons que sur le trottoir. En plus des nouilles à la vietnamienne, à la chinoise, à la thaïe ou à la japonaise, on propose des soupes, du riz frit et des plats sautés qui révèlent l’ascendant hong-kongais des patrons. Tout est fait avec célérité, et les cuisiniers font sauter leurs crevettes, leur porc laqué et leurs rubans de farine de riz avec le plus grand soin et une bonne maîtrise des saveurs. Nous avons avalé avec plaisir (et rapidité) des nouilles au curry à la singapourienne, à la shanghaïenne et à la façon thaïe, et toutes étaient excellentes pour se prémunir contre le froid sans s’alourdir l’estomac. Avant ou après le cinoche, c’est parfait. Inutile de rajouter que l’endroit n’a rien de romantique. Il compte toutefois une clientèle d’étudiants asiatiques gaillards, une excellente garantie de qualité. Et puis, on parle parfaitement français, le croiriez-vous? Comptez 7 $ le plat de nouilles, taxes comprises.

U & Me
1900, rue Sainte-Catherine Ouest
931-0081

Amuse-gueule:
Voyager dans un pays comme la Thaïlande invite à manger dans la rue. Que vous soyez dans la capitale ou dans les villes de province, vous n’êtes jamais à plus de dix mètres d’un endroit où l’on fait la cuisine directement sur le trottoir. Du troquet portable au fast-food de tradition, en passant par le café sur roues, la Thaïlande est l’un de ces paradis gastronomiques qui, plus souvent qu’autrement, rayonnent du bas vers le haut. Mais ce n’est pas le seul pays où les cuisiniers préparent les repas à même le pavé. L’Inde, le Maroc, la Chine, le Mexique, l’Indonésie, la France, la Hollande et les États-Unis sont autant de nations dont les administrations municipales n’ont pas (encore) interdit ces pratiques. À ce sujet, on vient de traduire le très beau livre d’Israel Aharoni, justement intitulé Cuisine de rues (Minerva). Il ne s’agit pas d’un livre de recettes, mais d’un manuel de voyage aux photos splendides dans ce monde des «cuisines à aires ouvertes». On parcourt ainsi douze pays (dont la Thaïlande, bien sûr) à travers le menu, révélant au passage des aspects socioculturels de la vie urbaine et les goûts des habitants. Bien que la prose de l’auteur soit assommante, la recherche, les trouvailles et les photos en font un excellent ouvrage de référence.