Restos / Bars

Coyuca : Auténticamente mexicano!

Le tout nouveau Coyuca transporte la cuisine mexicaine au-delà des trop populaires tacos et burritos, dans un univers où la gastronomie ancestrale, les piments goûteux et les sauces fines sont à l’honneur.

Dire que la cuisine mexicaine est fine constitue une contradiction dans les termes. Pourtant, méconnue donc inconnue, il y a au Mexique une réelle tradition de cuisine savante, une gastronomie d’origine noble transmise dès l’empire aztèque aux conquistadores. Rappelez-vous le film Une saveur de passion: on y préparait des sauces fines, composées de cacao, de dizaines de piments différents – chacun apportant une nuance et une brûlure unique -, des pétales de rose, et tout un garde-manger épicé qui ferait rougir les Chinois. Cette cuisine-là n’existe nulle part ailleurs qu’au Mexique, et encore faut-il se mettre à sa recherche pour la dénicher.
En migrant, la cuisine mexicaine est devenue celle des joueurs de base-ball en fin de partie, une gastronomie composée de tacos et de sauces grossières et arrache-gueule qui ne se digèrent qu’au prix d’efforts suprêmes. En recevant des touristes sur ses plages, le Mexique a aussi imposé ses mets au même titre que la Corona. L’orientation «Tex» a largement pris le dessus sur l’orientation «Mex».
C’est ce genre de tambouille qu’a voulu éviter à tout prix Jona Silva, le chef-propriétaire du nouveau restaurant Coyuca, qui a remplacé la manufacture de burritos autrefois installée entre ces murs. D’autre part, les nouveaux proprios n’ont pas eu à faire trop d’efforts pour revitaliser l’espace et effacer les vestiges de quétaineries qui l’habitaient. Quelques coups de pinceau pour couvrir des murales hideuses, de nouvelles lampes, et une ambiance décontractée de chaumière mexicaine remplacent un décor défraîchi. Seul l’immense sombrero qui coiffe le bar rappelle que le précédent occupant était plus connu pour ses margaritas que pour ses petits plats. Ce qui n’est plus le cas.
On trouve à la carte du Coyuca des plats qui n’ont jamais été confectionnés dans cet hémisphère depuis la conquista. Les ingrédients utilisés sont importés à grands frais, autant les différents chilis que les tomatillos et certains assaisonnements. Avec un mole oaxaquña, on s’éloigne enfin de ces lourdes concoctions dont le goût de cacao prenait le dessus sur celui des piments. Cette confection, qui remonte aux premières années de la colonisation espagnole en terre d’Amérique, contient très peu de «chocolat», et parfois jusqu’à une vingtaine de piments et d’épices savamment mélangés. Servi avec une poitrine de volaille pochée et du riz vapeur, le mole du Coyuca est riche et parfumé sans jamais révéler aucun de ses ingrédients secrets: c’est l’amalgame qui lui donne de l’expression. Une autre sauce légèrement aqueuse, à base de chayottes, de champignons, de tomates, de courgettes et de piment séché appelé chipotle, dont la brûlure est unique et flatteuse, sert d’accompagnement à un suprême de canard rôti et servi sur des nouilles crémeuses. Des soupes onctueuses au piment, à la coriandre et aux haricots noirs, et des chilis farcis au poisson et au plantain ajoutent encore du pittoresque sans jamais tomber dans le commun. Les desserts, une pie de lima, sorte de tarte fromagée au parfum intense de citron vert, et un flan, inspiré de notre crème caramel, sont des plus succulents et de confection soignée. Service sympa et joyeux et une addition – quand on prend la table d’hôte de trois services – qui passe comme un souffle: 50 $ pour deux repas, taxes et service compris, avant les boissons.
Coyuca
1202, rue Bishop
875-7082

Montréal en lumière
Catapulté de Toscane cette semaine pour le festival Montréal en lumière (qui se poursuit jusqu’au 4 mars), Francesco Berardinelli était l’invité de John Ledwell, chef au restaurant Bice. Apparemment tout séparerait cet Italien de son hôte, originaire de l’île du Prince-Édouard, si ce n’était leur âge – la trentaine. Mais, confortablement installés dans l’une des plus belles salles à manger du centre-ville, nous avons été séduits par une cuisine d’ascendance champêtre, des recettes subtilement recalibrées, et des classiques de cette région où la cuisine n’est pas la plus délicat de l’Italie, mais certainement l’une des plus satisfaisantes.
On a donc retrouvé avec bonheur des plats anciens d’inspiration aristocratique, certains à base de haricots (très toscan, ça), du lapin braisé aux herbes fraîches, des gnocchis de pomme de terre servis avec des coeurs d’artichauts, du bar sauté accompagné d’asperges, et du pigeon en sauce aigrelette évoquant la cuisine médiévale qui dominait la cour des Médicis à Florence. Mais le plat le plus étonnant de ce très bon repas furent sans doute des raviolis de courge parfumés aux amandes – une tradition locale -, audacieusement présentés avec un filet de rouget sauté à l’ail! Je sais, ça sonne étrange, et ça l’est. Mais le plus formidable en gastronomie, c’est de prendre des risques, et que le résultat soit séduisant. Le menu de sept services était offert à 50 $: une facture légèrissime pour un tel repas. Accourez, le Toscan sera au Bice jusqu’au 4 mars.
Bice
1504, rue Sherbrooke Ouest
935-6009

Amuse-gueule
Petit constat en ce qui concerne le festival: de toutes les conférences et de tous les ateliers présentés, seuls ceux du Collège LaSalle, qui offre un programme d’études en hôtellerie, étaient gratuits. Pourtant, à l’ITHQ, qui propose également un tel programme, les prix s’élevaient à 100 $. L’Académie culinaire, elle, exigeait pour ses ateliers et conférences: 75 $. Même le Ritz demandait moins pour certaines activités (entre 40 $ et 125 $)! Les gestionnaires qui occupent des postes-clés dans ces institutions voyaient-ils là une façon d’équilibrer le budget annuel en période creuse? Si les organisateurs souhaitent dans le futur faire participer les Montréalais à ce Festival, il faudrait leur offrir un peu plus d’incentive, et imposer des limites aux prix astronomiques que certains demandent pour des activités, aussi intéressantes soient-elles!_____