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Notes de cours d’Alaclair High

En attendant la publication de mon entrevue avec Ogden d’Alaclair Ensemble – qui lance le nouvel album Les maigres blancs d’Amérique du Noir ce jeudi 9 mai au Cabaret du Mile-End -, voici des retailles d’entretien qui ne se retrouvent pas dans l’article, faute d’espace, mais qui demeurent tout de même intéressantes.

Politique 102

“On se rend compte qu’on choque un peu tout le monde! “Par défaut, on choque les gens fédéralistes qui adorent le Canada. Ça c’est un peu sans surprise, mais on choque aussi les souverainistes “mainstream”, car on célèbre l’unicité des différentes cultures au Québec (par le franglais, nos références, etc.) au détriment de l’aspect ethnolinguistique, qui, à ma grande déception, demeure à ce jour la stratégie principale du PQ.

Je trouve ça naïf de croire que l’unicité du Québec, ou du Bas-Canada, passe par le français, car ça exclut tellement de personnes qui font partie de notre société et qui partagent cette unicité-là. Il y a des anglophones et des immigrants qui ne parlent pas français dans la vie de tous les jours, mais qui sont inclus dans cette vision-là que nous présentons.

Par exemple, y’a deux membres d’Alaclair – KenLo et moi-même – qui ne sont pas des Québécois “pures souches”. Mes parents sont bosniaques, ma langue maternelle n’est pas le français, mais je suis souverainiste, j’ai un attachement à la culture d’ici, à la société d’ici, mais celui-ci n’est pas basé sur un idéal ethnolinguistique.

Notre discours est plus unificateur. Personne n’est pas dans “notre équipe”. On essaie de rejoindre le plus grand dénominateur commun et c’est pourquoi on déplait aux deux extrêmes. Ce qui ne nous intéresse pas de toute façon, alors on ne se gêne pas!”

Marketing 201

“Dans la musique urbaine, une des musiques qui est les plus jeunes et plus dans l’avant-garde par sa chronologie est le rap. C’est ce qui fait qu’elle est moins institutionnalisée que d’autres genres. Pour moi, c’est donc normal que les gens qui en font soient portés à utiliser de nouveaux moyens pour propager leur musique. Je vois beaucoup moins de groupes rock québécois utiliser la stratégie web, de la contribution volontaire ou de l’album gratuit. Ils vont plutôt mettre en vente leur musique dès le premier album.

Nous sommes aussi inspirés par nos artistes préférés des États-Unis ou de l’Angleterre qui font aussi dans ce genre de stratégies. C’est venu nous rejoindre. Nous-mêmes, en tant que consommateurs, on va plus sur le Web et sur les blogues pour découvrir de la musique que chez les disquaires. C’est donc venu naturellement. Surtout qu’Alaclair n’est pas un projet prédéfini d’avance. J’veux dire, quand ça a commencé, c’était une gang de chums qui enregistrait des tounes, pas un groupe qui voulait faire un album. Quand on s’est rendu compte qu’on en avait une quinzaine de pièces, on s’est dit qu’on partagerait le tout sur le Web et c’est tout. La suite a été comme un signe pour nous de continuer dans cette veine-là.

C’est arrivé au cours de l’année que des groupes plus jeunes viennent me demander conseil, même si ma seule expérience est pas mal liée à Alaclair, et je leur ai dit : “Vous commencez et personne ne vous connaît. Ne vendez pas votre musique. Donnez vos chansons sur le Web. Vu que c’est gratuit, les gens vont la prendre et vont même en parler à leur entourage, voire les gosser avec. “T’as pas encore écouté ça? Va le télécharger! C’est gratuit! T’as pas d’excuses!”

Je crois que ça s’applique aux journalistes, blogueurs et chroniqueurs qui tombent sur des projets du genre : offerts gratuitement, pas en magasin, pas endisqué, pas de relationniste en arrière qui monte une grosse affaire autour et indépendants. “Personne n’en parlera. Je dois le mentionner!” J’ai l’impression que comme ils ne sentent pas qu’il y a une industrie derrière, ils s’investissent du devoir d’en parler alors que si tu reçois le nouvel album de tel groupe, tu te dis que si tu n’en parles pas, plusieurs autres vont s’en charger parce qu’ils vont recevoir, eux aussi, un communiqué de presse, l’album et un appel du label. Son article en sera un parmi tant d’autres. Alors que, nous, on contacte directement les gens. J’ai l’impression qu’un rapport de proximité s’établit où il n’y a plus de rapport d’industrie entre les deux et j’ai l’impression que c’est une relation qui intéresse autant les artistes que les journalistes.”

Pour se procurer l’album en ligne : alaclair.com. Pour se le procurer en personne. Pointez-vous au 115 Saint-Joseph Ouest à Montréal ce samedi avant 21h pour en achetez d’Ogden!

Photo : Jean-François Gravel