Beau livre cherche froide journée d'hiver pour flirt littéraire
Errances

Beau livre cherche froide journée d’hiver pour flirt littéraire

Sept livres magnifiques trônent sur un banc, dans mon bureau, armés de photographies, d’entrevues, d’images d’ici et d’ailleurs, de portraits touchants et déchirants.

Assis confortablement dans votre La-Z-Boy favori, vous cherchez quoi feuilleter pour satisfaire votre désir photographique et de beautés naturelles, historiques, voyageuses, artistiques. Voici sept suggestions qui ont traversé l’année 2014 avec brio et qui ne seront définitivement pas reléguées à l’arrière de ma bibliothèque de sitôt.

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40 ans de vues rêvées : L’imaginaire des cinéastes québécoises depuis 1972

Par Anna Lupien, Pascale Navarro, Élodie François et Joëlle Currat, sous la direction de Marquise Lepage. Photographies de Anna Lupien.

(Réalisatrices Équitables et les Éditions Somme Toute, 256 pages)

Le fabuleux parcours des réalisatrices qui ont façonné le paysage cinématographique québécois, depuis les années 1970. Elles sont fortes ou douces, discrètes ou bruyantes, exigeantes envers elles-mêmes, les autres et la société, fidèles à leur style et leurs idées. Sans elles, le cinéma québécois ne serait pas le même, aujourd’hui.

Cet hommage – pas chauvin pour deux sous – nous invite à découvrir les fondatrices et la relève, sans jugement sur la production ou le talent, simplement pour mieux les connaître. De Paule Baillargeon à Mariloup Wolfe, en passant par Louise Archambault, Tara Johns, Anaïs Barbeau-Lavalette, Sophie Deraspe, Hélène Klodawsky, Anne Émond, Elza Kephart, Carole Laure, Anne Claire Poirier, Céline Baril ou Diane Beaudry, on découvre autant les réalisatrices de court, de long, de fiction ou de documentaire, anglophones, francophones, d’ici ou d’ailleurs.

Près d’une soixante d’entre elles ont participé à cette bible – qui demandera sans aucun doute à être bonifiée au fil des décennies, idéalement -, par le biais d’entrevues, d’images, de perles de sagesse, de rêves, d’angoisses, de désirs.

gabrielleroy

Album Gabrielle Roy

Par François Ricard

(Boréal, 152 pages)

Recueil de quelque 160 documents iconographiques, inédits ou déjà publiés, cet album nous plonge dans les lieux et moments de la vie de l’écrivaine Gabrielle Roy, de sa jeunesse à Saint-Boniface, en passant par ses voyages européens, ses années d’enseignement et d’écriture. Recoupés, ces documents permettent de mieux saisir l’univers personnel et littéraire de Gabrielle Roy, aussi mystérieuse que talentueuse.

Ce guide historique se dévore aisément, pour peu que le 20e siècle vous fascine et la vie de Gabrielle Roy aussi, en images et en textes, marquant ses différentes découvertes et publications.

egregore

Égrégore : Une histoire du mouvement automatiste de Montréal

Par Ray Ellenwood (Traduction de Jean Antonin Billard)

(Les éditions du passage et Kétoupa Édition, 342 pages)

Fantastique objet d’appréciation du mouvement automatiste, cet Égrégore de 2014 parfait la version originalement publiée en anglais, en 1993. Bonifiée par les suites du mouvement des années 1990 à aujourd’hui et traduite en français, cette publication offre un portrait juste et riche du mouvement automatiste qui a marqué le milieu de l’art québécois et qui a eu ses répercussions jusqu’en Europe. Des débuts du mouvement, avec Paul-Émile Borduas, Fernand Leduc, Marcel Barbeau et Claude Gauvreau, en passant par son expansion dans le Quartier Latin dans les années 1940, avec Pierre Gauvreau, Françoise Sullivan, Jean-Paul Riopelle et les premiers mentionnés, le mouvement automatiste dans toute sa fraîcheur explosive est décortiqué et dépecé jusqu’à la moelle.

En remontant autant aux publications dans les journaux des Tancrède Marsil et autres contemporains du mouvement, Ellenwood effectue un travail minutieux, agrémenté de photos, images, oeuvres, lettres, et autres documents historiques. Commenté avec tout le sérieux du professeur émérite de l’Université York, cet Égrégore se penche aussi sur la création des troupes et groupes qui ont constitué le mouvement, rappelant les grandes contributions de Marcelle Ferron, Louise Renaud, Nicole Renaud, Muriel Guilbault, Françoise Riopelle, Thérèse Renaud, Madeleine Arbour, Maurice Perron, Bruno Cormier, Jean-Paul Mousseau, Jeanne Renaud et de nombreux autres.

Évidemment, Ellenwood met la table à la parution du Manifeste du Refus global, passage obligé en 1948, qui a figé le mouvement automatiste dans le temps et mis à mal l’unicité d’un groupe. L’auteur se penche aussi sur un certain nombre de questions théoriques, permettant de mieux comprendre le mouvement automatiste en matière de peinture, poésie et performance.

Un chapitre s’ajoute maintenant à la version de 1993, histoire de faire un bilan de l’apport des automatistes, tout en remettant à l’ordre du jour les motivations du mouvement, alors que le 50e et 60e anniversaire du Refus global ont été soulignés en 1998 et 2008. La mémoire est riche et l’héritage aussi, c’est ce qu’en conclut l’Égrégore d’Ellenwood. Cette publication, essentielle pour tout amateur d’art et d’histoire, se termine sur un genre de «que sont-ils devenus?», rappelant que les signataires du Refus global, de même que ceux qui appartenaient au mouvement automatiste de Montréal, on créé une vague déferlante influençant l’art créé ici même, jusqu’à aujourd’hui.

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La Gaspésie : Au bord de l’infini

Par Linda Rutenberg

(Del Busso éditeur, 120 pages)

Balayée par les vents, tranquille et figée dans le temps l’hiver, la Gaspésie se repose, s’isole, au cours de la longue saison froide. La photographe Line Rutenberg a réussi, au cours de sept voyages dans la région, à capturer l’essence même de la nature fulgurante et fracassante de l’hiver en Gaspésie.

Images magnifiées par les intempéries et l’abandon, ces photographies exposent les beautés de l’hiver de la péninsule gaspésienne que bien peu connaissent l’hiver.

De Chandler à Sainte-Anne-des-Monts, de Hope à Paspébiac, en passant par Matane et Port-Daniel, Marsoui, Shigawake, Grosses-Roches, Gaspé et Les Méchins, Rutenberg explore une région méconnue qui offre pourtant de fantastique paysages nordiques.

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La maison, la ville et les gens : Le phénomène bidonville

Par Jean-Nicolas Orhon et Nicolas Reeves

(Les éditions du passage, 296 pages)

Après le documentaire Bidonville : Architectures de la ville future, Jean-Nicolas Orhon poursuit sa collaboration avec Nicolas Reeves et a publié cette année La maison, la ville et les gens : Le phénomène bidonville, où de la même manière, ils promènent leur regard et leurs réflexions dans les villes visitées pour le tournage. Ce sont pas moins de onze villes qui ont marqué leur route, permettant à Orhon et son acolyte Reeves de se familiariser avec la cohabitation des uns et des autres.

Partis à la rencontre des familles, résidents, enfants, adultes, adolescents, travailleurs et autres êtres façonnant les bidonvilles, ils ont généré ce livre où leurs réflexions sont nourries par ces rencontres. Par la bande, Orhon et Reeves soulèvent de nombreuses questions sur l’habitat, sur l’identité territoriale, sur la cohabitation et les liens sociaux qui sont tissés dans les bidonvilles et entre ces derniers et l’extérieur.

Du Sénégal au Maroc, en passant par l’Abitibi et la France, la Turquie, l’Inde, les États-Unis, le Brésil et le Kenya, les mots d’Ohron et de Reeves sont posés sur de magnifiques photographies qui elles, viennent saisir les beautés et le quotidien de ces lieux. Aux photographies réalisées par Orhon et Reeves, s’ajoutent quelques prises de Sarah-Dalhie Goyer, Christine Lebel et Jean Pottier. Un excellent complément au documentaire.

nunavut

Nunavut

Par Mario Faubert

(Éditions Sylvain Harvey, 160 pages)

Après Nunavik, paru en 2010, le photographe et aviateur Mario Faubert renoue avec le nord et offre Nunavut, une collection de plus de cent photographies prises dans le Grand Nord qui montrent à quel point cette région est riche, vaste et encore vierge de la dévastation humaine et technologique.

Trilingue (français, anglais et inuktitut), le livre Nunavut offre de belles prises, rappelant que Mario Faubert a travaillé longtemps en compagnie de l’équipe de Yann Arthus Bertrand sur La terre vue du ciel. Des couleurs pures martèlent les photographies de Faubert; des paysages à couper le souffle nous préparent à la pureté de ces territoires d’eau et de glace.

Suivant une trajectoire en boucle le photographe et aviateur s’est déplacé tout d’abord en longeant la côte ouest de la Baie d’Hudson, puis frôlant l’île de Southampton, puis poursuivant son vol le long du passage du nord-ouest, survolant l’île du Prince Charles, pour ensuite partir à la conquête des paysages de l’Île de Baffin, la plus grande au Canada, découvrant ainsi villages, terres, fjords, eaux, terres et montagnes aux formes, fonds et contenus insoupçonnés, et surtout, à protéger à tout prix.

Imitant parfois la trajectoire des oies blanches, parfois celle des glaces, souvent celle de l’instinct, Mario Faubert et son équipe nous convoquent à l’expérience visuelle du nord, à mieux saisir notre vraie nordicité. En parcourant plus de 10 000 kilomètres à bord de son avion en une semaine, Faubert nous permet, au travers sa lentille, d’admirer une région qui nous est pratiquement inconnue, alors qu’elle fait l’envie de plusieurs et qu’elle est constamment menacée par l’homme et sa cupidité.

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St-Tite : Une histoire tirée par les chevaux

Par Émilie Villeneuve (texte) et Olivier Blouin (photographies)

(Éditions Cardinal, 256 pages)

La plongée dans l’histoire de Saint-Tite se fait naturellement avec cette nouvelle publication d’Émilie Villeneuve et Olivier Blouin qui avaient signé Moutarde Chou – Histoires, recettes et secrets des meilleurs casse-croûtes du Québec, en 2012.

St-Tite : Une histoire tirée par les chevaux est non seulement un rappel historique des origines de la ville et de ses habitants, mais aussi un hommage au Festival western qui anime St-Tite depuis 1968. On y retrouve des portraits des artisans du festival, des habitants de la ville qui mettent la main à la pâte depuis près de 50 ans pour faire de ce festival le lieu de recueillement annuel de près de 600 000 visiteurs, ainsi que des histoires contées et racontées sur la ville, le festival – qui a son lot de belles anecdotes, thématiques et cachoteries – et, bien sûr, les chevaux qui ont fait de ce bourg mauricien, l’un des lieux mythiques de la culture western.

Villeneuve et Blouin ont les mots et les images pour faire de ce titre l’un des plus intrigants de l’année 2014, qui capte dès l’ouverture et qu’on ne peut lâcher sans peine.