Wonder Boys : Étude secondaire
Cinéma

Wonder Boys : Étude secondaire

Le réalisateur de L.A. Confidential, Curtis Hanson, signe Wonder Boys, un film qui emprunte à la fois aux sitcoms américaines et au cinéma  indépendant.

Le fait que Wonder Boys, le nouveau film de Curtis Hanson (The Hand That Rocks The Cradle, L.A. Confidential), soit acclamé par la critique américaine comme une oeuvre originale, audacieuse et mûre, en dit moins sur les qualités intrinsèques de ce film très inégal, que sur nos attentes réduites face à un cinéma qui nous a habitués à ses formules et à son infantilisme…

En effet, Wonder Boys séduit d’abord, et surtout, par tout ce qu’il n’est pas; c’est-à-dire un film prévisible, adolescent ou facile à résumer. On est même agréablement surpris (pendant une bonne demi-heure au moins…) par l’esprit de ce film relativement adulte (situé dans un milieu universitaire en plus!), où Michael Douglas joue un homme de son âge, qui (pour une fois) ne traque pas, ou n’est pas traqué, par une femme. Ajoutez le climat étouffant d’une banlieue de Pittsburg, où il pleut et neige constamment; des références à Mailer, Genet et Capote; et la présence toujours détonnante d’acteurs comme Frances McDormand (la policière de Fargo) et Robert Downey Jr.; et vous avez une grosse production atypique, qui ressemble beaucoup à la version hollywoodienne d’un petit film indépendant. Bref, l’anti-Basic Instinct.

Est-ce à dire que Wonder Boys est une réussite pour autant? Pas vraiment. De fait, on ne croit jamais à l’histoire de ce professeur et écrivain en manque d’inspiration (Michael Douglas), qui apprend le même jour que sa femme l’abandonne, que sa maîtresse (Frances McDormand) est enceinte, et que son éditeur (Robert Downey Jr.) vient chercher un manuscrit non terminé. Et on n’y croit d’autant moins que le brave professeur se met à héberger et conseiller un jeune étudiant complètement mythomane (Tobey Maguire), qui semble cacher, sous ses mensonges délirants, un talent de romancier remarquable…

Pourquoi n’y croit-on jamais? Simplement parce que cette comédie dramatique (adaptée d’un roman de Michael Chabon) sent trop la sitcom et le sous-Garp avec ses ingrédients à l’excentricité recherchée: un chien aveugle (puis mort) qu’on trimballe bizarrement d’une scène à l’autre; le vol d’un manteau mythique ayant appartenu à Marilyn Monroe (!); un éditeur dont le coeur balance entre un ado vierge et un travelo géant; et un sosie de Little Richard qui passe le quart du film à traquer une bagnole déglinguée.

Ce qui s’annonçait comme une comédie adulte et intelligente se transforme donc progressivement en une farce sophistiquée mais invraisemblable, dont l’excentricité affectée et les aspérités parfois réjouissantes sont torpillées dans le dernier virage par un happy end on ne peut plus hollywoodien. Restent l’interprétation étonnamment mûre de Michael Douglas, la photo séduisante de Dante Spinotti, et une bande sonore nostalgique, qui comprend le premier enregistrement de Bob Dylan (Things Have Changed) depuis trois ans. Reste surtout le souvenir d’un film hollywoodien, qui émeut par son désir d’échapper à des règles auxquelles il finit ironiquement (et malheureusement) par se soumettre.

Voir calendrier
Cinéma exclusivités