The Claim : Le bon filon?
Cinéma

The Claim : Le bon filon?

À la Conquête de l’Ouest succède, en 1850, la ruée vers l’or. Certains en sortent glorieux. Les autres, survivent à  peine.

Vient toujours un moment où un cinéaste anglais s’intéresse à l’Amérique. Fasciné par le success story, le Britannique se demande souvent comment cette excroissance de son peuple en est venue à dominer le monde. Et la réponse que semble y donner Michael Winterbottom (Wonderland) est l’ambition. Pour l’illustrer, il transpose la nouvelle de Thomas Hardy dans l’aride et montagneuse Sierra Nevada en Californie. À la Conquête de l’Ouest succède, en 1850, la ruée vers l’or. Certains en sortent glorieux. Les autres, survivent à peine.

Dans ce décor instable, se tisse une histoire digne d’une légende: The Claim. Dillon (Peter Mullan) règne en dieu et maître sur une bourgade balbutiante nommée Kingdom Come, où l’on découvre un hôtel, un bordel, un saloon et une chanteuse (Milla Jovovich, pour une fois désarmante tant son jeu sonne juste, et est étrange sa beauté blafarde). Il domine et fait la loi car sa richesse justifie sa puissance. Débarquent alors par le dernier convoi, trois personnages qui, chacun à sa manière, contribueront à décapiter son pouvoir. D’abord Dalglish (Wes Bentley, American Beauty), ingénieur en chemins de fer qui d’un simple décret balaiera le potentiel économique de la ville en faisant passer le tracé du train un peu plus loin. Et puis Elena la tuberculeuse (Nastassja Kinski) et sa fille Hope (Sarah Polley), qui se révéleront être l’épouse et l’enfant que Dillon a vendues 20 ans plus tôt pour quelques pépites d’or.

Devant ce retournement du destin, Dillon tente de se racheter en vain. Le constat est cinglant: son arrivisme a eu raison de son humanisme. Ni le repentir ni la rédemption ne répareront sa faute. Avec cette résonance biblique, Winterbottom tend un miroir sombre à l’Amérique. Dans ce qui fait étrangement penser à un western sans jamais pousser vraiment le genre, il propose un récit inconfortable qu’il plante dans un décor glacial et hostile (la nature n’est que tempêtes et blizzards). À cela s’ajoutent une image quasi monochrome et une technique audacieuse qui s’appliquent à fuir l’imagerie habituelle du film d’époque. Il multiplie alors les prises à l’épaule, amorce souvent ses scènes sur un flou, et s’attarde sur les visages blêmes et cernés des pionniers. Il en résulte un univers glauque qui, somme toute, sert efficacement le discours proposé sur la vanité des hommes. Austère mais nécessaire.

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