La Forteresse suspendue : La guéguerre
Cinéma

La Forteresse suspendue : La guéguerre

"La guerre expliquée aux enfants", manuel de savoir-vivre fait par des adultes, à l’intention des enfants rois et de leurs parents conscientisés pour leur rappeler que la guerre n’est pas une bonne chose: La forteresse suspendue, film de Roger Cantin (réalisateur des Matusalem, et scénariste de La Guerre des tuques), et dernière production des Contes pour tous de Rock Demers, est aussi sérieux que ça.

"La guerre expliquée aux enfants", manuel de savoir-vivre fait par des adultes, à l’intention des enfants rois et de leurs parents conscientisés pour leur rappeler que la guerre n’est pas une bonne chose: La forteresse suspendue, film de Roger Cantin (réalisateur des Matusalem, et scénariste de La Guerre des tuques), et dernière production des Contes pour tous de Rock Demers, est aussi sérieux que ça. Comme si le film avait été conçu par des diététiciens zélés (au goût, c’est pas terrible, mais c’est bon pour la santé) ou, pire, par des amorphes du ministère de l’Éducation. Inattaquable.

Autour du lac Noir, il semblerait que chaque été les enfants se livrent bataille: les riches du camping nord déguisés en conquistadors attaquent les pauvres du camping sud, déguisés en Indiens. Mais un flirt entre le chef du clan des Indiens et la soeur du chef des conquistadors sème la pagaille. Dans cette fantasmagorie sur la guerre, la problématique Nord-Sud, Roméo et Juliette, l’histoire des Amériques et l’écologie viennent soutenir l’idée que la paix est plus difficile à obtenir que la guerre. Bref, La Forteresse suspendue, c’est La Guerre des boutons passée à l’eau de javel du politiquement correct. On nettoie: l’autorité parentale a pris le large, reste la bêtise. Exit l’alcool, exit les traîtres. On ne parle plus de zizi quand on prend un prisonnier, mais on embrasse les filles (qui ne sont plus là pour recoudre les boutons, on le sait). La guerre n’est plus sauvage (on se bat avec de la boue et des ballons de farine), mais elle génère plus de règles; on a des meetings et des Casques bleus (un Noir et une Asiatique). Et, quelles que soient les circonstances, il faut faire attention à la nature et aux bêtes, d’où la présence de Georges Brossard, fondateur de l’Insectarium de Montréal… Si l’on soutient que les enfants de 10-11 ans sont tout à fait capables de comprendre des messages complexes, qu’ils ne sont plus des êtres réprimés par leurs parents, qu’ils sont les spectateurs de violences virtuelles au quotidien, qu’ils sont en mesure d’aimer à la fois les James Bond, les Stars Wars, les Taxi 1 et 2, Tigre et Dragon, Laurel et Hardy, les films de Chaplin, sans parler du Nin’: comment vont-ils percevoir un film aussi manichéen, propre et poli? Bravo pour le retour aux conquêtes hispano-portugaises, pour la superbe cabane et les costumes inventifs; ça peut changer le climat d’une ruelle. Mais la mise en scène est si scolaire, tout est si béatement expliqué (une envolée de papillons ne suffit pas, il faut souligner que la poésie est importante!!), si nettoyé de peur, de méchanceté et d’ironie, que les dialogues s’en ressentent et que les acteurs faiblissent. Même avec du Boris Vian à la clé, une bonne conscience ennuyeuse, ça emmerde toujours les gens…

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