Hedwig and the Angry Inch : Néo bon moment
Cinéma

Hedwig and the Angry Inch : Néo bon moment

Néo: préfixe venant du grec neos, nouveau. Film néo-musical, néo-pop, néo-rock, néo-glam, néo-punk, mettant en vedette un personnage néo-féminin, doté d’un néo-pénis, Hedwig and the Angry Inch n’invente peut-être pas un nouveau genre – le film fourre-tout -, mais il le pousse encore plus loin.

Néo: préfixe venant du grec neos, nouveau. Film néo-musical, néo-pop, néo-rock, néo-glam, néo-punk, mettant en vedette un personnage néo-féminin, doté d’un néo-pénis, Hedwig and the Angry Inch n’invente peut-être pas un nouveau genre – le film fourre-tout -, mais il le pousse encore plus loin. Écrit, réalisé, et interprété par John Cameron Mitchell, cet ovni qui, du Festival de Berlin à celui de Sundance, a collectionné les prix les plus divers (mise en scène, prix du public), évoque des dizaines de films (Velvet Goldmine, The Rocky Horror Picture Show, This Is Spinal Tap, Tommy, Paris Is Burning, etc.), sans ressembler à rien de connu, sinon à un croisement démentiel entre Ken Russell, Fassbinder et Gus Van Sant.

Né dans une Allemagne saignée par le Mur de la honte, violé par son père, et élevé la tête dans le four, le jeune Hansen débarque dans le Midwest, avec un G.I. noir pour mari (Maurice Dean Wint), et un pouce de chair entre les jambes, relique d’une opération de changement de sexe qui a mal tourné. La reine de la maison mobile est très vite plaquée par son prince charmant, et soigne son spleen en écrivant des chansons mythologico-désespérées. Hansen est mort, vive Hedwig, chanteuse drag enragée, entre l’Iggy Pop des Stooges, la Bette Midler de The Rose, et la Mado Lamotte du Lézard, phénomène "mondialement inconnu", qui fait la tournée des clubs minables du pays, accompagnée de son "chum" (Miriam Shor), rêvant de devenir drag-queen, à la poursuite de son amant (Michael Pitt), un adolescent devenu rock star en piratant les chansons d’Hedwig. Vous suivez?

Racontée comme ça, l’histoire a l’air presque simple, mais, en fait, elle se déroule en zigzags et en culs-de-sac, en flashs et en flash-back, en hallucinations contrôlées et en dessins d’animation, en monologues et en chansons. Ça part de tous bords, tous côtés: de la fleur bleue au Grand-Guignol, du mélodrame au stand-up comic, de la mythologie grecque au pamphlet social, de la comédie musicale au reality show. Succès-culte des scènes d’off-Broadway, Hedwig and the Angry Inch est une de ces rares adaptations à l’écran qui explorent à fond (c’est peu de le dire) le médium cinéma. Il bénéficie également du sceau de qualité Christine Vachon, productrice qui, avec Poison, Safe, I Shot Andy Warhol, Go Fish, Kids, Boys Don’t Cry, Velvet Goldmine et Happiness, est la reine du cinéma indépendant américain. Spécialiste des projets "difficiles", elle a, de nouveau, mis au jour un talent hors du commun.

En effet, la maîtrise de Mitchell, cinéaste néophyte, est assez sidérante, car, de ce capharnaüm, se dégagent un ton, un style, une vision tributaires autant du mélodrame hollywoodien que de la culture drag. Le plus curieux, c’est que une fois dépassées les outrances, Hedwig… s’avère un film assez classique, sur la recherche de l’amour et le besoin de reconnaissance. Si le message un peu lourd n’est cependant pas trop indigeste, c’est, en grande partie, dû à l’abattage de John Cameron Mitchell, stupéfiant dans ce rôle écrasant, qu’il a créé sur les planches.

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