Le Tunnel : Issue sûre
Cinéma

Le Tunnel : Issue sûre

Une histoire n’a pas besoin d’être vraie pour être bonne, mais quand elle est aussi exemplaire que celle du Tunnel, sa véracité même renforce son impact. Dans ce cas-ci, il est surprenant que le cinéma ne se soit pas emparé plus tôt de cette odyssée, taillée sur mesure pour le grand  public.

Une histoire n’a pas besoin d’être vraie pour être bonne, mais quand elle est aussi exemplaire que celle du Tunnel, sa véracité même renforce son impact. Dans ce cas-ci, il est surprenant que le cinéma ne se soit pas emparé plus tôt de cette odyssée, taillée sur mesure pour le grand public.

En 1961, alors que le mur de Berlin est en train d’être érigé, un groupe d’hommes et de femmes d’Allemagne de l’Est, passés à l’Ouest, creusent un tunnel de 145 mètres de long, afin de permettre à leurs proches de les rejoindre dans le "monde libre". Après neuf mois d’acharnement, beaucoup de rebondissements, quelques sacrifices humains et un contrat de 15 000 $ avec NBC, garantissant l’exclusivité des images de la construction du tunnel (!), l’entreprise mènera à l’évasion de 32 personnes. Comme prévu, tout est bien qui finit bien.

Ne soyons pas cyniques: bien qu’on en connaisse l’issue, Le Tunnel est un suspense à couper le souffle, qui a l’efficacité musclée du cinéma américain. Par nature, creuser un tunnel est une tâche fastidieuse et répétitive. Roland Suso Richter et Johannes W. Betz, respectivement réalisateur et scénariste, ont donc découpé leurs 2 h 40 en scènes courtes et punchées, nappées d’une musique omniprésente. L’emballage est solide – images en clair-obscur et montage sans temps morts -, et les interprètes, tous convaincants, à commencer par Heino Ferch, avec sa dégaine de Bruce Willis, dans le rôle du meneur, et Nicolette Krebitz, avec ses airs de Wynona Ryder, dans la peau d’une amoureuse têtue.

L’histoire est exemplaire par son caractère humain – leçon de courage, de solidarité, et de persévérance, qu’on a déjà vue des dizaines de fois -, mais aussi par la place qu’elle occupe dans l’imaginaire occidental. Les David contre Goliath, les Monsieur-Tout-le-monde qui défient le système, les anonymes à l’étoffe de héros, il y en a eu, il y en a, et il y en aura encore, dans les Balkans, au Guatemala, au Rwanda, au Tibet, au Cambodge, en Afghanistan, en Afrique du Sud ou en Algérie. Mais, vu d’ici, de cette partie du globe où Occident rime avec centre du monde, le mur de Berlin fut la dernière grande blessure à heurter de près nos sensibilités douillettes de citoyens nourris de droits de l’homme (suivis de près par le droit au commerce…). D’où le choc. Ça n’enlève rien à la force de l’impact du film de Richter, mais ça le replace dans son contexte de cinéma-spectacle. On peut lui prédire, d’ores et déjà, une nomination pour l’Oscar du meilleur film étranger…

Par contre, là où le film devient troublant, à son corps défendant, c’est dans la peinture très réaliste qu’il fait du mur de Berlin, symbole concret, et, à l’échelle humaine, du Bien et du Mal qui se côtoient et se toisent, incarnation meurtrière d’un jeu d’enfants, joué par des fous du pouvoir. Plus que par l’exaltation un peu convenue des qualités humaines de ses héros, et héroïnes, c’est par cette vision naturaliste du "mur de la honte" que Le Tunnel rejoint l’universel. Il reste tant de murs à abattre…

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Cinéma exclusivités
En salle dès le 1er septembre au Quartier latin