Moonrise Kingdom : Un amour de scout
Cinéma

Moonrise Kingdom : Un amour de scout

Film d’ouverture à Cannes le mois dernier, le léger et coloré Moonrise Kingdom, de Wes Anderson, aligne un alléchant casting.

Sixième film de Wes Anderson mettant en vedette Bill Murray, Moonrise Kingdom permet à Bruce Willis de faire une entrée remarquée dans l’univers coloré du réalisateur de Rushmore. Se joignent notamment à eux Edward Norton, Frances McDormand, Tilda Swinton et Bob Balaban, impayable en narrateur aux allures d’un nain de jardin ou du père Noël en vacances.

"Avec Wes, l’aventure est toujours plus agréable, a lancé Bill Murray devant la presse internationale, chaque fois, c’est de mieux en mieux. Travailler avec le même réalisateur à quelques reprises, c’est à la fois un plaisir et un honneur parce que ça ne fonctionne pas toujours. Parfois, tu rêves qu’il te rappelle, d’autres fois, non. Des fois, ça se termine tellement mal que le réalisateur te reconduit lui-même à l’aéroport."

"C’était très rafraîchissant d’être dirigé par Wes, a avoué Bruce Willis, alors qu’il y a tant de films où l’on ne répète pas, où les gens ne se parlent pas." "Quand j’étais jeune, a renchéri Edward Norton, je lisais sur la troupe d’Orson Welles et je rêvais de faire partie d’une telle troupe. Wes en a créé une au fil des années. Sur le plateau, on se sentait en colonie de vacances. C’était une expérience tout à fait délicieuse, un retour en enfance d’une certaine façon."

Visuellement époustouflant, Moonrise Kingdom éblouit dès que l’on entre chez la famille Bishop et que la caméra nous dévoile une à une les pièces de cette grande maison de poupée avec de fluides mouvements panoramiques. "Robert D. Yeoman est le seul directeur photo avec qui j’ai travaillé, a confié Wes Anderson. Nous sommes si proches que je ne m’imagine pas travailler sans lui."

D’un aspect vintage coquet et pimpant, Moonrise Kingdom se déroule sur une île de la Nouvelle-Angleterre à l’été 1965. C’est dans cette contrée bucolique que vont s’éprendre deux ados de 12 ans, Suzy (Kara Hayward), fille de M. et Mme Bishop (Murray et McDormand), et Sam (Jared Gilman), scout orphelin, qui décideront de fuir ensemble. Le chef scout (Norton) et le chef de police (Willis) se lanceront à leur poursuite, pendant que la travailleuse sociale (Swinton) tentera de trouver un foyer d’accueil à Sam.

"On retrouve dans ce film les souvenirs que j’aurais aimé avoir, a avancé Anderson, grand gamin androgyne en veston-cravate. Même s’il y a un peu de moi dans chacun des personnages, celui auquel je m’identifie le plus, c’est Suzy. Comme elle, j’ai trouvé un jour un dépliant sur les enfants avec des troubles de comportement et j’ai très bien compris qu’il s’agissait de moi."

Derrière les airs candides et nostalgiques du film, se cache en filigrane la perte d’innocence de l’Amérique, illustrée ici par la tempête menaçant de dévaster la tranquille petite île: "Bien qu’il soit du côté des enfants, conclut Edward Norton, je ne crois pas que mon personnage ferait une bonne famille d’accueil. On présume que dans moins d’un an, il ira se battre au Vietnam."

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Moonrise Kingdom

Avec ses personnages semblant sortir tout droit d’une bande dessinée, interprétés de façon parfaitement décalée par l’ensemble des acteurs, Moonrise Kingdom s’inscrit parfaitement dans la filmographie de Wes Anderson. En fait, on croirait par moments une version moins grinçante des Royal Tenenbaums qui auraient quitté la ville pour aller en camping. Malgré ses qualités indéniables, le tout ne lève pas. Certes, les personnages secondaires sont tous attachants et amusants, mais on ne peut en dire autant des deux ados en cavale. Si leur histoire d’amour est parsemée d’embûches cocasses et de tendres moments embarrassants, le récit piétine assez tôt et l’intérêt pour celui-ci s’étiole sérieusement. On demeurera toutefois captivé par la plastique des plans, l’utilisation ludique du split screen et la joliesse de l’ensemble.