Biz : La chute de Sparte
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Biz : La chute de Sparte

Allumé, cultivé, lettré; Steeve, secondaire V, traverse une adolescence interminable avec l’intransigeance du lecteur vorace qui a trop fréquenté les grands penseurs pour ne pas dédaigner son quotidien moche couleur gris banlieue. Ce deuxième titre de Biz, son premier s’adressant aux jeunes, se lit de prime abord comme un appel d’air salutaire. Aux usuelles représentations chagrines de l’ado en larve fainéante, le Loco Locass oppose un jeune homme brillant qui voit venir à lui les problèmes que posent le désir, le marché du travail et le rapport à la différence avec une fébrilité propre à son âge, bien qu’en se montrant enclin à une rare introspection. Enchantement gâché quand Biz prend en otage la voix de son narrateur et lui met en bouche une flopée de poncifs sur l’incurie médiatique, les publicitaires retors, le multiculturalisme à la canadienne, l’anglicisation de Montréal, etc. Comment le lectorat adolescent, notoirement irrité par les sermons, réagira-t-il quand l’auteur, mal dissimulé derrière Steeve, lui dira platement, en bon prêcheur de gauche, qu’"il n’y a pas pire esclave que celui qui se croit libre"? Parions qu’il soupirera aussi fort que nous. Carbones des harangues dont Biz se fend régulièrement en entrevue, ces ruptures didactiques dessinent de malheureuses saillies au coeur de chapitres autrement justes et amusants, truffés d’images fortes sur l’amitié, le deuil ou la musique. Exemple: "Comme une coulée de titane en fusion, la voix métallique d’Eminem emplit tout mon crâne." Éd. Leméac, 2011, 168 p.