Musique

Ten Foot Pole : Moyen âge

NOFX, Pennywise, Lagwagon, No Use For a Name, les trois quarts de l’affiche du Vans Warped Tour_ Depuis quelques années, Montréal voit passer un nombre incalculable de groupes néo-punk, pour la plupart originaires de Californie. En fait, ils sont tellement nombreux à partager les mêmes accords rudimentaires qu’on en vient à les confondre; et le journaliste se demande parfois s’il n’a pas fait le tour de la question. Ces quelques réserves mises à part, on ne peut s’empêcher d’admirer un groupe comme Ten Foot Pole, dont la tournée canadienne comprend des arrêts à Sudbury, à Rouyn et à Trois-Rivières; et c’est pourquoi on ne manque pas de leur dire un petit bonjour lorsque l’occasion se présente.
Joint sur la route quelque part entre Edmonton et Calgary, Dennis Jagard, le chanteur de la formation, confirme que le Québec est maintenant un arrêt obligé pour tout groupe punk qui se respecte. En fait, les gars de Ten Foot Pole y croient tellement qu’ils traînent avec eux le jeune groupe montréalais Reset d’un océan à l’autre. «On a réussi à tisser à travers le monde un réseau de villes où l’on peut attirer au moins trois cents personnes, et il faut l’entretenir, explique Dennis, interrogé sur ses pratiques de tournée. À chaque nouveau disque, on essaie d’étendre un peu plus nos horizons; on a déjà touché au Japon, à l’Australie et à l’Europe, mais il nous reste encore à traverser l’Amérique du Sud. C’est toujours excitant de se pointer dans de nouveaux endroits, mais je t’avoue que j’ai assez hâte de rentrer à la maison pour respirer un peu.»

Il faut dire que depuis la parution de leur album Insider, en janvier dernier, les gars de Ten Foot Pole tournent comme des malades, une façon comme une autre de garder la forme, car même les punks les plus enragés ne peuvent arrêter l’inexorable marche du temps. On ne peut s’empêcher de faire remarquer à Dennis que sur le dernier album, la pièce Nothing To Lose, semble témoigner d’une certaine angoisse face à ce sujet. Dans cette chanson, le narrateur relate une descente en snowboard (on a l’inspiration qu’on peut_) dans laquelle il se trouve soudain confronté à ses propres peurs, pendant que de jeunes kamikazes le dépassent en se moquant. «Ça n’a rien à voir avec l’angoisse de l’âge, objecte Dennis.

Nothing To Lose parle plutôt d’acquérir une certaine sagesse, d’être moins tête brûlée, ce que bien des jeunes gens arrivent à faire très tôt, alors que certains adultes n’y arrivent pas.» Les punks font l’apologie du conservatisme, maintenant? Mais où s’en va-t-on?

Pendant qu’on est sur le terrain de l’âge, on en vient à se demander s’il fait bon vieillir au sein d’un groupe punk, lorsqu’on sait que l’auditeur moyen a environ quatorze ans. Dennis se sent-il encore près de son public? «Lorsque j’écris, je ne pense jamais en fonction d’un public en particulier, je parle de ce qui me touche, et je respecte l’intelligence des gens qui achètent mes disques. Si tu te mets à faire des choses sur mesure pour un certain public, c’est invariablement merdique. Regarde ce que George Lucas a fait avec Star Wars: en voulant toucher les kids de quatre ans, il a réalisé un navet, et s’est mis à dos le public adulte.» Rassurez-vous: ce n’est pas demain la veille que Dennis va se déguiser en Jar Jar Binks…

Le 20 juin
Au Medley
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