Tad Robinson : Bleu et blanc
Musique

Tad Robinson : Bleu et blanc

La plus belle perle de la programmation blues de cet automne au Café Campus est certainement (avec la venue de Corey Harris le 1er décembre) Tad Robinson. Oui, bien sûr, Laurier Gagnon, le nouveau programmateur blues de la coopérative, vous parlera de ses préférés, l’harmoniciste Paul Oscher (le 10 novembre) ou alors, et on est d’accord avec lui, le guitariste de Detroit Johnny Basset (le 20 octobre). Mais ce Robinson, que je ne connaissais pas, m’a plu tout de suite.

Suffit d’insérer son disque Last Go Round dans le lecteur et tout s’explique. Première constatation, de mémoire blues, à part Musselwhite en 69, aucun Blanc n’avait signé avec le très intègre label Delmark (Jimmy Dawkins, Otis Rush, etc.), la deuxième plus importante compagnie de disques de Chicago, après Chess. Lorsque Alligator, l’étiquette commerciale, fut fondée en 73 dans le sous-sol de Bruce Iglauer (en passant, Katie Webster est décédée, il y a quelques jours, à l’âge de soixante-trois ans), Delmark était déjà un label adulte. Que Robinson ait réussi à pénétrer dans le cercle est en soi révélateur. Mais c’est tellement sa place. Robinson chante comme un Noir, transpire l’influence des deux Otis (Clay et Redding), ses modèles. Sweet Soul Music, chantait Arthur Conley. Et c’est ce que représente Robinson. Un des rares musiciens blancs à saisir vraiment le soul. À preuve, sa version exaltante de More and More.

Deuxième constat: la participation du guitariste Alex Schultz (Hank Ballard and the Midnighters, Rod Piazza). Ce Schultz, que vous verrez à Montréal, sait exactement quand une chanson a besoin d’un lifting rythmique, tout comme il se fait délicat et discret lorsque l’attention n’est pas sur lui. Un second qui fait plutôt premier de classe. Mais Robinson n’est pas qu’un soulman: le blues, l’harmonica, la diversité du répertoire, tout est bien dosé.

Ceci étant dit, je l’ai joint chez lui: «Lorsque vous jouez presque tous les soirs, vous sentez le besoin de raconter une histoire à votre public. Et vous voulez jouer à plusieurs endroits, avoir différentes influences. Le monde aime la diversité. Tu peux envoyer quelques shuffles à l’harmonica, puis te virer de bord, jouer des chansons aux refrains mélodieux, et en profiter pour raconter une histoire. Les femmes adorent ça. Alors tout le monde dans la salle se dit: "Hé! Ce gars-là peut faire autre chose que des shuffles." Cela crée un effet de surprise, de récompense. C’est ce que j’appelle mes nice pretty songs.»

«Tu sais, il y a des gens qui disent que les Blancs ne peuvent jouer convenablement le blues. Alors pourquoi Muddy Waters a-t-il engagé Jerry Portnoy et Bob Margolin? Mais la vraie question, plus pointue est: est-ce que les Blancs peuvent CHANTER du blues? Il est prouvé qu’ils (les Blancs) peuvent en jouer, mais le grand jury n’a pas encore délibéré sur le fait d’en chanter! C’est, selon moi, un vrai débat. Quand tu essaies d’imiter, tu fais fausse route. Moi j’interprète à MA façon. Tu sais, j’ai souffert moi aussi. J’essaie simplement d’être vrai dans ce que je chante et d’émouvoir ceux qui m’écoutent. Il est là mon message, c’est tout ce que j’ai à offrir.»

Le 29 septembre
Au Café Campus
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