Musique

Live à Montréal : Mr Bungle

Le 3 novembre au Métropolis
Nul besoin de préciser que la commande était grande en ce qui concerne la première visite de Mr Bungle à Montréal. Serait-il capable de reproduire son plus récent compact, California, sur scène? Pire encore, allait-il se casser la gueule sur Mr Bungle (1991) ou Disco Volante (1995), qui sont loin d’être aussi homogènes et accessibles que le petit dernier? Eh bien, Pas du tout! Pas une seule fausse note d’un bout à l’autre de leur performance divisée en deux parties de 45 minutes (plus un rappel de 15 minutes, bruyamment exigé par la foule), question de nous laisser revenir de l’ébahissement causé par la qualité de leur prestation… magistrale!

Car le défi n’était pas tellement de rendre leurs albums le plus fidèlement possible; c’était surtout de le faire en évitant d’être trop statique et plat. Et en effet, le plaisir du quintette d’être là était palpable; la connivence entre eux, évidente (n’étaient-ils pas mignons avec leurs chemises hawaïennes, ou leur petit bout de t-shirt, dans le cas du percussionniste Danny Heifetz?). Cela dit, rien ne peut remplacer la charismatique présence du chanteur Mike Patton et son incroyable voix qui passe de style crooner aux chants d’oiseaux, aux chants rauques-death, à la reprise de That Thing de Lauryn Hill, sans sourciller. On en est ressorti le sourire aux lèvres et avec l’impression d’avoir assisté à un moment magique. Mon show de l’année. (Christine Fortier)

Sylvain Lelièvre / Pierre Barouh
Le 4 novembre à la maison de la culture Frontenac
Le premier concert de la treizième édition de Coup de coeur francophone comportait tous les éléments d’une soirée entre amis. D’un spectacle volontairement imparfait, où les bouts de ficelle dépassent, où la mise en scène s’improvise d’elle-même, où les attentes sont fondées à partir du simple bonheur contagieux d’être là, jusqu’à réécouter une poignée d’immortelles. C’est ainsi que l’ont voulu Sylvain Lelièvre et son complice Pierre Barouh: dans la convivialité la plus absolue. Pendant que les fidèles prennent place, Lelièvre et ses musiciens (Vic Angelillo à la contrebasse, Gérard Masse dit le «malcommode» dixit Lelièvre, à la batterie, et le sidérant Richard Beaudet aux saxos et flûtes) installent subtilement l’ambiance jazz avec une version de Round Midnight. Puis c’était parti. Barouh, discrètement accoudé au piano de son ami à fumer des cigarettes et à apprécier Les Choses inutiles, Marie-Hélène ou Tombouctou, se lancera timidement dans l’arène avec les siennes: Les Ronds dans l’eau, Les Filles du dimanche, Lili, À Bicyclette (popularisée par Montand), et une savoureuse, Tonio, témoignage goguenard d’un joueur de foot assassiné. «Je ne fais que chantonner, mais ça, vous le saviez déjà», s’excusera Barouh, qui, de toute évidences endosse le «vachement décontracte». En deuxième partie, la Brésilienne Bïa se joint au groupe, interprétant avec Barouh l’irrésistible Samba Saravah, chanson-hommage à tous les Brésiliens musiciens: Vinicius, Gaétano Veloso, Chici Buarque, etc. Soirée de rapprochement avec le public donc, qui donna l’occasion aux deux compères de les interpeller de plus près en les visitant à leurs sièges, en leur faisant la cour, quoi! Cette façon de faire a certainement plu. Surtout qu’au début du spectacle, Barouh est venu chercher Alain Chartrand (grand manitou de l’événement) dans l’auditoire et l’a fait chanter un ou deux refrains jusqu’à la scène, où il fut invité, à sa grande surprise, à donner le coup d’envoi des festivités. Un moment magique et spontané. Barouh et Lelièvre remettent ça le 14 novembre, au Medley, avec Daniel Boucher. (Claude Côté)

Massilia Sound System Le 5 novembre au Lion d’or
Ils étaient venus foutre l’oaï (bordel) et, pour ça, on peut dire qu’ils ont réussi. Les quatre tchatcheurs du Massilia Sound System, appuyés par leur D.J. et leur claviériste, ont lancé leur reggae-ragga-hip-hop sauce Pagnol avec verve et enthousiasme. À entendre les exclamations de «aïoli!» proférées par des types brandissant des écharpes de l’Olympique de Marseille, on a pu déduire que la foule était composée à au moins 50 % de Marseillais. Statistique aussi approximative qu’inutile, puisque après deux morceaux, c’est tout le Lion d’or qui se sentait provençal et qui entonnait en choeur les harangues anti-Front National du Commando Fada. Bref, le party était pris, même si, dès le premier morceau, qui commençait par la désormais célèbre phrase «Y a pas d’arrangemeng», on n’a pu s’empêcher de faire des comparaisons désavantageuses avec leurs compatriotes de Zebda; et même si le coup du petit verre de pastaga distribué à la ronde, ils nous l’avaient fait lors de leur passage aux Foufs il y a de cela plusieurs lunes, le groove y était. Après tout, on ne va pas voir Massilia pour entendre de grandes performances vocales ou musicales, mais pour opiner du chef au son «l’asseng» du Midi. Allez, aïoli! (Nicolas Tittley)

Brendan Perry
Le 6 novembre au Kola Note
Même sans sa comparse auréolée de Dead Can Dance, Brendan Perry commande un respect quasi religieux chez son public. Lors de son premier passage en solo depuis la désintégration de DCD, le chanteur s’est d’ailleurs étonné du calme qui régnait dans la salle. «Quel public révérencieux! Allez, je suis sûr qu’il y a un peu de vie en vous!» s’est-il exclamé, dans l’une de ses rares déclarations à la foule. Celle-ci, visiblement composée de fans de longue date de Dead Can Dance, s’est surtout animée lorsque le héros du jour a interprété quelques morceaux de son ancienne formation (The Ubiquitous Mister Lovegrove et American Dreaming), mais a su se montrer réceptive aux récentes compositions du chanteur. Techniquement impeccable (ce qui nous a permis de redécouvrir avec bonheur les qualités acoustiques de la-salle-autrefois-connue- sous-le-nom-de-Club-Soda), la prestation space-folk de Perry était malheureusement un peu trop désincarnée pour laisser une impression durable. Très concentré sur sa guitare et le son de sa voix (irréprochables, on le répète), il a fini par montrer son côté plus humain lors de sa belle reprise de Tim Buckley.

En première partie, Kristin Hersh, armée de sa seule guitare, a su faire preuve de plus d’émotion, déversant un mélange d’agressivité et de fragilité d’une voix beaucoup plus maîtrisée que celle qu’on lui a connue à l’époque des Throwing Muses. Je regrette de n’avoir pu assister qu’à la moitié de sa prestation, qui semblait des plus prometteuses. (Nicolas Tittley)

Obliveon
Le 6 novembre au Medley
Impossible de ne pas mentionner l’excellente performance d’Obliveon, samedi dernier, dans un Medley rempli à pleine capacité. Les gars nous ont réservé un savant mélange de Nemesis (1993), Cybervoid (1996) et Carnivore Mothermouth (il tient drôlement bien la route sur scène, celui-là). Plus quelques surprises, notamment la présence du chanteur Mike DiSalvo, de Cryptopsy, sur la chanson Nemesis. Un moment très intense que le groupe aurait eu intérêt à placer plus tard durant leur prestation, question de ne pas épuiser toute notre attention, déjà grandement sollicitée par Martyr, Quo Vadis et Necrotic Mutation, avant eux. (Christine Fortier)