Blackalicious : Soleil noir
Musique

Blackalicious : Soleil noir

Contrairement à ce que certains prétendent, ça bouge drôlement du côté de la Côte Ouest dans le petit monde du hip-hop. Alors que certains gros canons de la région semblent avoir du plomb dans l’aile, une nouvelle génération d’indépendants novateurs émerge de l’underground pour se tailler une place au soleil. Cette année, le FIJM accueille Blackalicious, l’une des plus brillantes formations de San  Francisco.

Contrairement à ce que certains prétendent, ça bouge drôlement du côté de la Côte-Ouest dans le petit monde du hip-hop. Alors que certains gros canons de la région semblent avoir du plomb dans l’aile, une nouvelle génération d’indépendants novateurs émerge de l’underground pour se tailler une place au soleil. Cette année, le FIJM accueille Blackalicious, l’une des plus brillantes formations de San Francisco.
De la plume de quelqu’un qui n’est pas un habitué de la chronique hip-hop, une telle affirmation est à prendre avec un grain de sel, mais allons-y tout de même: Nia est ni plus ni moins que l’un des meilleurs disques hip-hop entendus depuis des lustres. Et si l’on peut avoir l’impression d’être loin du jazz, et que les beats de Chief Xcel ne possèdent pas l’étourdissante dextérité de ceux de son compagnon de label DJ Shadow, la musique de Blakalicious témoigne d’une richesse qui lui est propre. Sur des basses bien appuyées, Xcel étale une impressionnante palette de sons: du vieux soul, beaucoup de lignes mélodiques de piano, des rythmes africains (Smithzonian Institute of Rhyme), des relectures old school (sur Cliff Hanger, il organise un croisement entre Afrika Baambaata et un violon) et une abondance d’échantillonnages à la gloire du panafricanisme. Cet éclatement sonore est égalé par les prouesses vocales de Gift of Gab, rapper à la fois hyperactif (les allitérations de A to G ont de quoi donner le vertige) et très relax. "Ce qui fait la particularité de notre groupe, c’est la chimie qui existe entre Xcel et moi, lance Gab. Le hip-hop a toujours porté en lui un élément de compétition, mais la plupart du temps, ce sont les M.C. et les D.J. de différents crews qui s’affrontent; avec Blackalicious, la compétition se passe à l’interne: Xcel m’apporte des sons tellement hallucinants que ça me force à me dépasser."
Parlant de dépassement, malgré une rage de dents à faire pleurer un prospecteur d’or (il dut d’ailleurs interrompre l’entretien pour apprendre de son dentiste qu’il allait hériter d’un traitement de canal), Gift of Gab s’acquitte avec diligence de ses tâches promotionnelles et accumule les interviews en prévision de son passage à Montréal. "Jouer dans un festival de jazz? It’s all good man, pretty phat! On n’est pas fermés à quoi que ce soit, ce qui explique que l’on touche tant les fans purs et durs de hip-hop que des gens qui ne s’y intéresseraient pas normalement. Jaunes, blancs, rouges, il y a de tout dans un concert de Blackalicious."
En fait, Gift of Gab est prêt à tout, sauf à recourir aux clichés, et Nia se distingue surtout par son attitude, à mille lieues des poses grotesques de la majorité des gangsta rappers. Mieux, le groupe dénonce même les nombreuses dérives du mouvement hip-hop. Shallow Days est une charge contre la glorification de la violence et Deception raconte les hauts et les bas d’un one-hit wonder imaginaire. "Ce qui est important, c’est de perpétuer la culture, pas de s’attacher aux choses superficielles comme les chars et l’argent", lance le rapper. Pas facile à faire, dans un mouvement où la quête du profit semble maintenant faire partie de la culture… "C’est simplement une question d’intégrité et de respect de soi, réplique Gab. Ce n’est pas une chanson contre le gangsta rap, mais contre ceux qui prennent des poses dans le seul but de faire la piasse."
Membres du collectif Quannum, où l’on retrouve entre autres Latyrx et le Shadow mentionné plus haut, les gars de Blackalicious contribuent à rehausser les standards de qualité et d’originalité du hip-hop moderne. "La scène est très stimulante en ce moment, concède Gab. Je sais que c’est très cyclique, mais je crois que nous vivons présentement une sorte de renaissance du mouvement hip-hop. Des disques fabuleux sont sortis ses derniers temps: Mos Def, Jurassic Five, Dilated People… tous ces gens font bouger le hip-hop dans de nouvelles directions." Vous pouvez ajouter Blackalicious à cette liste.

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