Dionysos : Grand cru
Musique

Dionysos : Grand cru

Lorsqu’on a aperçu Dionysos au dernier Printemps de Bourges, en première partie de Louise Attaque, on a vite compris qu’il n’avait pas volé sa réputation de l’un des meilleurs groupes de la scène française, et peut-être de l’un des meilleurs groupes français, point à la ligne.

Lorsqu’on a aperçu Dionysos au dernier Printemps de Bourges, en première partie de Louise Attaque, on a vite compris qu’il n’avait pas volé sa réputation de l’un des meilleurs groupes de la scène française, et peut-être de l’un des meilleurs groupes français, point à la ligne. Même incommodé par un plâtre à la jambe, et confiné à la position assise, le chanteur Mathias Malzieu, agité de convulsions démoniaques, a eu tôt fait de prouver à la foule de 4000 spectateurs qu’elle n’aurait pas droit à un show de chaises. C’est d’ailleurs sur scène, dans un moment d’emportement, que le chanteur s’est infligé des blessures à la jambe. "Je me suis bousillé le tibia et le péroné, et je me suis arraché les ligaments de la cheville, raconte froidement Mathias, joint dans une cabine téléphonique quelque part à Valence, ville natale du groupe. C’était pourtant une cascade que j’avais l’habitude de faire: j’ai tendance à grimper partout et à me lancer sur scène; mais ce soir-là, je devais être un peu fatigué." Alors, l’accident a-t-il tempéré ses ardeurs? "Je ne pense pas être plus calme, mais l’énergie passe autrement. Je danse moins, c’est évident, mais j’ai appris à faire sortir l’énergie du buste. Si ça se trouve, c’est peut-être devenu plus intense qu’avant, et le fait de jouer assis m’a appris beaucoup de choses qui me serviront lorsque je serai complètement remis."
Aujourd’hui, avec plus de 300 concerts à son actif, le groupe a avancé de plusieurs chapitres sur les secrets d’une bonne performance. Côté studio, on peut également parler d’évolution: après quelques enregistrements résolument lo-fi (The Sun Is Blue Like the Eggs in Winter fut réalisé en cinq jours, en partie dans la cuisine de Mathias), Dionysos a lancé l’excellent Haïku sur Trema, le label pour lequel enregistrent leurs amis de Louise Attaque, mais aussi Michel Sardou! Comme tant d’autres formations françaises, le groupe a décidé de s’envoler vers l’Amérique, à San Francisco plus précisément, pour enregistrer avec Norm Kerner et Dan Presley, responsables du son sur des albums de Spain et de Faith No More. "Je tiens à dire qu’on les a choisis plus pour leur travail avec Spain qu’avec Faith No More, précise Mathias. Mais ce qui nous a le plus séduits, c’est qu’ils ont bossé avec les Breeders et Grant Lee Buffalo, deux groupes dont nous sommes fans. Ils ont tout de suite compris ce qu’on voulait faire: un truc groovy mais organique."
Voilà deux mots qui décrivent bien Haïku, disque où le groupe affiche une filiation certaine avec Beck ou Sebadoh, tout en gardant un côté français, à la manière de leurs compatriotes de Little Rabbits. Entre l’acoustique et la distorsion, le beat et les violons, le français et l’anglais (tous deux employés avec un grand sens de l’absurde), Dionysos a trouvé l’équilibre parfait. "On voulait avoir les qualités d’un album bien produit, en essayant de garder l’esprit spontané et l’instinct des prises d’urgence de nos débuts, explique le chanteur. C’est plus dur à faire, mais c’est plus excitant; se contenter d’enregistrer de manière artisanale, sur quatre pistes, simplement au nom d’une quelconque éthique underground, ça ne mène à rien. On est fans de Gainsbourg et de Nick Cave, et on voulait tenter d’intégrer des cordes à notre musique. Pour moi, essayer de marier un violoncelle à un beat hip-hop, c’est aussi punk que de balancer des guitares saturées en une seule prise."
Avec WD-40
Le 28 juillet
Au Spectrum