Le Tone : Le pied léger
Issu du courant hip-hop, Le Tone est aujourd’hui reconnu comme l’un des piliers de la scène électronique hexagonale. Pas vraiment French Touch, mais absolument français, ce drôle de zig vient apporter un peu de folie aux Francos.
Il s’appelle Le Tone et vous n’en saurez pas plus. Comme tant d’autres acteurs de la scène électronique, le musicien français se cache derrière un pseudo lorsqu’il travaille. Mais lorsque vient le temps de lui parler, comment s’adresse-t-on à lui? Est-ce qu’on dit Monsieur Le Tone? «Tu peux m’appeler Tone, tout simplement. C’est ce que font tous mes amis», décrète-t-il au bout du fil.
Et il n’a pas l’intention de changer… Il faut dire que ces dernières années, Le Tone s’est fait tout un nom dans la bouillonnante scène électronique hexagonale. Avec Joli Dragon, le sautillant premier extrait de son album Le Petit Nabab, Le Tone a fait danser toute l’Europe, en particulier l’Angleterre, qui a craqué pour les élucubrations sonores du Bordelais. Un effet bénéfique de la fameuse French Touch? À l’aube de son passage à la grande fête de la chanson francophone, la question est toujours d’actualité. «Tu sais, la French Touch, on s’en fout, mais ça fait vendre des disques, alors autant en profiter. Les gens qui écoutent mon disque se rendent bien compte que ma musique n’a rien à voir avec la house filtrée qu’on associe généralement à la French Touch. Quant au côté francophone, je suis français, alors je trouve normal de donner des titres français à la plupart de mes morceaux. Si je me mettais à tout écrire en anglais, mes potes se foutraient de ma gueule.»
Avant de devenir l’une des figures de proue de l’électro française, Le Tone a longtemps travaillé dans le hip-hop, un genre auquel il s’identifie toujours. «Quand j’ai commencé dans la musique, dans le hip-hop, chaque morceau était pensé en fonction de la voix que j’allais mettre dessus, puisque j’étais aussi rapper. Plus tard, lorsque je me suis mis à faire de la musique plus électronique, je trouvais qu’il fallait suppléer au discours qui manquait par un autre discours, celui des petits sons.»
Sur Le Petit Nabab, les «petits sons» abondent: s’il se permet d’échantillonner Billie Holiday chantant God less the Child sur Bitter Crop, l’essentiel des textures repose sur des sonorités beaucoup plus amusantes (enfantines?), qui vont d’un klaxon à un solo de R2D2 (sur le morceau caché en fin d’album) jusqu’à de l’opéra chinois qu’on dirait chanté par des écureuils. «Sur ce morceau (Is it Love?), je pose une question un peu lourde, du genre: «Est-ce que c’est d’amour que vous manquez?» Je voulais dédramatiser un peu et en intégrant ces voix d’opéra chinois en accéléré, je pensais à des petites souris amoureuses. Des souris amoureuses, ça ne peut pas être pathétique; c’est forcément rigolo.»
Malgré son côté léger, voire naïf, on devine chez Le Tone des ambitions presque littéraires, ou, à tout le moins, un certain sens de l’importance de la narration en musique. Après tout, on ne nomme pas un de ses morceaux Expression du domaine de la lutte impunément… Le Tone aurait-il un petit côté intello? «C’est bien la première fois qu’on me le dit, lance-t-il dans un éclat de rire. En général, on n’associe pas ma musique à la réflexion intellectuelle! Mais c’est vrai que j’ai conçu mon disque comme un livre: tous les morceaux s’enchaînent dans une suite logique, avec des humeurs différentes. Il y a une intro, des chapitres et une conclusion… Mais dans le live, c’est forcément différent: l’objectif, c’est de faire danser les gens, pas de leur raconter une histoire. Il y a un côté plus rock aussi, qui vient de l’instrumentation. Sur scène, on s’attarde moins aux textures, et on porte attention aux musiciens, qui sont tous des gens marrants.»
Qui sont ces «musiciens marrants»? Outre Le Tone, qui maniera tout un arsenal de machines, on retrouvera sur scène deux des participants à l’album, soit le scratcheur Double (anciennement connu sous le nom de Doubleuté) et le guitariste Monsieur Gadou; ils seront rejoints par un contrebassiste. «C’est un groupe bien équilibré; on travaille très naturellement, au point où l’on en arrive même à improviser, explique Le Tone. Bon, on n’et pas là pour faire des boeufs, parce que ça demeure de la pop; mais on s’amuse quand même.»
Le plaisir semble primordial pour Le Tone, peu importe le projet qui l’occupe. Et en ce moment, il semble s’éclater à loisir: «Je travaille à un projet de comédie musicale avec les gars de Saïan Supa Crew. C’est un court métrage amusant, très influencé par Jacques Tati, plutôt que par Jacques Demy. Ça se passe à Marseille et ça s’appelle L’Attaque du camion de glaces.» On l’imagine frais et sucré, à l’image de son compositeur.
Le 3 août, à 19 h et 21 h
Sur la scène du Monde FrancoFou
Avec Ten Zen
Le 4 août
Au Spectrum
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