À surveiller: Daniel Boucher, Ily Morgane, Béluga, Fred Fortin : À surveiller – musique
Musique

À surveiller: Daniel Boucher, Ily Morgane, Béluga, Fred Fortin : À surveiller – musique

Daniel Boucher, 23 septembre, Métropolis
Haut fait de la rentrée automnale 2004, le spectacle que livrera Daniel Boucher le 23 septembre au Métropolis sera le premier arrêt montréalais d’envergure pour le poète des temps gris depuis la sortie de son deuxième disque, La Patente. Un concert manifestement rodé, considérant les nombreuses prestations depuis le début avril en région, qui tombe pile au moment où le chanteur a besoin d’infuser un peu de dynamisme à sa carrière populaire.

Pas besoin d’être un fin observateur pour constater que la réaction du public aux attaques de La Patente s’est faite plutôt discrète. Le disque ne figure plus au top 20 des ventes d’albums de la province, et Le vent soufflait mes pellicules ne semble pas avoir conquis tous ces danseurs qui hier encore scandaient "Ma gang de malades!".

Boucher aurait-il perdu de son aplomb? Nullement. La donne change tout simplement. Ses nouvelles fonctions de père doivent inévitablement jouer sur la fréquence de ses apparitions médiatiques, et son départ de GSI pour créer sa propre étiquette, Boucane Bleue, représente une étape qui nécessite forcément un temps d’adaptation.

Daniel Boucher n’a pas reproduit non plus un album à la 10 000 Matins. Moins propre et par conséquent plus risquée pour nos radios commerciales pas de couilles, La Patente entre dans la catégorie des œuvres audacieuses sans compromis que les artistes établis d’ici n’osent que très rarement. Riche en sonorités planantes et en ritournelles hypnotiques, le compact ne mise pas sur une formule toute faite, mais sur l’imagination débordante d’un artiste pété façonné par le voyage, la réflexion et l’exploration musicale. C’est ce Daniel Boucher capable d’émotions qu’il faut aller voir en concert, pas celui qui n’a pas encore accoté le succès de son premier album.

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Ily Morgane
Révélation des FrancoFolies 2001 et finaliste au dernier Festival de Granby, Ily Morgane est demeuré plus tranquille au cours des derniers mois, transformant ainsi ses concerts en denrée rare. La cause: l’enregistrement de son deuxième album éponyme, disponible le 13 octobre sur étiquette Audiogram.

Il va sans dire, cette véritable promotion qu’est le fait de signer avec un des labels de pointe au Québec ne s’est pas réalisée sans ardeur. Fondé en 1998 par les frères Éric et Martin Cormier, Ily Morgane s’est d’abord démarqué par une démarche théâtrale. Mettant en scène le personnage qui prête son nom à la formation, le premier compact indépendant, lancé en 2001, croquait sur le vif les aventures du héros tout en y incorporant quelques revendications sociales. Martin Cormier donne d’ailleurs une identité distincte au groupe grâce à sa voix aussi mélodieuse qu’unique par son haut registre.

Tous ont alors salué les compositions du trio devenu septuor sur scène. Dans une ambiance moderne, les trésors pop du groupe de Québec se sont démarqués grâce à leur penchant rock acoustique mené par un vibraphone, instrument principal de quelques chansons. Cette formule originale, secondée par un magnétisme éprouvé et récompensé à Granby en 2003 par le prix "Meilleure présence sur scène", a permis à Ily Morgane de devenir un chouchou des critiques.

Au tour maintenant du grand public d’être conquis. La mouture 2004 du combo s’annonce davantage inspirée par la chanson française, et on nous promet toujours des textes étranges, mais réfléchis.

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Béluga
Comme si le duo Béluga avait nagé en eaux profondes depuis sa naissance pour échapper aux radars de l’industrie du disque québécois, le premier compact de la formation a émergé il y a moins d’un mois sur le bureau des chroniqueurs dans la surprise la plus complète.

Album de qualité autoproduit dans une indépendance préservée, sa pochette même relève d’un professionnalisme coûteux (photos impeccables, direction artistique sentie, épais livret contenant paroles et crédits) digne d’une maison de disques de renom.

Quant à la galette, les deux Béluga, Simon Landry (ex-Fresh Persil) et Clermont Jolicœur (comédien dans Watatatow, 4 et demi et Maelström), n’ont en rien lésiné pour maintenir le niveau de qualité déjà observé au premier abord. Épaulée par Louis-Jean Cormier de Karkwa à la réalisation, l’équipe s’est entourée de collaborateurs/amis qui n’auraient causé aucune surprise ou presque sur le prochain disque d’Ariane Moffatt, mais qui, regroupés sur le premier effort d’une formation obscure, ont de quoi vous prendre de court.

Liquid (Bran Van 3000), Batlam (Loco Locass), Annie Dufresne, Jean Leclerc (celui-là même qui tua Jean Leloup) et François Lafontaine (Karkwa, Large Ensemble) contribuent grandement à l’album; ainsi, les mélodies se mêlent aux sons de divers courants issus du rock, du funk, du folk, du reggae et du rap.

S’il est interdit de chasser le béluga sur l’eau, il est conseillé de l’attraper à Montréal cet automne en attendant qu’un label le signe. Car, oui, les représentants se bousculent au portillon au moment où vous lisez ces lignes.

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Fred Fortin
Si Fred Fortin nous a habitués à des ambiances rock rentre-dedans et parfois même stoner avec ses concerts livrés sous la forme d’un homme-orchestre, la surprise risque d’être de taille lorsque son troisième album, Planter le décor, se retrouvera en magasin quatre ans après le lancement de Plancher des vaches.

Oubliez ce que vous avez vu de Fred au cours des deux dernières années. Dans une optique de renouvellement et de dépassement, le Bleuet prépare un album qui flirte avec un univers country-folk mélodique nettement moins sale.

Accompagné d’un groupe au C.V. imposant (Alain Berger, Olivier Langevin, Daniel Thouin, Sunny Duval et Pierre Girard à la réalisation), Fortin avoue lui-même naviguer dans des eaux très beatlesques. El-Hadj Diouf l’accompagne d’ailleurs sur une reprise d’Inner Light – pièce écrite par George Harrison et disponible sur le Past Masters, vol. 2 – réarrangée pour l’occasion.

Captée en partie dans son bunker du Lac-Saint-Jean et dans la Métropole, cette première production sur sa nouvelle étiquette C4 s’annonce donc plus accessible, et l’appui de Dan Thouin permet de supposer une présence marquée des claviers.

Lancé le 10 novembre au Lion d’Or dans le cadre des Francouvertes, Planter le décor marquera le retour de Fred Fortin sur scène; il s’engagera alors dans une tournée provinciale. Arrêt montréalais: le 11 décembre au Spectrum.