Daniel Lavoie : Comme il se doit
Daniel Lavoie remet les pendules à l’heure et nous livre une version définitive de ses grands succès. Fini les artifices, il renoue maintenant avec l’essence de sa musique.
Daniel Lavoie
en avait marre d’entendre les synthétiseurs et les batteries électroniques des années 80. En imaginant l’album J’écoute la radio, l’auteur-compositeur-interprète d’origine manitobaine entendait des instruments acoustiques, un violon métis et même du doudouk, instrument traditionnel arménien comparable à l’oud. Ce nouvel album au caractère folk n’est pas seulement une compilation de ses grands succès, c’est plutôt une traduction libre de ce qu’auraient dû être ces chansons.
"Il y a beaucoup de citations sur ce disque, indique-t-il. Marc [Pérusse, coréalisateur avec Lavoie sur l’album] et moi, on a la même éducation musicale et on fait de la musique depuis 40 ans. On pensait à Crosby, Still, Nash & Young, par exemple. Même que Tension attention, sur le plan du son, c’est le premier disque de Led Zeppelin! On n’a pas essayé d’être à la mode. On voulait faire une musique qui nous ressemble. Il ne faut pas avoir peur de sa culture musicale personnelle. Nous, c’est la musique de la fin des années 60 et des années 70. C’est ça, notre vocabulaire."
C’est donc une transformation radicale qu’ont subie ces 11 titres choisis (plus une chanson-titre originale). Tension attention, à titre d’exemple, est totalement méconnaissable. "La version originale de Tension attention avait beaucoup moins bien vieilli qu’Ils s’aiment, par exemple. Et Tension attention est sans doute le plus gros tube que j’ai eu au Québec! À l’époque, il fallait que ça sonne pop électronique… Moi, cette chanson, je l’ai toujours vue comme une toune country. Eh bien aujourd’hui, c’en est une! Le message est encore d’actualité. Elle pourrait même devenir une petite chanson-thème pour les indignés!" constate-t-il, amusé.
D’ailleurs, l’actualité politique des années 70 et 80 a inspiré l’auteur plus qu’on ne l’aurait cru. Si Je voudrais voir New York a trouvé une toute nouvelle signification depuis les événements de septembre 2001, l’auteur garde toujours en mémoire le soulèvement en Pologne de la population contre le bloc communiste en 1980. "J’avais vu une entrevue à la télévision avec Lech Walesa, ce chef syndical qui menait le soulèvement et qui est devenu président par la suite. Lorsque la journaliste lui avait demandé quel était son rêve, il avait répondu que c’était d’être millionnaire et de vivre à New York, mais que son destin était tout autre. J’ai constaté que ce bijou de la consommation est ancré chez tout le monde: le rêve américain, la fortune et New York. Mais avec des paroles comme "Coule-moi que je voie le feu qui brûle en toi", maintenant, je vois les tours s’effondrer."
Martin Léon a d’ailleurs interprété une narration sur cette même chanson, un artiste invité parmi six autres sur ce disque. Dont Catherine Major, qui accompagne Lavoie sur Je pensais pas. Et Renaud, qui lutte ces temps-ci contre ses démons personnels, fait une apparition inespérée sur Boule qui roule. "Il était mon invité lors d’un spectacle en 1988 à Québec et nous avions chanté cette chanson. Pour ce disque, il a fallu que j’insiste et que j’insiste… c’était compliqué. Mais je l’ai eu. C’est un grand, Renaud. Qu’il se soit montré à moi dans cet état, ça me donne la certitude qu’il va s’en sortir et se remettre sur pied."
J’écoute la radio
Daniel Lavoie
(Spectra Musique)