Jean-Louis Murat : Passe Murat
Musique

Jean-Louis Murat : Passe Murat

Jean-Louis Murat n’a pas cessé de faire des disques comme il l’envisageait il y a un an. Il revient avec Grand lièvre et remet ça pour deux soirs aux Francos.

"C’est très rigolo vu d’ici. Y a un côté infantile qui est super marrant dans cette crise de nerfs collective", lance en début d’entrevue Jean-Louis Murat à propos des manifestations qui secouent le Québec. "Comme maintenant il n’y a plus de carnavals, faut bien s’exprimer comme on peut! Car c’était ça le rôle des carnavals et des fêtes populaires autrefois. Là, le fou du roi devient le roi et le roi devient le fou. C’est une idée très 19e (siècle) et très européenne, une idée de peuple, quoi. Et d’un seul coup, le peuple pointe le bout de son nez entre les pouvoirs nationaux et internationaux et dit: "Et nous?" en tapant sur des casseroles; j’avoue que c’est assez rigolo. J’espère que ça va encore avoir lieu quand je serai à Montréal, c’est comme avoir la Fête de la musique tous les jours…" Fidèle à lui-même, Jean-Louis Murat dit ce qui lui passe par la tête, prend un certain plaisir à provoquer un peu, toujours sur un ton calme et détaché, un peu bourru. Ce certain je-m’en-foutisme colore aussi toute l’oeuvre de l’Auvergnat. Cette façon de chanter, cette voix un peu traînante, le ton et les ambiances… L’oeuvre d’un iconoclaste qui a toujours fait à sa façon, sans aucun compromis.

La dernière fois qu’on lui avait parlé, un peu avant ses trois concerts des Francos de 2010, il nous laissait entendre, de façon très imagée, qu’il ne ferait probablement plus d’albums, déçu par la crise du disque, le public français et le métier à la française. Et pourtant, le revoici avec Grand lièvre, à peine deux ans après Le cours ordinaire des choses. "J’en suis arrivé à la conclusion que je ne suis bon qu’à faire des disques. Au bout des deux ou trois semaines où je tourne comme un ours chez moi en me disant que je vais faire un autre job, je commence à envisager ce que pourrait être la vie en étant maçon, paysan, fromager ou je sais pas quoi, puis je me dis: "Hé merde! J’ai pas envie d’avoir un patron, j’ai pas envie d’avoir des horaires." Et chaque fois je reviens à mon activité de base qui est celle d’écrire des chansons. Mais c’est vrai que ça pose des problèmes de motivation. Quand on vit dans l’insuccès, c’est pas très motivant pour continuer", admet celui qui sort en moyenne un album par année ou aux deux ans depuis 1989, sans compter la vingtaine de maxis et les live.

Grand lièvre, contrairement au précédent Le cours ordinaire des choses enregistré à Nashville, a été réalisé de façon modeste dans le sud de la France. "J’ai fait ça très, très vite, sans prise de tête. Tout le monde dans la même pièce et en trois ou quatre jours, on enregistre le disque. J’aime pas beaucoup m’embêter quand j’enregistre des albums, j’aime quand ça va vite", avoue Murat. "Passer deux ou trois heures sur une chanson, c’est long. Je suis quelqu’un de très impatient. C’est donc ce que je voulais pour Grand lièvre, un disque assez simple, vraiment dépouillé, fait rapidement et simplement. J’étais en état d’apesanteur, je ne me rendais même plus compte qu’on enregistrait. Moi, ça me va assez bien d’être en état d’apesanteur."