Festival Innu Nikamu et Musique nomade / Kim Fontaine : 30 ans de métissage
Le festival de musique autochtone Innu Nikamu, c’est beaucoup plus que des plumes et des teweikans. Le plus gros festival du genre du continent fête ses 30 ans dans quelques jours, du 31 juillet au 3 août.
Il y a deux festivals de musique majeurs sur la Côte-Nord, celui de Tadoussac et Innu Nikamu, à Maliotenam, une communauté innue située à quelques kilomètres du centre-ville de Sept-Îles. Et les deux ont sensiblement été créés en même temps. Même s’il est plus vieux que les FrancoFolies de Montréal, l’Innu Nikamu demeure méconnu et entouré de préjugés.
«Ça demeure un défi, avoue le coordonnateur en chef, Kim Fontaine, aussi bassiste pour Florent Vollant. Certains imaginent que c’est un Woodstock autochtone, avec plein de gens saouls, mais il n’y a pas d’alcool! Même les artistes s’engagent à être sobres! On est un événement familial et on veut le rester.»
Autre défi: l’image de la musique autochtone. Les succès des Kashtin, Samian ou Elisapie n’ont pas réussi à enlever cette idée d’une musique traditionnelle ornée de plumes. De fait, «ça ne sera jamais mis de côté, mais il y en a de moins en moins», explique Kim qui insiste à propos des artistes autochtones qui se sont approprié la musique d’aujourd’hui et qui vont dans le slam, le rock, le reggae, l’électronique. «Des racines demeurent, mais à ce moment-là, ils vont revisiter des chants traditionnels en les mixant à une musique contemporaine.» En gros, il y a du hip-hop autochtone comme il y a du hip-hop québécois.
Attirer les non-Autochtones
Innu Nikamu, qui pourrait se traduire par «l’homme qui chante», est devenu un incontournable non seulement pour les communautés autochtones de la Côte-Nord, mais de tout le Québec et même du Canada, et ce, malgré sa distance avec les grands centres. Si vous y allez en auto, prévoyez huit heures de route de Québec et dix heures de Montréal.
D’ailleurs, ce n’est pas difficile de convaincre les artistes de venir jouer; c’est marier les horaires qui donne des maux de tête. Se déplacer pour Innu Nikamu demande deux à trois jours, ou des coûts élevés si la voie aérienne s’impose.
Le festival est à l’image de la culture innue: ouvert et humble. «C’est un lieu de partage, de fraternité. Les artistes et les spectateurs repartent avec le cœur gros, il se crée une proximité et un échange unique», fait valoir Kim Fontaine sur l’ambiance du site, qui peut recevoir environ 6000 personnes.
Les Innus, peuple très accueillant, sont tristes de ne pas voir davantage d’allochtones sur le site. «C’est difficile d’accrocher les gens. Si les Innus ne chantent que dans leur langue, ils ne touchent pas les gens», avance celui qui travaille aussi au projet Musique nomade. Sa tactique: provoquer les rencontres.
«C’est un gros test, cette année», lance Kim. Plutôt que d’y aller avec une énorme soirée avec un nom à tout casser, il a tenté de faire que des «samedis soir», et surtout, de jumeler des artistes autochtones avec des non autochtones, comme Louis-Jean Cormier, qui vient de Sept-Îles, Kaïn ou Guy Bélanger. Si l’achalandage caucasien n’augmente pas, «la programmation n’est alors pas le problème».
En espérant que les préjugés mangent une claque.
Du 31 juillet au 3 août. Pour les détails: innunikamu.ca