Pré-dévoilement de programmation : La Corée du Sud et la Schaubühne au FTA 2015
Scène

Pré-dévoilement de programmation : La Corée du Sud et la Schaubühne au FTA 2015

Pour la première fois, le Festival TransAmériques (FTA) accueillera ce printemps un spectacle de la Corée du Sud. Le festival a aussi dévoilé ce matin une première présence montréalaise du metteur en scène Michael Tallheimer, de la Schaubühne de Berlin, ainsi que des pièces de Benoit Lachambre et d’Olivier Choinière.

Les prédévoilements de programmation du Festival TransAmériques (FTA) sont toujours événementiels, mais les 4 spectacles annoncés aujourd’hui étaient d’autant plus attendus qu’ils sont les premiers dévoilés par le nouveau directeur artistique Martin Faucher, qui succède cette année à la fondatrice Marie-Hélène Falcon.
 

Un visage excentrique de la Corée du Sud

On savait déjà, depuis décembre, que le FTA accueillera le spectacle Tauberbach, d’Alain Platel et ses Ballets C. de la B., une compagnie chouchou du festival, dont le travail est très connu des spectateurs montréalais. Mais Faucher promettait aussi, au moment de sa nomination, d’explorer de nouvelles scènes, de « fréquenter le Japon, la Corée du Sud, la Chine ». Voilà qui sera entamé avec la venue du spectacle Dancing Grandmothers, d’Eun-me Ahn, dans lequel une douzaine de grand-mères de la Corée du Sud investissent le plateau pour une danse joyeuse, sur des musiques isues des différentes décennies ayant marqué leurs vies. Chorégraphe sud-coréenne ayant longtemps vécu à New York et été une amie proche de Pina Bausch, Eun-me Ahn est une figure incontournable de la danse en Corée du Sud, où on la surnomme la « danseuse au crâne chauve » (elle rase ses cheveux depuis les années 90). Son approche est ici ramenée à l’essentiel. En 2010, elle a sillonné les provinces rurales de Corée du Sud, où elle a rencontré ces femmes âgées et leur a demandé de danser spontanément. Des paysannes, des boulangères, des sans-abri: elles ont répondu à l’appel et dansé tout naturellement, dans un mouvement libre et émouvant. Elles dansent dans ce spectacle en compagnie d’interprètes professionnels, qui agissent comme guides naturels, sans prétention.
 

 

Tartuffe est un gourou sexy

Une année passée sans voir un spectacle de la Schaubühne de Berlin n’est pas une année théâtrale satisfaisante. Martin Faucher fait ce printemps le pari d’inviter à Montréal une figure allemande méconnue en Amérique du Nord: le metteur en scène Michael Tallheimer, reconnu pour son esthétique radicale, dans des scénographies épurées qui montrent un monde décharné, où les hommes se déchirent dans d’inévitables jeux de pouvoir. Sa mise en scène de Tartuffe, de Molière, se détache de la comédie pour inventer un Tartuffe quasi-chamanique: le dévot devient ici gourou charismatique, figure héroïque (et érotique) qui exerce un atttrait puissant dans une société déconfessionnalisée. C’est un Tartuffe mâle, viril et charnel, qu’ose imaginer Tallheimer, mais surtout un Tartuffe intégriste, insidieusement tyrannique, autour duquel s’organise un affolant fanatisme religieux. Ça promet.
 

 

Benoît Lachambre s’allie à Fabrice Ramalingom

Inutile de présenter le danseur et chorégraphe montréalais Benoît Lachambre, bien connu des festivaliers transaméricains pour sa danse sensorielle, jouant sur les sens et la perception, explorant méticuleusement les niveaux de présence et d’énergie du corps. Ondulante et charnelle, la danse de Benoît Lachambre rencontrera dans le spectacle Hyperterrestres celle du danseur et chorégraphe français Fabrice Ramlingom, maître de la transformation physique. Créant une chorégraphie « sous l’épaisse peau d’une matrice baignée de lumière », ils explorent ici des corps à demi-visibles, physiquement dissimulés mais énergiquement bien présents. Le spectacle est issu d’un long processus de création et, notamment, d’un séjour hawaïen à nager avec les dauphins en tentant d’en capter la communication par ondes, pour élaborer ensuite un langage spatial entre les deux danseurs.
 

 

Choinière et Bürger dans les dédales de l’immigration

Observateurs corrosifs et allumés de notre société, Olivier Choinière et Alexia Bürger invitent sur scène, dans le spectacle Polyglotte, 13 Montréalais d’origines ethniques diverses (dont les comédiens Mani Soleymanlou et Mireille Tawfik) qui guident les spectateurs vers la citoyenneté canadienne en s’inspirant des questions de l’examen de citoyenneté canadienne mais aussi d’un vieux cours de conversation française et anglaise sur disque, The Poly-glot Method of French Conversation / Méthode poly-glotte de conversation anglaise. Dans cette forme aussi calculée que propice à des discours spontanés de la part des immigrants, le metteur en scène dit vouloir « renverser la façon dont nous nous représentons nous-mêmes, et ce, particulièrement au théâtre: comme une société toujours et encore blanche, le plus souvent unilingue et diablement homogène. Or, pour nous voir collectivement en 2015, le regard de l’immigrant, le regard de cet autre qui fait partie de nous, est nécessaire. C’est par lui que je peux m’extraire de mes propres clichés, comme de toutes ces images qui nous figent. » S’inscrivant dans une nouvelle vague de théâtre politique montréalais interrogeant le pluralisme de la société québécoise (aux côtés de Trois, de Mani Soleymanlou, Marche comme une Egyptienne, de Mireille Tawfik ou Moi et l’autre, de Tallia Halmona), cette pièce interprétée en majorité par des non-acteurs et ancré dans des vécus contrastés tirera aussi profit de différents langages: « lip sync, bruitage live, utilisation d’écrans, jeu sur les images d’archives, karaoké, voix hors-champ, entrevues ».
 

 

Tous les détails au http://www.fta.qc.ca/