Fernand Leduc : le peintre de lumière s’éteint et laisse un précieux héritage
Le peintre Fernand Leduc est décédé plus tôt cette semaine, dans la nuit de lundi à mardi, à Montréal – où il était de retour depuis 2006, l’année suivant le décès de sa femme, l’écrivaine Thérèse Renaud -, des suites d’un cancer.
Membre du mouvement des Automatistes, contemporain de Paul-Émile Borduas et signataire du manifeste du Refus Global, Fernand Leduc est bien connu des deux côtés de l’Atlantique, ayant séjourné de nombreuses fois en France avant de s’y installer dans les années 1970. Le peintre de lumière laisse derrière lui un précieux héritage pictural et théorique.
Né à Viauville (dans l’est de Montréal) en 1916, le peintre a fréquenté l’École des beaux-arts de Montréal dès 1938. Fernand Leduc était un des «haut parleurs» du Refus Global, avec Claude Gauvreau, et ses écrits, de même que sa correspondance, demeurent des documents essentiels pour comprendre le climat culturel du Québec, au cours des années quarante et cinquante. Il deviendra en quelque sorte un théoricien doublé d’un propagandiste du groupe, « pour autant qu’on reconnaisse que la théorie vient après la création et non avant. Le tableau n’est pas l’application d’une théorie. Mais le regard que lui jette l’artiste une fois terminé peut alimenter sa réflexion, faire apparaître de nouvelles problématiques qui mèneront à d’autres œuvres. ».
Leduc, séduit par l’exposition d’Alfred Pellan en 1940, puis fortement impressionné par l’exposition des gouaches de Borduas en 1942 – de qui il dira avoir appris l’essentiel -, sera de toutes les manifestations du groupe des Automatistes jusqu’à l’événement Espace 55, au Musée des beaux-arts de Montréal, qui consacre une peinture non figurative plus dépouillée, plus ordonnée, souvent en rupture avec l’automatisme. Mais c’est un lent parcours, doublé d’une quête d’équilibre et de rigueur, qui mènera le peintre des Automatistes aux Plasticiens. En 1956, c’est lui qui fonde l’Association des artistes non figuratifs de Montréal, dont il devient le président.
Leduc sera de plus en plus le peintre de la seule lumière et ne cessera de redire son admiration pour Rothko et Albers qu’il considère comme les pères de ce type de recherche picturale. En 1980, soit dix ans après une première rétrospective de l’ensemble du travail de Leduc, le Musée d’art contemporain de Montréal présente une exposition consacrée à sa seule production des années soixante-dix, les Microchromies. Elles manifestent la quête du peintre de la « sérénité de la contemplation lumineuse ». Le Musée des beaux-arts de Chartres et le Musée du Nouveau Monde de La Rochelle auront aussi consacré une rétrospective exhaustive à la production de Fernand Leduc de 1943 à 1985. Le Musée national des beaux-arts du Québec a maintenu une relation privilégiée avec l’artiste en organisant des expositions d’envergure en 1966, 1980, 1997 et 2006. Lors de cette dernière, l’artiste promettait le don de plus de 40 œuvres de sa collection personnelle. À l’occasion du redéploiement de ses collections, le MNBAQ consacrera prochainement une de ses salles à l’artiste qui s’est montré ravi de cet honneur, selon un communiqué du musée de Québec.
Pour expliquer sa démarche artistique, Fernand Leduc a les mots les plus justes. En 1987, il déclarait : « En tant qu’artiste, je me situe dans la lignée impressionniste des « peintres de lumière » ». De la gestuelle automatiste des débuts aux toiles monochromes des dernières années, c’est cette recherche de la lumière par la couleur qui a constamment animé l’artiste.
Il reçoit le Prix Lynch-Staunton en 1977, le Prix Louis-Philippe-Hébert en 1978, et le Prix Paul-Émile Borduas en 1988. En 2007, il reçoit le Prix du Gouverneur général en arts visuels et en arts médiatiques.
Le MNBAQ et le Club des collectionneurs en arts visuels de Québec devaient présenter une rencontre exceptionnelle avec Fernand Leduc, grand maître de l’art non figuratif du Québec, le 17 mars prochain. L’artiste de 97 ans est malheureusement décédé le 28 janvier dernier. Le Club des collectionneurs en arts visuels de Québec souhaiterait toutefois maintenir cette soirée et rendre hommage à ce grand artiste, signataire du Refus global, ayant traversé le siècle et ayant marqué l’histoire de l’art du Québec avec une œuvre colossale. Plus de détails suivront.