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La petite noirceur de P.K. Subban

Le monde du sport obéit à ses propres règles. C’est un monde où il n’existe aucun homosexuel hors placard et où il est légal de se varger dessus à tour de bras. C’est aussi un écosystème médiatique qui n’a besoin que de peu de contenu pour s’alimenter. Il reste qu’il y a des jours où les nouvelles sont moins abondantes et le journaliste sportif ne peut se rabattre sur la météo et les nouvelles internationales comme le font les médias généralistes pour alimenter la bête.

C’est particulièrement le cas lorsque par les hasards du calendrier, Canadien ne joue pas pendant trois ou quatre jours de suite. Une de ces situations nous a donné l’an passé ce que l’on pourrait qualifier de « chandail-à-terre-gate » : alors que l’équipe était en congé pendant quatre jours, les médias on fait tout un plat du fait que P.K. Subban ait lancé son chandail à côté du panier de linge sale dans le vestiaire pour subir ensuite l’opprobre de son coéquipier Hal Gill. Yvon Pedneault avait bien pris le temps d’expliquer que même sa femme ne lui permet pas de pitcher ses bobettes n’importe où dans leur chambre. Voilà de quoi divertir l’auditeur.

Nous vivons en ce moment une de ces périodes creuses. L’équipe n’a pas joué depuis samedi et le prochain match aura lieu mercredi. Le sujet de l’heure ? Faut-il échanger P.K. Subban. D’où sort-il, ce sujet ? De la conjugaison du jeu décousu de Subban et de la médiocrité de l’équipe, mais urtout, de l’apparence de concertation des experts qui estiment qu’il s’agit d’un sujet d’actualité. Il faut rebâtir sur du neuf et même si Subban est passablement neuf, sa valeur marchande pourrait permettre à l’équipe d’aller chercher du neuf encore meilleur, nous explique-t-on.

Il faut dire que l’organisation assez conservatrice de Canadien n’aime pas les joueurs extravagants et que Subban l’est particulièrement.

Mais selon Georges Laraque, l’homme derrière le révolutionnaire JuiceXtra, Subban est victime d’un traitement de défaveur de la part des médias, traitement que ses coéquipiers n’ont pas à subir : « Cammalleri dans les pratiques, y’était pire. lui il se battait avec Lapierre, il slashait tout le monde, on en parlait jamais […] Cammalleri c’était un des pires, pis là aujourd’hui P.K. chaque fois qu’il fait une petite erreur, on saute dessus on l’achale, P.K. ci, ça, ci, y’est pas fin, égoïste… tout ce qu’on entend, ça a pas de sens« , rappelait récemment Laraque aux 4000 auditeurs de TVA Sports.

Certains seraient tentés de faire des liens dans leurs têtes entre la complicité de Laraque et Subban et la couleur de leur peau. D’autres comme Michel Langevin n’hésitent pas à les faire devant la caméra, déclarant que la seule raison pour laquelle Laraque défend Subban, « c’est parce que t’as la même couleur de peau que lui, j’suis sûr de ça« . Évidemment, on parle ici de deux collègues et amis qui se taquinent sur un plateau de télé et il serait mal avisé d’y voir autre chose. Et je ne dis pas ça parce que Langevin est blanc et moi aussi.

Selon Jean Perron, les frasques de Subban auraient peut-être quelque chose à voir avec la couleur de sa peau : « je sais que les noirs en général sont des personnes très émotives, mais lui peut-être qu’y’en met un p’tit peu trop que le client en demande« . Il faut dire que Perron n’est pas que le maître des perronismes, mais aussi le champion de la généralisation sur l’origine des joueurs.

Ces commentaires d’un passé récent on fait en sorte qu’il n’est plus risqué de lancer des rumeurs de transaction à qui mieux-mieux. Mais les distractions que cause Subban feront-elles en sorte qu’il sera échangé ? On peut en douter, mais elles font assurément en sorte que nos médias sportifs aient de quoi à se mettre sous la dent (et moi aussi, en passant) pour se sortir de la petite noirceur que leur impose le calendrier…