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La police chez les Schtroumpfs

Parfois, certaines séries BD semblent se remettre au « goût du jour » en s’attaquant à des problématiques bien actuelles. Ce fut le cas avec Lucky Luke contre Pinkerton, il y a quelques années. C’est aussi le cas avec Les Schtroumpfs de l’ordre, récemment publié chez Lombard. Dans ce nouvel opus de la populaire série de Peyo, ce sont les excès du droit et de l’ordre, et de ce fait, le concept de répression policière, qui s’introduisent dans le village de ces petites créatures bleues.

Comme l’on fait remarquer certains, ce n’est pas la première fois que le politique ou le social s’invite dans l’univers des Schmtroupfs : on n’a qu’à penser à Schtroumpf vert et vert Schtroumpf, Les Schtroumpfs olympiques ou encore Le Schtroumpfissime. Cette volonté est celle du fils de Peyo, Thierry Culliford (qui coscénarise avec Alain Jost), qui a repris les rênes de la série en 1992 : « Le village des Schtroumpfs se fait plus explicitement métaphore du réel », dira-t-il en entrevue à l’AFP.

Dans ce nouveau tome (le trentième, en fait), les Schtroumpfs sont confrontés au relatif manque de règles qui encadrent leur société, basée sur la bonne entente et sur la bonne volonté du Grand Schtroumpf de régler les conflits qui parfois s’enveniment. Fatigué de cette responsabilité, le Grand Schtroumpf propose à son petit peuple de se réunir pour rédiger un « code de vie » qui dictera ce qui est acceptable ou non dans le village. Question d’assurer, hors de l’arbitrage de leur leader, la paix et l’ordre dans le village, quitte à sacrifier un tantinet de liberté. Une fois le code rédigé, les créatures se heurtent à un défi de taille : difficile de s’assurer du respect de ces règles, complexes de par leur nombre.

Résultat : on crée la police des Schtroumpfs, et on impose des amendes salées (payées en noisettes), aux contrevenants.

C’est l’intellectuel Schtroumpf à lunette qui assurera le maintien de l’ensemble, avec l’appui de la force brute du Schtroumpf costaud. Rapidement, les amendes suivent. À l’excès : on en vient à créer un entrepôt pour conserver les noisettes confisquées! Le tout accompagné de soupçons de corruption… D’une société libre, les Schtroumpfs se retrouvent dans un état policier. Et, de l’intérieur, un Schtroumpf anonyme tentera de déstabiliser le pouvoir en place par des graffitis et des slogans qui mettent l’emphase sur la présence, dans le groupe, d’une opposition à ces forces. Bref : le conte d’une dérive démarrée par de bonnes intentions (dont, incidemment, l’on sait que l’Enfer est pavé).

De manière générale, Les Schtroumpfs de l’ordre est une agréable addition à la série. Un volet aux connotations sociales accentuées qui en restant fidèle dans le ton ou dans le trait (dessins de Jeroen De Coninck) à l’esprit « bon enfant » de la série. Cela, malgré une seconde partie qui tend à s’essouffler.

Et, disons que le tout risque, pour certains lecteurs, de prendre des connotations plus particulières, selon le regard qu’ils portent sur le contexte social actuel…