Unrehearsed Beauty / Le Génie des autres : Écoute active
Scène

Unrehearsed Beauty / Le Génie des autres : Écoute active

Le projet de la compagnie PME est ambitieux et risqué: il s’agit d’une tentative de théâtre-forum bilingue, durant laquelle le public est invité à grimper sur scène pour s’exprimer sur un peu n’importe quoi.

On ne peut pas avoir du génie tous les soirs. Certaines représentations d’Unrehearsed Beauty – Le Génie des autres donnent peut-être lieu à des moments de grâce, qui sait. Le projet de la compagnie PME est ambitieux et risqué: il s’agit d’une tentative de théâtre-forum bilingue, durant laquelle le public est invité à grimper sur scène pour s’exprimer sur un peu n’importe quoi. Sauf que le soir de la première, l’assistance est restée pétrifiée, quasi muette. Le Torontois Jacob Wren et sa bande ne sont malheureusement pas parvenus à créer le climat de confiance nécessaire aux confidences.

Ce qui ne veut pas dire qu’on s’ennuie durant l’heure et demie passée au Mai, transformé en cabaret. D’entrée de jeu, les comédiens-concepteurs (certains de Montréal, d’autres de Toronto) nous préviennent que, pour eux, le théâtre est un espace où les idées peuvent être échangées librement, une des dernières tribunes à l’heure de la concentration des médias. Et qu’il y aura forcément des moments de silence si personne ne se délie la langue. L’an dernier, au Carrefour international de théâtre de Québec, des spectateurs ont semé l’émoi en prenant la parole… pour accuser l’équipe de ne pas faire du théâtre, et d’usurper les subventions des "vrais" artistes! Le public est donc en droit de s’attendre à tout…

Sur la scène, des instruments de musique et des micros. Les acteurs, eux, sont assis dans la salle. Ça commence par une chanson, pour se poursuivre en jam musical, entrecoupé de séances d’"open mic" plus ou moins intéressantes. Plus: une comédienne raconte que lorsque des amis l’invitent à la maison, il lui arrive trop souvent de se quereller au repas avec le père de la famille, sur des questions économiques. Moins: des questions du genre "vous sentez-vous seuls?" lancées à un auditoire médusé. Saluons l’effort des comédiens-improvisateurs-musiciens: Martin Bélanger, Samuel Roy-Bois, Simone Moir, Tracy Wright et Jacob Wren, grand manitou du projet, à qui l’on doit aussi En français comme en anglais, it’s easy to criticize. Si leurs propos manquent de profondeur, leur performance a le mérite d’être énergique et amusante, au micro comme à la guitare, à la batterie ou au synthétiseur.

La beauté ne se commande pas, elle surgit (parfois) spontanément, croient les membres du collectif, qui s’apprêtent à partir pour Hambourg et Berlin. On peut leur reprocher le peu de contenu de cette désarçonnante expérience, ainsi que le malaise créé par les moments de silence; mais il ne faut pas oublier qu’il suffirait de prendre la parole pour que les choses s’améliorent…

Jusqu’au 23 novembre
Au Mai (Montréal, arts interculturels)