Le Déclin des soleils de glace : Quand la routine broie…
Scène

Le Déclin des soleils de glace : Quand la routine broie…

Alors que son sujet est l’engoncement dans une routine jusqu’à la déchéance, Le Déclin des soleils de glace du Théâtre À bout portant pourrait aussi se lire comme une illustration du poids du monde s’accentuant avec les années.

C’est à une oeuvre aux possibilités de lecture multiples que nous convient Vicky Côté et son Théâtre À bout portant. Un solo qui, par ses images, crée de nombreuses pistes de réflexion: le réconfort des convenances et des habitudes; la perte d’autonomie, qu’elle soit due à un accident ou à la vieillesse; les méfaits sournois du rendement; le mal-être… Du coup, la structure dramaturgique (rendue muette) acquiert une (fausse) souplesse qui peut confondre le spectateur avide de linéarité simple.

Dans Le Déclin des soleils de glace, Vicky Côté met à profit son expérience pour transformer son corps en principal vecteur de cette production. Proches du monde du mime, ses expressions et sa gestualité rappellent l’art des grands maîtres Deburau, Lecoq et Decroux.

Construits à même le quotidien d’une travailleuse de bureau – de son lever au coucher -, les numéros enchaînés par Côté focalisent sur l’essentiel des actions journalières (étirements, repas, déplacements, rendement, loisirs), décortiquant les différentes phases d’une vie trop bien rangée. Cette réduction (dans le sens de concentration) se déploie avec minutie sous une installation d’apparence assez simpliste: dans un cadre dessiné au sol, un minuscule coin cumule les fonctions personnelles alors que son opposé correspond au milieu de travail, représenté notamment par une dactylo et un jeu d’engrenages prêt à déraper.

Entre ces deux pôles s’installe une routine alors que, peu à peu, les membres du personnage font défaut jusqu’à ce que des prothèses prennent le relais… c’est dire que la contrainte est remplacée par une autre, tout aussi aliénante que rigide. Et la défaillance guette…

"Et si c’était pas ça, la vie", se demande l’auteure, metteure en scène et interprète… À quelques reprises, son personnage ose mettre le pied hors du cadre imposé pour s’adonner à des activités disons plus libératrices, mais celles-ci seront vaines et la ramèneront, toujours plus soumise, à son écrasante routine, qui se referme littéralement sur elle-même. On ne profite jamais assez de ce qu’on a…

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