Wildside Festival / Entrevue avec Kat Sandler : Delicacy, ou le sexe décivilisé
Scène

Wildside Festival / Entrevue avec Kat Sandler : Delicacy, ou le sexe décivilisé

En début d’année à Montréal, le Wildside festival offre un regard sur la jeune scène anglomontréalaise et sur quelques productions canadiennes d’intérêt. La Torontoise Kat Sandler s’amène avec Delicacy, une pièce sexy mais incisive. Conversation.

Directrice artistique du Brouhaha Theatre, compagnie fondée en 2011 dans la Ville-Reine, Kat Sandler est une enfant de la télé. Ses références en fiction lui viennent davantage de HBO que de la dramaturgie grecque antique. Et elle en parle sans complexes. «Au Brouhaha, dit-elle, on veut faire du théâtre accessible, que nous aimons appeler un théâtre pour la génération HBO, donc un théâtre qui assume son penchant télévisuel et qui tente de se coller aux frissons que procurent les meilleures séries de fiction. Puisqu’on est dans une époque géniale pour les séries télé et que notre génération a grandi à travers cette puissante narration télévisuelle, nous voulons en injecter une part dans le théâtre que nous faisons.  On travaille des dialogues rythmés, des intrigues enlevantes, à travers une narrativité hyper-structurée et complexe, dans des pièces de 90 minutes maximum.»

Voilà qui est clair. Avec les comédiens Andy Trithardt, Tennille Read, Kelly McCormack, Kaleb Alexander, la metteure en scène invente un théâtre plutôt réaliste, mais qui fraie avec la comédie sombre, avec un humour noir qui est par moments très incisif. «Le réalisme est donc central dans notre travail, dit-elle, mais il n’empêche pas la mise en œuvre d’un certain imaginaire et l’apparition de touches d’absurde.»

Et surtout, même si son titre évoque la délicatesse et la tendresse, le spectacle traite de sexe sans faux-fuyants. Faisant se rencontrer des couples issus de milieux différents (ou de classes sociales différentes), dans un contexte sexuel, Kat Sandler questionne la perversité humaine, qui rassemble indéniablement toutes les couches sociales même si ça ne se fait pas toujours sans heurts.

«Le premier couple est prospère et urbain, explique-t-elle, alors que le deuxième est banlieusard et moins fortuné. Le premier est un couple blanc, l’autre est interracial. Ils se rencontrent dans un club échangiste, puis tenteront, deux semaines plus tard, de recréer la même charge sexuelle et la même magie dans le condo urbain. Or, une fois sortis de l’anonymat du club, la chimie sera moins facile à créer. »

Parfois comparée au Dieu du Carnage, de Yasmina Reza, ou à certaines pièces de Virginia Woolf, cette pièce orchestre un dévoilement des pulsions sombres et vicieuses chez des personnages en apparence civilisés et impeccables.  «Le spectacle aborde aussi le besoin de fantaisie sexuelle, dit Kat Sandler, et se demande s’il peut être compatible avec la sécurité et le confort recherché dans le couple traditionnel.»

Est-ce pour autant un spectacle pour adultes avertis? «Personne n’aura de sexe explicite sur scène. Je pense que ce qui est suggéré, ce qui est laissé à l’imagination du spectateur, est toujours plus érotisant que le sexe explicite, du moins sur une scène de théâtre. Nous nous intéressons à l’intimité et tentons  de repousser les limites de l’intimité sur scène, mais nous ne pensons pas que la nudité intégrale ou les simulations sexuelles radicales soient le moyen d’y arriver. Le spectacle est toutefois indéniablement sexy!»

Du 13 au 17 février au Centaur
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*Spectacle en anglais