G-Money au Zoofest : Le roi de Laval
ZOOFEST 2015

G-Money au Zoofest : Le roi de Laval

Petit gangstérisme, gros swag et gros bling bling sont dans la mire de Guillaume Choquette, qui invente dans la pièce G-Money un personnage de rappeur adulescent  qui gère du gros cash sale à Laval. Entrevue.

On le surnomme G-Money, il a 29 ans et il vit désormais à Laval même si, se vante-t-il, il est un pur Montréalais. Se racontant dans une langue rythmée, proche du spoken word, et mêlant son parcours à celui des missions  virtuelles auxquelles il s’adonne dans un jeu vidéo, G-Money est un ado rappeur et pseudo-gangster dans un corps d’adulte. Il vit de petits trafics et de petite criminalité, tentant de faire la loi dans un Laval de bitume.

Après King Dave, d’Alexandre Goyette, voici un autre solo théâtral sur l’engrenage criminel dans lequel s’enfonce un jeune du nord de Montréal, dans une langue qui claque et dans un rythme hachuré. Guillaume B. Choquette n’a pas vu le spectacle à succès de Goyette, mais il a lu la pièce et admet que son univers fait écho à celui de King Dave (dont l’adaptation cinématographique a été tournée récemment). «Sans aucun doute, Alexandre Goyette et moi avons côtoyé le même genre de monde pendant notre adolescence dans Ahuntsic et avons vu chez ce monde-là une forte théâtralité. Mon texte diffère du sien dans la mesure où il est plus humoristique et qu’il s’intéresse à la construction identitaire factice du personnage davantage qu’à sa descente aux enfers. Mais je pense que, tous les deux, nous avons vu le potentiel dramatique et voulu explorer la puissance de la parole chez une certaine catégorie de petits gangsters de ces quartiers-là.»

Crédti: Amine Chérif
Crédti: Amine Chérif

 

«Ce que je mets en lumière de manière humoristique, poursuit-il, c’est le pseudo-gangstérisme, l’exubérance, le swag, les paradoxes de ce personnage qui est un Caucasien moyen, né de parents pure-laine, et qui se construit de toutes pièces une personnalité empruntée à la culture afro-américaine. Je veux exploiter le pathétisme de ce personnage sans non plus rire de lui, en glissant peu à peu vers un ton plus sérieux, plus dramatique. Il y a un drame derrière le fait que ces adulescents de 29 ans continuent à avoir le swag du gangster en vieillissant: il y a une forme de prison dans ce personnage qui ne s’éteint jamais.»

Guillaume B. Choquette se défend toutefois de porter un jugement hautain sur son personnage, dans lequel il dit se reconnaître beaucoup. «Je l’ai aussi construit à partir de moi-même. À 29 ans, j’ai les mêmes questionnements de lui sur mon parcours et sur le fait que je tarde à me sentir vraiment adulte. Comment devenir un homme? Que fais-je de ma vie?»

G-Money, c’est aussi un jeune homme affichant de façon ostentatoire sa richesse matérielle et se targuant de faire beaucoup d’argent avec ses petites transactions de cocaïne. Mais encore là, beaucoup de bluff. «Je m’amuse à tourner en dérision ce culte du cash, très présent dans la culture hip hop que G-Money cherche à reproduire,  même s’il est toujours cassé et vit chez sa mère.»

Adepte d’un théâtre qui va droit au but et épris du conte urbain, «une forme simple mais porteuse d’une théâtralité forte», Guillaume B. Choquette a écrit un monologue dont la langue est évidemment finement travaillée. Tissée d’anglicismes et de slang, elle est aussi striée d’images fortes. «Je suis à la recherche d’une certaine poésie à travers cette langue vernaculaire proche du rap. Je me sens proche du slang, même si ce n’est pas exactement ce que je fais. C’est en tout cas une langue éminemment théâtrale, très construite, qui n’essaie pas tout le temps d’être réaliste même si elle part du réel.»

Du 10 juillet au 1er août au Théâtre La Chapelle, dans le cadre du Zoofest