Société

Serge Galam : Coup de froid

"La Terre ne se réchauffe pas, elle se refroidit!" soutient dans un essai-choc iconoclaste un scientifique français réputé, le physicien Serge Galam, chercheur au CNRS et à l’École Polytechnique de Paris.

Voir: Selon vous, aucun scientifique "honnête et sérieux" n’a encore prouvé qu’il existe réellement un lien causal entre le réchauffement climatique et la production de gaz carbonique par l’homme.

Serge Galam: "Aujourd’hui, les plus hautes instances scientifiques internationales, notamment les scientifiques membres du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) de l’ONU – le principal groupe de recherche scientifique international chargé d’étudier les évolutions climatiques de la Terre -, sont unanimes: le réchauffement climatique global actuel est la résultante directe de l’augmentation de l’effet de serre, lui-même provoqué par l’accroissement anormal de CO2 dans l’atmosphère. Donc, l’homme est l’unique responsable de ce phénomène écologique délétère. C’est à partir de ce postulat qu’a été élaboré le plan de Kyoto. Or, aucun scientifique honnête ne peut prouver que l’homme est le seul responsable du réchauffement planétaire. Aujourd’hui, l’homme est cloué au pilori simplement parce que, jusqu’à présent, on n’a pas trouvé un autre coupable et aussi parce que toutes les apparences sont contre lui!"

D’après vous, ces dernières années, la Terre s’est refroidie et non réchauffée. Une observation très surprenante.

"Les données climatologiques relatives au réchauffement climatique s’étalent sur les périodes 1850-1940 et 1978-1998. Il y a eu ensuite un plateau pour 1998-2007. Or, des données très récentes sur la moitié de 2008 indiquent au contraire un net refroidissement de la Terre. Cependant, ce refroidissement étant très limité en durée, on ne peut pas dégager une tendance définitive. Ces données parcellaires, qui se situent à contre-courant de la certitude dominante en matière de climatologie, ne nous permettent pas de tirer des conclusions précises ni définitives. Il est aussi trop tôt pour affirmer avec une assurance inébranlable, comme le font actuellement la majorité des climatologues, qu’on se dirige inéluctablement vers un réchauffement planétaire. Le fait que les données portant sur la moitié de 2008 indiquent un refroidissement de la Terre montre bien la complexité de ce phénomène. Ce n’est pas après dix ans de réchauffement qu’on peut conclure que cette tendance est imparable. Ce qui est certain, c’est qu’on a des fluctuations importantes. Mais une fluctuation ne veut pas dire une tendance définitive. La majorité des climatologues ont beaucoup de mal à accepter cette idée."

Vous remettez en question le degré de fiabilité des modèles utilisés par les climatologues pour établir leurs prévisions.

"La posture prise par les climatologues dans le débat sur le réchauffement climatique pose un problème grave de rigueur scientifique. Je ne dis pas que les modèles des climatologues sont faux. Je dis que tout modèle contient une grande part d’incertitude dépendant des connaissances disponibles du moment. Par conséquent, on ne peut pas bouleverser l’avenir sur l’unique foi des résultats de ces modèles. Lorsqu’il s’agit d’inférer un résultat global à partir d’une collection de données diverses, éparpillées et incomplètes, il est impossible d’en garantir l’interprétation. Il faut donc poursuivre les recherches."

On a l’impression que vous vous souciez comme d’une guigne de la pollution de la Terre.

"Qu’on me comprenne bien, je ne suis pas contre la réduction des émissions de CO2. Mais je crois qu’il y a une très grande différence entre la nécessaire lutte contre la pollution et son instrumentalisation à des fins politico-idéologiques. Le paradoxe dans cette affaire, pathétique et un peu kafkaïen, c’est que le combat anti-CO2 humain a été principalement soutenu et propagé, avec un certain succès, par les anticapitalistes libéraux. Ce combat est en train de fournir au monde capitaliste occidental le paradigme parfait pour sauver sa suprématie en sortant de son cadre de libre marché pour, au nom d’une valeur suprême, affronter ses nouveaux grands rivaux, des puissances émergentes comme la Chine et l’Inde, qui se soucient très peu de la réduction des gaz à effet de serre. C’est ce que proposent les anticapitalistes libéraux pour sauver la planète. Ainsi, la lutte contre la pollution sera un stratagème pour se positionner avec force dans le nouvel ordre capitaliste mondial qui émergera du tsunami financier qui vient de décimer l’économie mondiale."

Les scientifiques ont perdu le Nord. Réflexions sur le réchauffement climatique
de Serge Galam
Éd. Plon, 2009, 206 p.