Françoise David : Ceci n’est pas une commande politique
Du port du voile à la question nationale, en passant par le gaz de schiste, Françoise David livre un peu d’elle et beaucoup de ses idées dans De colère et d’espoir, livre-OVNI aux résonances très actuelles. Le bonheur est toujours une idée neuve.
Elle aurait pu appeler son livre D’espoir. En fait de colère, Françoise David a plutôt l’air serein en enchaînant les entrevues pour présenter son bébé: un livre en cinq chapitres, ou plutôt un "carnet", dira-t-elle, dans lequel la militante tente de "ramener sur le plancher des vaches" les dossiers chauds qu’elle connaît bien: laïcité, souveraineté, gaz de schiste et dérives minières, place du service public et système politique québécois. "Je m’adresse à tous ceux qui s’inquiètent et souhaitent des changements, mais ne voient pas nécessairement où trouver des pistes de réponses." Autant de sujets auxquels la femme de terrain s’est frottée de près et qu’elle raconte littéralement, à travers des histoires croisées en chemin, des "expériences personnelles pour apporter une réflexion collective".
Le livre, Françoise David l’a voulu pour "s’éloigner un temps de la frénésie politique, après deux ans d’Option citoyenne et cinq ans de Québec solidaire". Un processus d’écriture qui a débuté à la veille des révoltes arabes et s’est achevé avec le début du mouvement des Indignés. "C’est le même état d’esprit, souffle-t-elle, même si c’est très générationnel comme mode d’action. Évidemment, moi, si je fais du camping, il faudra que ce soit mieux organisé!" Rires. "Enfin, je suis allée les voir et j’y retournerai. Je suis très fière de voir que le Québec a engendré ces enfants-là." Maternelle, Françoise. Mais pas joviale. "Si j’étais jovialiste, je militerais pour le collectivisme et le parti unique. Et on sait ce que ça a donné…"
N’empêche. Dans le livre comme en entrevue, elle s’enthousiasme pour les "bâtisseurs", est impressionnée par la "saine colère et l’intelligence" des propos tenus par les habitants de Saint-Hyacinthe face à l’industrie du gaz de schiste, s’émeut du "regard pétillant" d’une femme voilée. À propos du voile, elle s’insurge, aussi, contre le "mépris" des radicaux, y compris dans son propre camp, le manque de curiosité de certains journalistes ou médias, qu’elle refusera de nommer, et la simplification outrancière: "Il faut arrêter de faire porter le débat de la laïcité sur cette seule question."
Pas méchante mais pas complaisante, Françoise David égratigne au passage le Parti Québécois – "à l’époque [elle avait 20 ans], je le trouvais tellement mou, alors qu’il était déjà tellement mieux que plus tard…" -, François Legault, qui veut "charcuter à la tronçonneuse la gestion des hôpitaux pour des raisons d’efficacité", ou encore les "bandits qui nous volent nos richesses".
De colère et d’espoir, c’est un peu de la militante, de la femme et de la politicienne. Un peu tout, un peu rien parfois, comme ce chapitre dans lequel elle raconte le milieu dans lequel elle a grandi, le père cardiologue et avant-gardiste, la mère ultracatholique et proche des artistes: "J’ai ma vie privée, bien sûr, nous dit-elle, mais l’engagement est une chose forte dans ma vie. Pas un sacrifice, un plaisir, enfin pas tout le temps, mais le plus souvent…"
Profondément humaniste, Françoise David, mais pas mère Teresa. Elle martèle que le livre "n’est pas une commande politique", avant de concéder, tout de même, que sa parution n’est pas étrangère au climat préélectoral: "On le pense tous qu’il va y avoir des élections en 2012, même si monsieur Charest est capable de faire traîner les choses longtemps…" Et d’afficher clairement ses intentions en conclusion de l’ouvrage: "Et j’en serai, de ces élections québécoises. Devenir députée serait pour moi une grande responsabilité, un honneur et un bonheur."
De colère et d’espoir
de Françoise David
Éd. Écosociété, 2011, 210 p.
Je me souviens avoir rencontré Françoise David il y a un peu plus de 15 ans lors d’une émission de Droit de Paroles animé par Anne-Marie Dussault, à l’époque.
La dame était du côté gauche de l’auditoire et j’étais sur la droite, comme on a l’habitude de diviser le panel des intervenant dans la formule télévisuelle de cet émission de Télé-Québec.
C’était à l’époque durant laquelle le PQ était au pouvoir. Comme quoi, madame David n’a pas des doutes envers le Parti Québécois depuis sept ans seulement.
Je me souviens que le gouvernement Landry était en train de prendre les Québécois dans un feu croisé de mesures d’austérité à la sauce péquiste.
Le fameux « déficit zéro » battait son plein. Le terme « consensus » remplaçait le « changement » en tant que mot politique à la mode. Un peu comme les « indignés » d’aujourd’hui rivalise d’omniprésence avec les « lucides » d’il y a quelques années.
Bref, tout ça pour dire que madame David et moi avons été les deux seules personnes à dévoiler notre salaire annuel en ondes.
Il s’agissait d’une émission sur le débat que Bernard Landry avait lancé dans les médias: dresser les assistés sociaux contre les travailleurs au salaire minimum.
Et tout cela faisait partie d’une belle stratégie du gouvernement de Lucien Bouchard pour tenir la classe moyenne nationaliste en respect.
Ainsi, après avoir fait des coupes sévères en Santé (première cible, les malades), stigmatisé les assistés sociaux avec le resserrement des règles du bien-être social chez les jeunes (deuxième cible, les jeunes défavorisés), le gouvernement de l’époque pouvait dormir tranquille et ne pas s’attendre à une rebuffade trop sévère de la part de la classe moyenne. CQFD.
Et c’est ainsi que j’ai participé à un débat au cours duquel le président de l’association de la petite et moyenne entreprise du Québec, assis direct à ma gauche, a failli tomber en bas de sa chaise lorsque j’ai sorti en ondes que le gouvernement du Québec et du Canada m’avait imposé à hauteur de 400$ pour avoir gagné la mirobolante somme de 10 000$ et des poussières durant une année fiscale.
Rapidement, par contre, durant l’émission, je me suis aperçu, devant les jérémiades des gens à l’encontre des assistés-sociaux qu’ont jugeait « gras-durs » (le plan de communication du gouvernement fonctionnait à merveille), que toute cette mascarade de relations publiques assistés (involontairement) par un média d’état ne visait qu’à frapper les assistés-sociaux en prenant appui sur la détresse des employés à faible revenu afin de « couper dans le gras » en toute quiétude.
Le problème c’est que, issu d’une famille de 10 enfants ayant à sa tête une femme sur l’assistance-sociale, je me suis senti obligé de dire en ondes que je n’étais absolument pas contre les déductions faites sur mon petit chèque de paie chaque semaine afin que des gens dans le besoin ait un « revenu minimal garanti » pour survivre. Mon seul problème provenait du système de répartition de la richesse, qu’on appelle aussi rapport d’impôts dans les milieux très peu avertis, qui me taxait d’un 400$ supplémentaires sous prétexte que je n’avais pas investis dans des RÉER, pris femme et foyer durant l’année fiscale concernée.
Enfin, tout ce long détour pour dire que Françoise David, assise près d’un enseignant en économie à l’université, est venue me voir après l’émission pour discuter avec le seul invité assez con pour dévoiler son salaire ridicule en ondes.
Madame David étudiait à l’université l’économie à l’époque pour combler une lacune que les « lucides » de l’époque reprochait à la Gauche en ce temps-là : le manque de réalisme chiffré et le manque de sérieux pour aborder les problèmes complexes de l’économie du Québec.
Ce fût une discussion intéressante à bien des points de vue. Une rencontre marquante qui s’était terminé par une invitation à m’impliquer en politique, disait la présidente de la Fédération des Femmes du Québec à l’époque.
Ce que je fis. À mon grand regret et à mon grand désarroi.
J’observe aujourd’hui que les positions sont maintenant inversée et je suis heureux de saluer publiquement l’implication de madame David sur la scène politique québécoise.
Son engagement de longue date pour une cause qui l’honore (la Justice sociale) depuis si longtemps ne peut être qu’une bonne nouvelle pour nous tous et, surtout, les électeurs du comté de Gouin.
Alors, je termine là-dessus mon commentaire-fleuve en lui remettant son invitation à ne pas lâcher et… je lui répète ce qu’elle m’avait dit également: le Québec a besoin de gens comme vous pour que la société dans laquelle nous vivons ne soit pas le terroir du capitalisme sauvage à l’intérieur duquel seul l’intérêt individuel est défendu, au détriment du bien commun.
Bonne chance! Good luck!
Je me souviens d’avoir entendu Madame David lors d’une conférence pour la journée mondiale des femmes il y a 2 ans.
C’est avec elle que j’ai appris que masculinisme et féminisme s’opposent l’une envers l’autre et elle nous invitait à prendre le parti du féminisme, où son sexe aurait des privilèges bien enchâssés dans les lois. Alors, c’était la proposition d’obliger les milieux à moins de 50% de femmes – visant surtout les CA – d’être contraints d’avoir leur 50% ou plus de femmes que d’hommes.
Mais, à mon avis, aucune de ces deux positions ne me semblent meilleures l’une aussi bien que l’autre.
Je défends donc maintenant une égalité en droits, une égalité qui ne signifie pas de rétablir un système basé sur la discrimination (sur la base de son sexe, sa couleur de peau, son origine, etc. : même si des lobbys peuvent la dire «positive»).
Elle n’est pas à une contradiction près: contre les nominations partisanes, contre la collusion, le copinage qui favorise les amis du parti au pouvoir… mais son parti propose de créer des nouvelles agences/organismes d’État (un Éole-Québec, un Médicament Québec) s’il est élu.
Je mets déjà ma main au feu que, si son parti est au pouvoir, juste pour combler les postes existants et les nouveaux postes créés dans les nouveaux organismes d’État qui s’ajouteront, nous aurons droit à plus de nominations partisanes que jamais auparavant. Les chances d’avoir plus de collusion et de copinage avec les fonds publics devraient aussi augmenter. C’est une situation directement proportionnelle à la taille de l’État.
Memere Théresa