Mon doux que nous sommes un peuple créatif ! Je n’en reviens tout simplement pas. Faut croire que ça faisait longtemps que l’on se taisait, encaissait et ruminait. Et ça parait aujourd’hui ! On se traitait d’indifférent, d’endormi, de désabusé même. Tout revenant du pareil au même, la scène politique n’étant pas drôle, trop de personnages y jouant de mauvais rôles.
Notre espoir, atteint d’une maladie mystérieuse, nos voix couvertes d’un silence indifférent, les hommes de parole, Fred Pellerin ou Emmanuel Bilodeau, entre autres, questionnaient : Où est le projet de société qui va faire résonner nos voix ? Où s’est enfuit notre passion ? Où est l’homme qui va nous rallier ?
Je défie la personne qui aurait pu prédire que cet homme serait Jean Charest ! Il en est pourtant l’initiateur par son intervention de père qui pallie son absence et son entêtement, par un excès d’autorité. Son silence nous anime. Si on s’y arrête deux minutes, particulièrement depuis la loi 78, plus il se tait, et plus le peuple se surpasse en expressions créatives.
On lui doit une fière chandelle ! Il me semble que je l’entends réfléchir voici 3 mois « J’ai les sondages pour moi, je peux leur faire avaler des couleuvres, ils ne s’en rendront même pas compte, ils dorment au gaz. Les analystes, peut-être, mais le peuple lui ne se lève même plus pour aller voter, alors …. profitons-en ! »
Pour l’en remercier, Nathalie Ragheb lui a écrit une lettre d’amour, qui m’a fait sourire de la première à la dernière ligne :
Quoiqu’il en soit, Charest a réveillé le chat qui dort et il s’est avéré un tigre !
Nous assistons à un foisonnement de créativité, et je ne me souviens pas, en 58 ans, en avoir vu et vécu un semblable. Je lis, mais ô combien je lis ces temps-ci, n’arrivant jamais à lire tout ce que j’aimerais lire. Toutes les couches de la société, tous les âges, tous les métiers s’expriment. Des chansons, des vidéos, des affiches, des pancartes, des lettres, des slogans, des caricatures éditoriales, de l’humour & de la fantaise. Certains, et même plusieurs, se font agents de promotion et d’organisation avec talent et ingéniosité. On n’a qu’à penser au prof de St-Hyacinthe qui a initié la parole « tintamarre ». « La cuillère de bois a remplacé la langue de bois ! » (slogan déniché sur Twitter). Et quand je pense que je n’ai pas encore parler de l’emblème affectueux de cette crise, ce compagnon de route, ce protecteur tout en douceur et en câlins : l’AnarchoPanda. Les Zapartistes viennent même de lui composer une tune. Le Devoir lui consacre un article étoffé et plusieurs se déplacent pour lui faire un câlin.
À chaque jour, je découvre des initiatives qui m’arrachent des cris de fierté. C’est nous ça ? On dormait tellement dur que j’avais oublié que nous étions si dynamiques, si intrépides … si désobéissants.
Depuis cinq ans, je lis beaucoup. De la fiction. Mais là que voulez-vous, je délaisse les histoires fictives, si je ne veux pas manquer celle qui s’écrit sous mes yeux. Cette histoire, notre histoire, qui se vit dans la rue parce que le pouvoir change de main.
Wow! comme c’est bien dit! j’en ai des frissons. Je me retrouve totalement dans ce texte!!! moi aussi c’est la créativité qui m’a le plus marqué depuis le début de ces manifestations. Je m’en rend compte principalement sur Facebook. Beaucoup de talent, et d’humour qui sert à désamorcer les tensions grandissantes, et à dédramatiser la situation. Bravo les Québécois!
Ça m’a fait chaud au coeur que vous ayez été ému en me lisant. Je le suis régulièrement ces temps-ci par des textes, des dessins, des photos. Nous nous en montrons de toutes les couleurs !
Libre à vous de lui trouver autant de mérite, à Jean Charest.
Moins il aura voulu faire ce que vous auriez voulu qu’il fasse, plus cela vous l’aura rendu sympathique? Assez bizarre…
Et quand – enfin! – Jean Charest fera peut-être ce que certains auraient voulu qu’il fasse, soit céder un peu du côté de la hausse des frais de scolarité et plutôt refiler le coût à l’ensemble des citoyens (quitte à devoir couper ailleurs dans quelques-uns de leurs services), vous vous lèverez alors spontanément pour l’applaudir à tout rompre?
Et sans oublier les coûts additionnels (qu’il devra aussi refiler à l’ensemble des citoyens) pour réparer toute la casse, pour compenser les revenus perdus depuis des mois et ceux qui seront perdus pour cause de baisse d’achalandage touristique (le temps que Montréal et le Québec se repositionnent sur l’échiquier mondial de l’offre et de la demande), pour payer les heures supplémentaires à plusieurs intervenants du secteur public, et probablement des tas d’autres trucs, vous lui ferez alors de tonnantes ovations?
Très étrange, tout ça.
Claude Perrier : Le plus grand de ses mérites est qu’on l’ait obligé à lâcher son volant à deux seuls mains : les siennes.
L’amour que je lui porte est extrêmement sarcastique, mais ce qui ne l’est nullement est l’admiration pour le système de défense de la population, atteinte par ses mauvaises et ou absences de manoeuvres.
J’espère que tu as raison Venise de dire que le peuple commence à avoir les mains sur le volant, mais j’en doute encore! Mais c’est vrai que ce conflit aura au moins eu l’avantage de démultiplier la créativité, la réflexion et l’engagement social des citoyens endormis. Merci, alors, à M. Charest. Si j’avais su que je dirais ça un jour…
P.S.: l’AnarchoPanda! Il nous a donné cette adorable photo, que j’encadrerais : http://www.ledevoir.com/societe/education/350992/ras-le-bol-des-idees-neoliberales
Ah, mais je ne l’avais pas encore vu cette adorable photo ! Merci de l’apporter à mon attention. Pourtant, j’en ai une, superbe aussi, que j’ai choisie comme fond d’écran.
Ce que j’ai trouvé comique est ce qui est écrit sous la photo dans Le Devoir :
« ce câlinours bicolore suscite une improbable vague de sympathie ». Improbable …. euh … ? Pourquoi improbable ? Inattendue, surprenante, extraordinaire peut-être, mais improbable ? C’est un détail, mais moi et les mots, c’est rarement des détails. J’en accroche un et je démords plus.