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La physique du Deflategate!

ballon

 

Un copain physicien/philosophe et amateur de football m’a suggéré d’écrire ce billet au sujet du Deflategate. Pour ceux qui ne suivent pas l’actualité sportive, il s’agit d’un « scandale » lié à la pression suspecte des ballons de football américain utilisé dans un match de demi-finale entre les Patriots de la Nouvelle-Anglettre et les Colts d’Indianapolis le 18 janvier 2015.

Les règles du football américain exigent que la pression des ballons se situe entre 12,5 et 13,5 psi (86 à 93 kPa). Or, il semblerait que 11 des 12 ballons utilisés par les Patriots en première demie de ce match avaient une pression inférieure jusqu’à 2 psi à cette norme. En théorie, un ballon légèrement dégonflé est plus facile à attraper et à lancer, ce qui est un avantage en phase offensive. Il pourrait donc s’agir d’une tactique pour se donner un avantage injuste.

Cependant, même si la possibilité de manipulation est bien réelle, une explication physique simple est possible. En effet, les ballons sont gonflés à l’intérieur. Une fois à l’extérieur, ils sont soumis aux éléments, ce qui peut faire changer naturellement leur pression. Ce phénomène est décrit par une simple loi de la physique, la loi des gaz parfaits, énoncée par le physicien et ingénieur français Émile Clapeyron en 1834.

Cette dernière s’énonce comme suit :

PV=nRT

P est la pression absolue, V le volume, n la quantité de matière, R la constante des gaz parfaits et T la température absolue.

Il y a ici deux subtilités dont il faut tenir compte dans le calcul. D’une part, on utilise une échelle de température absolue. Dans cette échelle de température, le zéro se trouve à -273,15 °C, ce qui est la température la plus basse qu’il est possible d’atteindre. Dans le système international d’unités, l’unité de mesure est le kelvin (K). Si vous êtes un américain et que vous aimez les systèmes d’unités archaïques, vous pouvez faire ce calcul en degré Rankine!

Il y a aussi une seconde subtilité qui a attrapé plusieurs professeurs de physique qui ont étudié ce problème. En effet, il faut aussi faire les calculs avec la pression absolue. Or, 12,5 psi, c’est la différence de pression entre celle du ballon et celle de l’air ambiant (14,7 psi). La pression interne minimale légale est donc de 27,2 psi. Négliger ce détail, fait sous-estimer l’impact du changement de température d’un facteur 2.

En faisant l’hypothèse, que la température du vestiaire, où ont été gonflés les ballons, était de 24 °C (295 K) et que celle du stade était de 10 °C (283 K), la pression interne du ballon serait passée de 27,2 psi à 25,9 psi. Ce qui donne une pression relative de 11,2 psi, ce  qui explique largement la différence de pression observée.

Mais, la théorie n’est pas tout. C’est pourquoi l’entreprise américaine HeadSmart™Labs a vérifié expérimentalement le phénomène en plaçant des ballons dans des chambres climatiques. Ils ont effectivement observé, la baisse de pression prédite par la loi des gaz parfaits, mais ils ont en plus fait des tests avec des ballons mouillés. En effet, le cuir humide est plus souple et tend à s’étirer, ce qui augmente le volume et fait baisser encore une peu plus la pression (0,75 psi). Au final, c’est une baisse de pression de 1,8 psi en moyenne allant même jusqu’à 1,95 psi dans un cas. La pression hors norme des ballons peut donc s’expliquer entièrement par des effets environnementaux.

Quant à savoir si cela a influencé le résultat du match, il faut savoir qu’à la fin de la première demie, le score était de 17 pour les Patriots, contre 7 pour les Colts. En deuxième demie, alors que les ballons des Patriots étaient gonflés conformément aux normes, ces derniers ont marqué 28 points, pour un score final de 45-7 en leur faveur. Difficile donc d’y voir un quelconque avantage.