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Grève étudiante: Amnistie internationale s’inquiète

 

 

Pendant que le dialogue se poursuit entre la ministre de l’Éducation et les représentants des organisations étudiantes, Amnistie internationale (section Canada francophone) s’inquiète.

Dans un communiqué, AI s’inquiète du recours répété du gouvernement Charest à «des  moyens qui», selon cette organisation, porteraient «potentiellement atteinte à la liberté d’expression et au droit de manifester pacifiquement».

Selon AI, «l’approche choisie pour assurer la sécurité lors des manifestations semble avoir entraîné des violations des droits fondamentaux associés aux manifestations pacifiques et au cours normal de la loi, notamment le droit à la liberté d’expression et le droit de réunion pacifique et d’association, ainsi que le droit d’être protégé contre les arrestations arbitraires».

Puis ceci: «nous réprouvons sans équivoque les actes de voies de fait, de vandalisme et autres actes de violence qui ont été perpétrés par certains individus. Les policiers ont le devoir d’empêcher de tels actes criminels et d’arrêter et d’accuser les personnes sur qui pèsent des motifs raisonnables et probables.

En vertu du droit international concernant les droits humains, néanmoins, il est essentiel que les mesures de sécurité respectent les droits associés aux manifestations pacifiques. Amnistie internationale s’inquiète du fait que les tactiques utilisées par les forces policières face à certains incidents violents et aux manifestations pacifiques, ainsi que les mesures de sécurité adoptées dans certaines universités, soulèvent des questions troublantes sur le respect de ces droits fondamentaux : usage excessif de la force par les autorités policières, arrestations massives et potentiellement arbitraires, intimidation et profilage par des forces de sécurité sur les lieux de l’université.»

AI note également «un recours à un processus de judiciarisation via les injonctions qui obligent à la reprise des cours. Bien que légales, ces injonctions peuvent porter atteinte au droit d’association et d’expression des étudiants en grève».

Et en conclusion: «Amnistie internationale Canada francophone reconnait le droit des manifestants de vouloir protéger pacifiquement le droit à l’éducation. Amnistie rappelle sa préoccupation face à la hausse des frais de scolarité, qui porterait atteinte à la progressivité vers une accessibilité à tous et toutes au cursus universitaire, telle que l’entendent les observations générales sur le Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels auquel le Canada est partie.»

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Or, ce que ce communiqué traduit, dans les faits, est cette même inquiétude que partagent de nombreux Québécois depuis que les images de confrontations et d’escouades anti-émeutes se multiplient dans les bulletins de nouvelles.

D’autant que sans l’impact sur le gouvernement lui-même de la précipitation des événements politiques des derniers jours, il est évident que ce «dialogue» avec les organisations étudiantes n’aurait toujours pas eu lieu.

Quant au phénomène de judiciarisation du conflit, il inquiète également dans la mesure où il fut même utilisé par des étudiants eux-mêmes dans un nouveau combat contre l’exercice de la démocratie au sein des organisations étudiantes elles-mêmes.

Sans compter que dans ces demandes d’injonctions, on a recours à l’argument de la défense des «droits individuels» du côté des étudiants qui contestent la grève. Alors que, dans les faits, ce dont deux droits collectifs qui s’affrontent ici. Soit ceux de la majorité au sein des organisations étudiantes qui ont voté pour le grève et ceux de la minorité qui, malgré la légitimité du vote pris, contestent ces décisions.

Bref, qu’il finisse ou non par se régler sur la question centrale de la hausse des frais de scolarité, ce conflit social majeur laissera des traces au Québec. Et elles ne seront pas nécessairement de souvenir agréable…