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CinéRobothèque 1992-2012

Dès septembre prochain, les locaux qu’occupe présentement la CinéRobothèque de l’ONF seront vacants. En effet, vous le savez sûrement, à cause des coupures de près de 7 millions de dollars du gouvernement canadien dans l’allocation versée à l’ONF, cette belle vitrine sera bientôt chose du passé. Et c’est sans parler des programmes de subventions que l’ONF avait créés afin de venir en aide aux créateurs et qui, eux, ont révisés à la baisse, voire annulés. Qui plus est, 73 postes seront abolis; 74 si on ajoute celui du robot-projectionniste.

Une grosse perte pour Montréal. Bon, vous me direz que le taux de fréquentation avait baissé au cours des dernières années, et vous ajouterez que le site Web de l’ONF offre des fonctionnalités vraiment tripantes. J’acquiesce sans hésiter. Mais il demeure qu’une grande institution culturelle fermera ses portes en septembre à Montréal. Combien en reste-t-il des institutions qui, comme celle-ci, rehausse « l’image de marque » de la ville? Lorsque je visite une ville et que je joue aux touristes en montant dans un de ces autobus rouges, je suis toujours ravi de savoir que tel immeuble abrite quelque 3 000 000 ouvrages, et que tel autre est le premier à utiliser telle technologie. Je veux voir en quoi la ville se différencie des autres.

Je m’imagine même parfois en guide touristique, à Montréal. Comme je serais fier d’expliquer aux touristes japonais ou français que, dans cet immeuble de la rue St-Denis, il y a un robot-projectionniste à qui les visiteurs peuvent commander 1 des 10 000 films disponibles sur place afin de le visionner sur l’un des nombreux postes de visionnement. Et ce que je serais fier d’expliquer à ces mêmes touristes ce qu’est l’Office national du film. Le talent des cinéastes d’animation, des documentaristes et des vidéastes canadiens est reconnu mondialement grâce au support de l’ONF alors il y a de quoi être fier. La présence des locaux sur la rue St-Denis me rassurait, même si je n’y avais pas mis les pieds depuis des années. Idem pour la Cinémathèque qui conserve des dizaines de milliers de documents d’archives relatifs à l’industrie cinématographique et programme des rétrospectives qui fait en sorte qu’on parle de nous à l’étranger. Connaîtra-t-elle le même sort dans quelques années? Ces industries ne doivent pas être fantômes; elles doivent avoir pignon sur rue. On doit pouvoir les voir dans notre quotidien. En tant que Montréalais, et même en tant que Canadien, je veux avoir la possibilité d’entrer à l’ONF afin de visionner L’Affaire Bronswick ou L’homme qui plantait des arbres si je le désire, et je veux pouvoir acheter le DVD de La Mémoire des anges tant qu’à être là. Pensez-y un peu! Si on visitait un tel endroit à Barcelone ou Londres, on voudrait que Montréal fasse la même chose! Or, en ce moment, nous l’avons…

La CinéRobothèque n’était pas qu’une boutique et une salle de cinéma, c’était également un centre de référence, un point d’accès physique au patrimoine cinématographique du Québec et du Canada, et c’était aussi une icône; celle d’une société fière de sa culture, de son cinéma, de ses artisans et de son histoire. Bref, des valeurs collectives qui sont malheureusement devenues obsolètes.