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Maladie gouvernementale

Salut gouvernement provincial.

Tout d’abord, tu dois te dire que c’est n’importe quoi de tutoyer un gouvernement mais justement. On ne se fera pas de cachettes, tu es rendu pas mal n’importe quoi. En fait, sans vouloir insulter personne, la dernière fois que j’ai vu quelque chose qui était aussi n’importe quoi, j’avais 21 ans, j’avais mangé des champignons magiques et je pensais que j’étais en fusion avec mon divan. Tu vois le genre?

Non mais là, l’affaire de faire durer la grève, c’était relativement drôle jusqu’à un certain moment tsé. Même que, ça m’a inspiré des billets de blogue qui ont fait en sorte que des jeunes m’ont reconnu au dépanneur une fois. Si Claude Perrier lisait ça, il la trouverait très bonne.

Reste que tu as fait les choux gras des journalistes en titi. Je le répète, c’était le fun jusqu’à un certain point. Me semble que ça fait longtemps que tout le monde dit qu’il ne se passe rien et puis là, hop, il se passait enfin quelque chose. Tsé, à la limite, c’était divertissant parce mis à part le très désolant accident de l’oeil, y avait pas de morts à l’horizon. On voyait des rues se faire bloquer, des vieux coeurs chiâler que les carrés rouges étaient juste des bébés gâtés pis bla bla bla…

La grève étudiante nous a aussi permis de mieux nous connaître collectivement. Autant dans la rue que dans le cyberespace. C’était comme la première fois depuis longtemps que tout le monde finissait par se sentir interpellé. À un moment ou à un autre. Moi-même j’ai tenté de résister, de me tenir loin de tout ça et puis, je suis tombé dans le piège.

En fait, je ne te mentirai pas, c’était humainement impossible de résister longtemps à tout ça. Tu sais, je donne rarement dans le traitage de crosseurs mais là, ça commence sérieusement à faire.

Tsé, que tu ne veuilles pas bouger de ta position sur les frais de scolarité, je respecte ça. Je ne te dis pas que je suis pour, au contraire même, mais je suis coolax avec ça. En fait, je dis que « je suis » mais en réalité, c’est plutôt le conditionnel que je devrais employer. Je serais cool avec ça si tu avais daigné engager un semblant de négociation, et ce, même en sachant qu’à la fin de celle-ci, tu dirais que c’est impossible de revenir en arrière pis toute le kit.

Ça me choque parce que je le sais que tu le sais que tu aurais pu éviter tout ce psychodrame qui prend une envergure inquiétante. Je sais même que tu l’as toujours su. Écoute, j’ai jamais dirigé une province et je le savais depuis le début. J’ose donc imaginer que toi aussi, tu le savais depuis bien longtemps. Ce qui me fait penser que la dérape collective qui a présentement lieu était une espèce de risque calculé.

Un peu comme à Alma par exemple. Tsé, votre concept de vous laver les mains de la grève étudiante en refilant ça subtilement à l’appareil judiciaire? Ben c’est au Cégep d’Alma que ça a commencé. Si tu savais le bordel que l’injonction a pu faire! Du jour au lendemain, quasiment tout le monde était en sifflet. Les étudiants en faveur de la grève, ceux qui voulaient aller à leurs cours, les profs, les parents, les voisins pis probablement même le Père Noël. Tout ça pour faire plaisir à une coupelle de marionnettistes nébuleux bandés ben durs dans les coulisses à savourer la domination de l’individualisme sur la collectivité.

Tu le sais sûrement, les choses se sont calmées depuis. Après que la présence policière et le contrôle totalitaire des gens qui osaient entrer dans l’école maudite aient traumatisé à peu près tout le monde, il y a eu un vote de reconduction de la grève et évidemment, ça a pas mal calmé l’ardeur de ben du monde.

Naturellement, je n’ai pas pu interroger la totalité des étudiants du Collège d’Alma mais j’ai repéré un curieux mélange de peur, de honte et de désenchantement en jasant avec plusieurs d’entre eux. Ce qui est le plus fascinant, c’est que personne n’a ouvertement exprimé être dans un tel état d’esprit et pourtant, c’est tellement palpable. C’est drôle parce que ça m’a fait penser à la fois où un gars m’avait interpellé dans la rue et m’avait fourré de quarante piastres. Je me rappelle que dans les heures qui avaient suivi, j’étais conscient de m’être fait fourrer mais en même temps, j’essayais désespérément de voir ça sous un autre angle. Genre que c’était un quiproquo.

Je te raconte tout ça parce que j’ai l’impression que ce qui s’est passé à Alma, c’était un vulgaire test. Tu t’es dit: on va prendre un échantillon dans un trou perdu, on va voir ce que notre tactique donne pis si ça marche, on va distribuer notre « produit » à l’échelle de la province. Écoute, je le sais que ça fait pas mal théorie du complot mon affaire mais ça reste que c’est louche.

Une chose est certaine, quand je vois ce qui s’est passé dans les derniers jours à l’UQO, et là, pardonne-moi mon manque de diplomatie, mais je commence à croire qu’il y a des sacrés débiles qui mènent le bal. J’ignore si c’était ton idée mais ça reste que tu l’endosses. Et ça, ça me crisse la chienne.

Ça va être quoi après?

En tout cas, si ton plan était de foutre le bordel ben correct au Québec, t’es vraiment ben parti.

D’ailleurs, bravo pour le coup de l’annonce importante comme quoi vous alliez permettre aux jeunes de s’endetter plus longtemps. C’était vraiment un gagnant/gagnant. D’un côté, les dupes crient hourra! et enrichiront encore plus les banques et de l’autre, tes éternels pourfendeurs risquent juste de voir leur degré d’impatience monter d’un cran. Dans ce temps-là, les chances que l’on perde le contrôle augmentent considérablement, on perd aussi la face et puis, on ne passe pas go. Et surtout, on réclame plein de tickets de 200 dollars!

Tsé, entre toi et moi, on le sait ben que j’en beurre un peu épais. Tu me connais: je t’écris ça pis je suis ben relax devant mon ordi. J’ai pas les yeux exorbités. Je respire calmement. J’ai pas peur. Je capote pas pantoute.

Ça reste que je te trouve juste poche.

Tu présiderais de la sorte un club de philatélie et on te renverrait aussitôt à l’expéditeur.

J’éprouve un sérieux dédain quant à ta lâcheté et ta façon minable de faire de la politique.

Je suis navré par ton leadership de crosseur.

Je ressens du mépris quant à la violence que tu fais naître délibérément de par ton arrogance calculée.

Et j’ai un curieux goût de vomi dans la gueule.