Des universitaires enquêtent
Lucie Sauvé s’intéresse à la question de l’éducation à l’environnement depuis des années, notamment au sein de la Chaire de recherche du Canada en éducation relative à l’environnement à l’UQAM, dont elle est titulaire. Passer de l’environnement à l’alimentation était tout naturel pour elle et son équipe, car image-t-elle, "on mange notre environnement"! "Il y a un engouement pour les questions d’alimentation dans la société, croit Mme Sauvé. Les gens se préoccupent d’avoir une alimentation saine mais aussi responsable, à la fois soucieuse des systèmes écologiques et de l’équité sociale, ce qu’on a nommé l’éco-alimentation."
Actuellement, l’éducation à l’alimentation passe presque entièrement par les organismes sans but lucratif, en marge du système scolaire, constate Mme Sauvé. C’est donc à cette "marge" que son projet sur le sujet, mené durant les cinq dernières années, s’intéresse. Son équipe est allée dénombrer les milieux communautaires oeuvrant en éducation éco-alimentaire et en a constitué un répertoire accessible sur le Web. De ce répertoire, 10 organismes ayant mis sur pied des initiatives particulièrement porteuses font l’objet d’études de cas.
C’est lors du colloque Alimentation, Environnement et Santé qui se tiendra le 15 octobre prochain que ces études de cas seront présentées pour faire ressortir les bons coups, mais aussi les défis et obstacles que rencontrent chaque jour ces organismes. "Nous voulons célébrer ces initiatives québécoises et voir comment on pourrait inspirer des politiques publiques pour le développement d’une éco-alimentation dans notre société", conclut la professeure.
Nutritionniste en cavale!
Le 30 septembre dernier était lancé Tout le monde à table!, un projet des nutritionnistes du centre de référence Web Extenso. Pour une première fois, des nutritionnistes s’invitent à la table des Québécois pour définir leurs habitudes autour des repas. "Habituellement, on se concentre sur le contenu de l’assiette; cette fois, c’est les comportements alimentaires des gens qui nous intéressent, affirme la porte-parole du projet et nutritionniste Nathalie Jobin. Le but est de recueillir des données sur tout ce qui entoure la planification et la préparation du repas familial."
Au coeur du projet, une caravane qui sillonnera tout le Québec cet automne et ce printemps, pour aller à la rencontre des familles. Mme Jobin sera de la partie pour inviter les petits et grands à partager dans un cadre ludique leurs habitudes en famille à l’heure des repas. "Personne ne doit se sentir jugé, ajoute la nutritionniste. Il n’y a pas de bonne réponse! Nous espérons faire réfléchir les gens et créer des discussions entre amis ou en famille sur le sujet."
"Les conclusions seront partagées avec d’autres intervenants, et de là on pourra arriver à déterminer des priorités régionales ou nationales qui pourront contribuer à améliorer la société", explique Mme Jobin. Ceux qui auront manqué le passage de la caravane dans leur région peuvent se rendre directement sur le site Web pour participer à l’enquête.
Montréal alimentaire
À la Conférence régionale des élus de Montréal (CRÉ), la question de l’accès à une alimentation de qualité est au coeur des préoccupations via le comité Nourrir Montréal. "Notre travail se fait sur trois axes principaux, explique Ahmed Benbouzid, directeur du développement social pour la CRÉ: les marchés saisonniers, l’agriculture urbaine et les rencontres montréalimentaires."
Ces rencontres permettent à divers intervenants de se rassembler pour faire un échange d’expertises sur des questions délicates liées à l’alimentation, comme l’achat local, l’alimentation équitable et, récemment, le système alimentaire de Montréal. "Les gens ont de la difficulté à faire des choix éclairés devant la panoplie de produits offerts. Nous avons soulevé la nécessité de se doter de politiques collectives qui permettraient d’avoir un système alimentaire qui respecte l’ensemble des critères par rapport à l’étiquetage et l’approvisionnement, par exemple. Il faudrait aussi insister davantage sur l’éducation dans les écoles et créer des espaces citoyens pour sensibiliser les gens", résume le directeur.
Quoi de mieux que des marchés saisonniers regorgeant de fruits et légumes pour sensibiliser la population aux questions d’achat local et autres défis liés au monde de l’alimentation? Depuis quatre ans, la CRÉ soutient ces initiatives dans divers quartiers de l’île où l’accès aux produits frais n’est pas toujours facile. "Les marchés ont beaucoup de succès et sont très bien reçus par la population; ça permet d’animer les quartiers et de sensibiliser les gens aux bonnes habitudes de vie", conclut M. Benbouzid.