Le petit monde des journalistes culturels québécois était en émoi l’automne dernier. Voyez-vous, un artiste amer ou, mieux encore, un fou furieux à la The Bodyguard nous adressait de curieux commentaires.
Sur la première missive, on pouvait lire « Minable », épelé par des lettres découpées dans un journal (la règle de l’art lorsqu’il est question de lettres anonymes, quoi). Sur la seconde : « Je n’arrêterai pas ».
Pour les « ratés sympathiques » travaillant dans une salle de nouvelles – où on recevait les lettres en doubles, voire en triple – il était évident qu’on avait affaire ici à une campagne promotionnelle aussi osée que maladroite. Pour ceux qui fréquentent moins leurs collègues, par contre, cette chaîne de lettres se faisait plus sombre. Ceux-ci se sentant – l’instant d’un moment – véritablement menacé par un type ou une dame avec beaucoup de journaux, de colle et de temps à perdre…
C’est donc aujourd’hui qu’on a reçu la clé de la voûte : les deux missives étaient liées à la campagne promo de Schizophrène, le nouvel album… d’Anik Jean.
Ayant été nourri par les « comic books » et la lutte WWF – bref, des médias où l’antagonisme est exacerbé à la puissance 12 – j’attendais ce dénouement comme un gamin attend une apparition surprise du Joker ou de l’Undertaker, les « menaces » des lettres roulant sur le train de mon indifférence. Mais c’est aujourd’hui, en recevant l’ultime pièce du puzzle que j’ai finalement été « choqué » par la campagne de Mme Jean Huard (c’est vraiment son nom sur Twitter!).
Dans le communiqué accompagnant son premier « single » – les fans de Muse et de Marie-Mai devraient tendre l’oreille -, on note que la campagne était un moyen d’illustrer ce que peuvent ressentir les victimes d’intimidation…
Ce à quoi je réponds : Me niaises-tu, Anik?
L’intimidation, ce n’est pas une chaîne de lettres qu’on adresse à plusieurs.
L’essence de l’intimidation n’est pas deux lettres numérisées puis ridiculisées sur les médias sociaux.
On n’attend pas avec impatience la suite de l’intimidation, bordel!
Bien que Mme Jean s’est improvisée porte-parole pour plusieurs causes par le passé, la dénonciation de l’intimidation lui va bien mal. On se rappellera la fameuse prise de bec entre son mari et Marc Cassivi qui l’a amenée à associer les journalistes aux violeurs et autres désaxés.
Pendant qu’on y est, la promotion est aussi une facette du métier que la rockeuse ne maîtrise toujours pas. La page Facebook inscrite à la fin du communiqué – on se rappellera que la dame a délaissé Facebook, jugeant que la plateforme nuisait à la musique après avoir vu The Social Network… et je ne blague même pas – mène, en fait, à la page d’Anik Jean, une jeune fille qui semble étudier au Cégep de l’Outaouais. Son site web officiel n’a pas été actualisé depuis octobre 2010 et sa seule réaction Twitter du jour – alors que l’effervescence entourant sa campagne est à son comble – était pour souhaiter bonne fête à David Bowie.
M’enfin, l’album annoncé se veut « concept » et Jean y interprètera quatre personnages, dont Kina, l’interprète et victime de « Minable », ce fameux extrait « dénonçant » l’intimidation de la façon la plus maladroite possible.
MISE À JOUR : En parlant de maladresse, le communiqué ne mentionne même pas que le lancement de l’album se tiendra le 26 février au Club Soda … le même soir – et à moins d’un kilomètre – de l’événement soulignant le dévoilement du très attendu nouvel album de Pierre Lapointe.
Oups, en effet!
PS: Évitons les « La campagne marche pourtant, vous en parlez! » J’en ris. Nuance!
Hop! Les lettres et le communiqué…
Bonjour,
Merci pour cet article avec laquelle le sujet est traité. Je me permet de soulever également le point suivant: l’association de toute cette campagne au mot « schizophrène » est un triste effet colatéral.
Je vous invite à jeter un coup d’oeil à mon texte sur le sujet où cette histoire d’Anik Jean est abordé sous l’angle de la schizophrénie et les préjugés associés à la maladie.
http://blog.douglas.qc.ca/tetesdaffiche/2013/01/09/la-schizophrenie-selon-anik-jean/
Bonne fin de journée,
Charles-Édouard Carrier