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Le ZooFest en rafale : Didier Lambert, Francis Papineau, Les Pic-Bois et le ShoWeb

Parmi la variété de spectacles présentés dans le cadre de la cinquième édition du ZooFest hier, on a notamment eu droit à un brelan de prestations particulières de la part des stand-up Didier Lambert et Francis Papineau, du groupe absurde Les Pic-Bois et du collectif derrière le happening qu’est le Showeb. 

Didier Lambert et Francis Papineau

En début de soirée, on a eu droit aux numéros de Didier Lambert (en blanc) et Francis Papineau (en rouge), deux humoristes connus du grand public comme étant participants à la série En route vers mon premier gala. Rudement en forme, les barbus y sont allés de blagues – parfois salaces, souvent fantaisistes – sur le quotidien. Rien pour réinventer la roue (quoique le délire de Papineau sur les produits promotionnels remis par certaines compagnies était particulièrement percutant), mais beaucoup de matériel pour la faire rouler rondement à en croire les rires fusant dans la salle. Ponctuant ses récits d’incises punchées et de références à l’actualité récente et passée (triste à dire, mais la référence à Newtown était déjà nébuleuse), Lambert a particulièrement ankylosé une histoire autour d’un quelconque voyage à Cuba (lieu commun s’il en est un, en effet), mais s’est admirablement repris par la suite avec un passage sur son rôle de père à venir et sa relation avec les enfants. Un numéro qu’il allongera et peaufinera, on espère. Inquiétant lieu commun toutefois : les deux bonhommes affectionnent tout particulièrement les histoires se soldant par des épisodes de pyromanie. Bref, méfiance.

Les Pic-Bois 

Loin de moi l’idée de prétendre avoir l’autorité d’Éric Clément de La Presse, mais emportons-nous quand même : «believe the hype» lorsqu’il est question des Pic-Bois qui terminaient hier une série de présentation de leur spectacle Corps à corps avec Frite et Moule, une série de saynètes célébrant l’humain des hanches jusqu’au cerveau en passant, évidemment – et longuement – sur les couilles, les fesses et les seins. Ce qui distingue Dom Massi, Maxime Gervais (les fameux Frite et Moule, poètes lubriques) et leurs sbires d’une bande d’ados y allant à fond la caisse dans l’humour pipi, caca, pouet, ce sont des textes particulièrement soignés, intelligents et riches en références (allant du classique Passe-Partout avec un sketch où Maka Kotto «cherche sa main» avec charme et aplomb jusqu’au saugrenu avec des clins d’oeil à Twin Peaks, notamment). Bref de l’humour absurde, osé, mais surtout, intelligent. C’était brillamment niaiseux, disons. Aussi à souligner : une mise en scène particulièrement efficace. C’est malheureusement tout pour les Pic-Bois au ZooFest, mais compte tenu de l’effervescence entourant ce spectacle, je crois bien que la troupe remontera sur la scène très bientôt.

Le Showeb

Happening s’inscrivant dans une tendance particulièrement à la mode cette année au ZooFest (Gab Roy présente également un spectacle lié au Web, Benoit Lefebvre aborde aussi sa dépendance aux réseaux sociaux dans son numéro Débranché, le Geek Show y fait son spectacle et j’en passe…), le Showeb est une étrange créature. Mi-cabaret multidisciplinaire, mi-improvisation, le happening est – à l’image des tréfonds de l’Internet – inclassable, inégal et réservé aux initié(e)s.

Tout d’abord, les fleurs : le charimastique humoriste Dave Morgan s’impose à titre de MC abondant dans les logorrhées nerveuses et sympathiques, suscitant le comédien Charlie Day au passage. Si certaines interventions tombaient à plat (la course aux «likes» sur Facebook était un brin quelconque malheureusement), sa chanson folk consacrée au «slacktivism», elle, était aussi mordante que délicieuse. Véritable canif suisse (il est journaliste, cinéaste et également humoriste), Joseph Elfassi a surpris en mâtant une foule allumée à l’aide d’un discours quasi académique et insufflé d’un maniérisme très «Woody Allenesque» sur quelques têtes de turc du Web local allant du type dont le père est riche en tabarnac jusqu’à Guylaine Gagnon. Aussi à noter : Mathieu St-Onge qui peint des toiles inspirées de suggestions du public en plus de livrer un soliloque web-religieux. Ils étaient également de la partie : Daniel Savoie, le créateur du personnage du joueur de hockey Patrice Lemieux, en entrevue et Gab Roy, limité à commenter le spectacle.

C’est là que le bât blesse, justement : les limitations. Couvrir un sujet aussi vaste et avec tant de participants et d’invités et en si peu de temps est un brin casse-gueule et on l’a vu hier soir. Figure de proue – pour le meilleur pour certains, pour le pire pour d’autres – de ce web jeu local, la participation de Gab Roy était particulièrement écourtée et on aurait aimé l’entendre davantage alors que celui-ci se retrouve, encore une fois, embourbé dans une histoire débordant du contexte Internet du terroir. Loin d’être une mauvaise idée, bien au contraire, le Showeb gagnerait toutefois à revoir sa formule (tant qu’à laisser une place aussi grande à l’improvisation et à l’interactivité, pourquoi ne pas le présenter comme un «talk-show» de fin de soirée?) et sa longueur tout en exploitant un filon que le collectif maîtrise déjà plutôt bien, à mon humble avis.

Le ZooFest se poursuit jusqu’au 28 juillet. Programmation complète sur zoofest.com.

NB: Prière de prendre note que Francis Papineau et Joseph Elfassi se retrouvent dans mon cercle d’amis. Bien que je crois être capable de faire la différence entre les «humoristes» et les «chums de “brossettes”», je préférais tout de même vous prévenir.