BloguesAnnie Roy

Les p’tites fraises des champs…

Nous v’là à Carleton-sur-Mer…on y monte notre expo CHANGE au
Centre Vaste et Vague jusqu’au 16 mars.

Les p’tites fraises
des champs

La profondeur des racines, c’est quelque chose…

Même si  j’ai passé le
plus clair de ma vie à Montréal, je suis une gaspésienne…c’est ici que mes
racines me parlent par les voix de l’air salin de la mer, des galets et des
falaises, du vaste ciel,  des montagnes
de liberté et de labeur…

Le Québec de ma génération s’est construit sur l’exode des
régions de nos parents.  Les miens viennent
tous deux de Ste-Anne des Monts…deux familles de huit enfants dont aucun n’est
resté en Gaspésie…tous à Montréal…mais j’y passais mes étés et quand je reviens
ici, c’est étrangement ma terre plus que nulle part ailleurs!

Je ne sais si c’est l’écho des histoires de mon Grand-père
Omer, la cueillette des petites fraises des champs avec Grand-maman Louisa et
la rhubarbe fraîchement  cueillie trempée
dans le sucre, mais savoir que cette terre là c’est mon arrière-arrière  grand-père qui l’a défriché et donné à Grand-papa
Omer et qu’on n’y a plus rien, à peine un petit lot au cimetière et que malgré
mon sentiment d’appartenance, j’y suis probablement pour les gens d’ici une sorte
de touriste…

Je me fais la réflexion que malgré que je sois étiqueté
québécoise de souche, je suis comme  immigrante en mon propre pays…comme des millions
d’autres comme moi.

Qu’est-ce-que ça vous fait,  vous, enfants urbains de l’exode rurale du
Québec?

Nos parents ont dû abandonner leur territoire pour se construire une vie avec plus de possibilité en ville (éducation,
travail, confort…) mais, maintenant qu’un retour en région se fait sentir, le
défi est de le faire de manière durable. Ça prend des jobs bien sûr, mais aussi
une bonne dose d’amour, d’amour  de la p’tite fraise des champs…

Ici et maintenant

Je me reconnais en ce sens dans les enfants d’immigrants,
réimplantant leurs racines loin du territoire de leurs parents…et ça me fait
aussi penser à la conquête de ce « nouveau » territoire, ce fameux grand
nord, si convoité par les intérêts étrangers…

Le dilemme est que le développement économique grâce à
l’exploitation des ressources naturelles amène du monde à vivre en région  et à se réapproprier le territoire, mais
encore faut-il que cette exploitation se construise dans l’amour du territoire.

Ce territoire, ici et maintenant, est celui de ceux qui
habitent le Québec d’aujourd’hui.  Et que
l’on soit enfant d’immigrants de Ste-Anne des Monts ou de Port-au Prince, il
faudra bien se lever ensemble et se réapproprier cette terre qui ne nous
appartiendra bientôt plus si on n’y plante pas nos racines…afin qu’on n’y soit
pas des touristes à perpétuité…

Toi qui habites le Québec de 2012, tu es ici chez toi, assis
sur des tonnes de richesses et il faut que tes enfants et petits enfants
restent fiers propriétaires de cette terre et il n’en tient qu’à toi de réveiller
la passion du territoire, de ne pas accepter de la vendre à rabais aux
multinationales avides de profits (et d’un gouvernement avide de donner des
jobs à n’importe quel prix…)car elles te jetteront comme un vieux torchon quand
ton bac à sable sera vidé.

Ce territoire vaut cher et ses richesses non renouvelables
ne sont pas à dilapider, pas sur le dos de nos enfants, pas sur celui de l’environnement.
Québécois 2012, soyez confiants, aimez votre territoire, élevez votre capital d’appartenance!