Simplement Montréal : Conte urbain
En quatre thèmes et 600 objets de toutes sortes, Simplement Montréal fait le tour de notre cité bien-aimée. Une exposition intéressante, mais qui témoigne d’une vision un peu molle de la Métropole…
Montréal est une ville qui subit les rigueurs de l’hiver. Si vous ne vous en êtes pas encore rendu compte, eh bien, le Musée McCord se charge de vous l’apprendre. Ça et d’autres propositions, du genre: Montréal est une ville qui a prospéré. Montréal est une ville où l’on s’amuse. Montréal est une ville où l’on se rencontre. C’est en effet autour de ces quatre thèmes – l’habitat, les loisirs, l’économie et la communauté – qu’est organisée l’exposition Simplement Montréal, qu’inaugurait récemment le Musée McCord.
Regroupant plus de 600 objets et 200 photographies, la plupart assortis d’une riche documentation, cette exposition qui occupe tout le deuxième étage du Musée se veut un «coup d’oil sur une ville unique», comme le laisse entendre le sous-titre. Comme coup d’oil, c’est bien; il n’y a pas de doute que les touristes autant que les Montréalais y trouveront matière à satisfaction. Il y a même surabondance d’objets et de textes et d’écouteurs, de quoi vous arrêter des heures durant. Le Musée McCord a en effet mis à contribution tous les pans de sa très riche collection: costumes, vaisselle, jouets, objets de toutes sortes, photographies… Ça va des souliers du géant Beaupré (du 24!!!) aux casse-têtes amérindiens, en passant par les obligatoires photographies de clubs de crosse…
Dans l’ensemble, c’est intéressant, et habilement monté. Malgré la somme astronomique d’objets, cela ne fait pas bric-à-brac. Et puis, tout en se montrant très généreux côté matériel éducatif, le Musée a su également éviter l’effet didactico-gnan-gnan dans lequel tombe trop souvent cette «nouvelle muséologie» en faveur auprès des centres d’histoire et de civilisation. En fait, le point faible de cette exposition, c’est son articulation de départ. D’accord, ces grandes catégories permettent une lecture plurielle et diversifiée de l’histoire montréalaise. On appréciera tout particulièrement, à ce chapitre, la partie économique, qui explique assez bien l’évolution de la ville.
Mais dans l’ensemble, c’est plutôt mou, quand ce n’est pas banal – l’hiver à Montréal… -, voire biaisé. Toute la partie sur la communauté fait part d’une vision multiculturaliste et «bonne-ententiste» de Montréal, carrément excessive. Cela dit, le McCord se charge lui-même de remettre les pendules à l’heure à ce sujet, avec la présentation, à l’étage inférieur, du tandem de caricaturistes Serge Chapleau et Aislin. Nos caustiques représentants des deux solitudes ont beau jouer à copain-copain – le old boys’ club -, les dessins parlent par eux-mêmes. Qu’on le veuille ou non, Montréal reste un champ de bataille identitaire.
Simplement Montréal
Musée McCord
Mystère chez Quartier éphémère
Dans la série «Les grandes aventures du petit conservateur indépendant», Michael A. Robinson vient de signer un chapitre inédit. Il a inventé l’exposition thématique mystère. Il a bien donné un titre au regroupement de cinq artistes qu’il propose à Quartier éphémère: The Death of the Party. Mais c’est tout. Aucun autre indice. Aucun texte, aucun communiqué de presse. «A force de fréquenter les pièces, je m’aperçois qu’il est question du banal, du désenchantement, comme lors d’un lendemain de fête», nous a confié la directrice de la galerie, Caroline Andrieu. Ce serait le fil conducteur. Photographies de clubbers qui s’étreignent (Diana Shearwood), tapisserie de cartons et de dépliants de la mouvance techno (Emmanuel Galland), photographies et peintures de lieux insignifiants (Luigi Discenza), mises en scène de souvenirs d’adolescence (Stephanie Shepherd), instruments de lendemains de concerts cacophoniques (Jean-Pierre Gauthier).
Ça passe tout juste, et là encore, parce que c’est l’été, et que l’été, la désinvolture est de mise et que toutes les autres galeries sont fermées… Les pièces sont plus que moyennes (on a vu beaucoup mieux de la part de Galland), et elles ne traduisent qu’approximativement cette idée de la «mort de la fête», si c’est de cela qu’il s’agit… En fait, la seule chose qui fasse «événement» ici – à part le concert de Gauthier auquel on n’a malheureusement pas assisté -, c’est l’attitude incompréhensiblement «sphinxienne» de Michael A. Robinson (par ailleurs un artiste compétent).
The Death of the Party
Quartier éphémère
jusqu’au 16 août
Sur une tout autre note, Quartier éphémère a conclu une entente sympathique et plutôt audacieuse avec la compagnie de yogourt Liberty, qui se montre de plus en plus entreprenante en matière de commandite culturelle. Liberty s’est engagée à reproduire un fragment d’autoportrait de l’artiste française Laura Martin sur les couvercles de ses produits. Le titre de l’ouvre, qui sera mise sur le marché le 21 août en 90 000 exemplaires: meilleur avant/best before. Gardez l’oil ouvert.
Dernier hommage à Serge Lemoyne
Le jeudi 23, quelque 400 personnes se sont pointées au CIAC pour rendre un ultime hommage à Serge Lemoyne. Fanfare, discours, chaleur accablante. Rien à signaler, sinon les applaudissements nourris de la foule lorsque la compagne de Lemoyne a tourné en dérision les voux de condoléances du Musée d’art contemporain, qui par ailleurs n’avait pas cru bon de déléguer l’un des siens à cette fête. On peut douter de l’à-propos d’une telle manifestation d’antipathie, mais elle ne laissait aucun doute sur la virulence du ressentiment du «milieu» à l’endroit de «son» institution. A moins que ce n’eût été que le dernier coup de gueule de Lemoyne…