Chantal Harvey : Traces et contrastes
Arts visuels

Chantal Harvey : Traces et contrastes

L’exposition Peau d’âme présentée actuellement chez Engramme regroupe les gravures récentes de CHANTAL HARVEY. L’art de faire de bonnes impressions.

Chantal Harvey, originaire de la Basse-Côte-Nord, travaille depuis une quinzaine d’années les techniques de l’estampe. Elle a participé à de nombreuses expositions collectives au pays et à l’étranger et a réalisé plus d’une dizaine d’expositions solos. L’intérêt pour la gravure au Québec ne date pas d’hier. Les artistes québécois se sont intéressés avec ferveur aux techniques de l’estampe depuis les années 1960. D’abord autour de l’atelier du peintre et graveur Albert Dumouchel, puis dans différents lieux de production fondés par les artistes au cours des décennies suivantes: l’Atelier libre de Recherches graphiques, l’atelier Graff à Montréal; ceux d’Engramme et l’atelier de l’Ile à Val-David. Pour certains artistes, la gravure était un travail artisanal où la maîtrise technique dominait. Pour d’autres, c’était la chance d’explorer, pour un temps, un autre médium. Certains y voyaient aussi l’occasion d’une plus grande diffusion de l’art, étant donné la reproductibilité des estampes. Pour Chantal Harvey, la gravure semble être plus qu’un métier ou une technique de reproduction, c’est un langage autonome au même titre que le sont la peinture, la sculpture ou la photographie.

Les gravures qu’elle présente chez Engramme ont été réalisées à partir d’empreintes. Son travail précédent sur les micro-organismes l’a amenée à observer les petits détails. Les traces de ses doigts déposées accidentellement sur le papier lui sont alors apparues pleines de possibilités. Elle a donc pris les empreintes de certaines parties de son corps: doigt, pied, main et bouche. Elles ont ensuite été agrandies par la photocopie et transférées sur bois, puis gravées et imprimées sur papier. La similitude des sillons du bois avec ceux du corps a été le moteur de cette production récente. Nous pouvons constater, en observant les grandes impressions colorées et les matrices de bois, à quel point cette similitude est juste et combien efficace. En plus, la nature de la Basse-Côte-Nord refait surface dans des titres comme Pleine lune ou Vacances à la mer, transformant les empreintes du corps en paysage.

Chantal Harvey a développé à la fois un savoir technique, une sensibilité au médium et une réflexion sur la gravure. Ses gravures sont conçues comme des ouvres uniques par la couleur et chaque gravure est tirée de deux à quatre exemplaires. Cela nous amène à nous interroger sur les rapports qu’entretiennent aujourd’hui les artistes avec la reproductibilité de la gravure. Au-delà du savoir-faire et de l’exploration du médium, peut-elle encore être envisagée comme le lieu d’une démocratisation et d’une plus grande diffusion de l’art?

Jusqu’au 18 octobre
Chez Engramme