Abraham-Louis-Rodolphe Ducros : Scènes de lavis
Le Musée du Québec, en collaboration avec le Musée cantonal des beaux-arts de Lausanne, présente quelque soixante-dix aquarelles du peintre suisse Abraham-Louis-Rodolphe Ducros. Souvenirs italiens du Grand Tour.
Il était courant au XVIIIe siècle de faire le Grand Tour, ce voyage que les gens de bonne famille, les nobles et les artistes entreprenaient à travers l’Europe pour parfaire leur culture. L’intérêt pour l’Antiquité et l’archéologie naissante faisaient de l’Italie une destination incontournable. Quittant la Suisse, Ducros vivra une trentaine d’années en Italie et y peindra avec succès des ruines, des monuments et des paysages en intégrant les habitants et leur vie quotidienne. Ces aquarelles étaient destinées aux touristes de l’Europe du Nord et surtout aux riches Anglais. Elles étaient de luxueux souvenirs à une époque où la photographie n’existait pas et où un voyage était une entreprise de longue haleine. Mais pourquoi s’intéresse-t-on aujourd’hui à Ducros, peintre somme toute peu connu? En fait, l’étude de son ouvre a permis de mettre à jour sa contribution dans la reconnaissance de l’aquarelle, considérée jusque-là comme un médium mineur utilisé surtout pour la réalisation d’esquisses. Tâche d’autant plus difficile que les paysages et, surtout, les vues topographiques que réalisait Ducros étaient situés en bas de la hiérarchie académique des genres. Au sommet de cette échelle, on retrouvait la peinture d’histoire ou mythologique. Bref, on tente en quelque sorte de réhabiliter Ducros. Plusieurs qualités de son ouvre ont motivé les conservateurs. De grands formats inhabituels pour l’époque, ses aquarelles étaient composées de plusieurs papiers collés sur toiles, montés sur cadre et parfois même vernis. Elles pouvaient ainsi rivaliser avec la peinture à l’huile. C’est ce détournement du médium qui a contribué à donner ses lettres de noblesse à l’aquarelle. Ducros fait aussi preuve d’originalité en combinant l’observation et une vision idéalisée des paysages et des monuments. Rocher, végétation, mer et orage prennent une place importante dans ses aquarelles et témoignent de l’intérêt grandissant des artistes et des naturalistes du Siècle des lumières pour l’observation de la nature. Cette exposition n’est pas sans lien avec les ouvres des aquarellistes britanniques influencés à certains égards par Ducros. Certains viendront, après la conquête anglaise de 1759, peindre les paysages canadiens pour attirer leurs compatriotes au Canada. Assez pour nous donner le goût de retourner voir les collections d’ouvres anciennes de nos musées…
Jusqu’au 3 janvier 1999
Au Musée du Québec