Déclics. Art et société. : Le Québec des années 60 et 70.
Changer le monde par l’art a été un des mots d’ordre de toute une génération d’artistes. Si les années 60 et 70 évoquent les grandes transformations sociales, politiques et institutionnelles, l’exposition Déclics rappelle que les artistes y ont joué un rôle important en s’organisant et en repoussant les limites de leur art.
Les années 60 et 70 ont été autant celles de la contestation de l’ordre établi, de la révolution sexuelle, de l’émergence du féminisme et du nationalisme que celles du retour à la terre. Ces années ont été marquées par le développement extraordinaire du monde de l’art et par l’éclatement du rôle et du travail des artistes. L’exposition à deux volets Déclics. Art et société, organisée conjointement par le Musée de la civilisation et le Musée d’art contemporain, propose un portrait, pour ne pas dire un bilan, de ces décennies effervescentes. Les musées de Québec et de Montréal présentent plus de 200 ouvres de 60 artistes. Des archives et des documentaires, ainsi qu’un ouvrage publié chez Fides, abondamment illustré et réunissant les textes d’historiennes, de sociologues et de critiques d’art, permettent de saisir le bouillonnement de ces années. Le volet montréalais de l’exposition envisage les différentes façons dont les artistes ont utilisé la société comme matériau. Quant à celui du Musée de la civilisation, il propose une soixantaine d’ouvres de trente artistes en considérant la transformation du rôle et de l’image publique des artistes parfois militants, animateurs ou anthropologues. On peut y voir notamment les ouvres des Francine Larivée, Sorel Cohen, Ulysse Comtois, Cozic, Serge Lemoyne, Pierre Ayot, Serge Tousignant et Michel Campeau, représentant tout un pan de la production de ces années.
Le titre de l’exposition rappelle un événement important de novembre 1968, intitulé Opération Déclic. Pendant cinq jours, des artistes et des intellectuels questionnèrent les rapports entre l’artiste et la société. Le même automne, la population étudiante occupait l’École des beaux-arts de Montréal, remettant en question l’art et l’enseignement. Les écoles des beaux-arts de Québec et de Montréal, créées en 1921, en étaient d’ailleurs à leurs derniers jours, puisque dès 1969, ce sont dorénavant les universités qui enseigneront les arts. Au même moment, les gouvernements créaient un système public d’aide à la création. Le Conseil des Arts du Canada avait vu le jour en 1957 et le ministère québécois des Affaires culturelles en 1961. On assistera aussi, pendant les années 60 et 70, au développement de réseaux de galeries parallèles et de revues d’art. Plusieurs artistes délaisseront la peinture et les métiers traditionnels pour se tourner vers de nouveaux matériaux et des objets du quotidien. En s’appropriant des techniques comme la vidéo et la photographie, ils ont développé de nouveaux vocabulaires formels et de nouvelles esthétiques. Chez plusieurs d’entre eux, l’art était aussi synonyme d’implication sociale et d’activisme politique. En fait, l’art et l’artiste sortaient littéralement dans la rue. Grâce à toutes ces réformes et aux actions des artistes, l’art sortait aussi du cercle restreint des collectionneurs, artistes et critiques. Ces réformes se sont faites dans le but de démocratiser l’art. Trente ans plus tard, on peut certainement en questionner certains aspects. Mais sans contredit, elles ont favorisé un plus grand accès aux arts visuels, et la création de réseaux parallèles de diffusion à travers le Québec a permis la multiplication des liens entre les artistes et le public.
Jusqu’au 24 octobre
Au Musée de la civilisation
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